AccueilAccueil  Dernières imagesDernières images  RechercherRechercher  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  

.the heart

sample74

Lauly

sample13

P'tit biscuit

sample13

sample13

Blacky

.friendship

Forum fondé par Lauly et P'tit Biscuit. Graphisme et codage réalisés par Felicis. Forum ouvert depuis le 28.02.2019. Forum optimisé pour google chrome.

.contexte

Une vie à Séoul, des histoires qui s'entrecroisent, des liens qui se forment et se déforment. C'est dans cette ville que des histoires s'écrivent sans en avoir l'air, des histoires qui pourraient tout à fait voler la vedette aux dramas affichés sur vos téléviseurs. Votre vie n'est pas pas si différente que celle de l’acteur des plateaux. Déciderez-vous d'obtenir le premier rôle de votre existence ?
- lire la suite

SOS est un forum CITY et privé à petite communauté intimiste. Aucun minimum de mots demandés par rp. Merci de prendre en compte le règlement pour toutes les petites spécifités de la vie de vos bébés au cours de leur vol à bord du jet de la Sos Company Airlines

.news

28.02.2019 - ouverture du forum 04.03.2020 - privatisation du forum 04.03.2020 - recensement numéro 1 18.05.2020 - recensement numéro 2 29.05.2020 - nouveau graph de perfection by Baby Blacky <3
Le deal à ne pas rater :
Réassort du coffret Pokémon 151 Électhor-ex : où l’acheter ?
Voir le deal



When stars are away ||DUBLIN TIME|| Naomi ♥
 :: Les sujets abandonnés Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Mer 18 Mar - 18:15
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Naomi ✻ When stars are away
“Je m’en vais”

Toute la nuit, il avait attendu. Tout comme la journée suivante et la nuit d’après. Est-ce qu’il avait pleuré ? Il ne s’en souvenait pas à vrai dire. Sa seule certitude, c’est qu’il avait attendu. C’était bien tout ce qu’il était capable de faire de toute façon. Attendre. Le lendemain, il n’avait pas non plus bouger de l’appartement… Peut-être se disait-il « au cas où… ». Il avait eu beau lire et relire ce message, aucun des mots ne semblaient parvenir à s’imprimer dans sa tête. “Je suis désolé.” “Je m’en vais.” “Je ne reviendrais pas.” Aucun n’avait de sens. Aucun n’était réel.
Le soir, il fixait la porte de sa chambre quand il ne faisait pas semblant de regarder le ciel sombre. Au fond, il espérait que, comme la dernière fois, Naoki finirait par rentrer de lui-même. Comme la dernière fois, il passerait doucement la porte de cette chambre qu’ils partageaient et se glisserait dans le dos du Coréen sans un bruit, ou seulement une excuse qui avouerait un autre faux départ. Il l’enlacerait et l’aîné ne serait qu’à moitié surpris parce qu’il aurait tant guetté qu’il l’aurait forcément entendu.
Cette même scène il l’avait jouée encore et encore dans sa tête, chaque soir qu’il s’appuyait à sa fenêtre… combien de soirs ? Il ne savait pas vraiment. Il ne comptait pas. Il attendait juste… Et puis toutes ces soirées, toutes ces nuits se ressemblaient. Parfois, il faisait un détour par la chambre de Naoki pour vérifier qu’il n’y était simplement pas. Il y poussait sa porte sans trop oser y rentrer… Il n’avait besoin que d’un coup d’oeil pour constater que la pièce, inchangée, était vide, que Naoki n’y était pas. Puis il refermait la porte et regagnait sa chambre, encore une fois. Et tandis qu’il reprenait son attente silencieuse, il rejouait une nouvelle fois la même scène dans sa tête au bout de laquelle il ne parvenait jamais à trouver le dénouement.
Non. Il ne savait pas ce qu’il ferait si Nao passait cette porte. Est-ce qu’il le prendrait dans ses bras en retour ? Est-ce qu’il crierait ? Est-ce qu’il le supplierait encore une fois de ne pas le laisser ? Est-ce qu’il croirait à ses promesses ? Est-ce qu’il pleurerait ? Il était bien incapable d’anticiper sa propre réaction et ce malgré les nombreuses fois où il avait vu et revu Naoki revenir.
Mais ça n’avait, à vrai dire, aucune importance. Il était bien inutile de se torturer avec cette question… puisque personne ne franchit jamais la porte de sa chambre.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
"...et je ne reviendrai pas"

Il ne saurait dire combien de temps ce manège avait duré. A la fois peu de temps et beaucoup trop pour son coeur, dirait-il sûrement. Il prit néanmoins fin un soir, où comme tous les autres précédents, Mikio s’était appuyé à sur le rebord de sa fenêtre. Le seule chose qui différenciait ce jour qu’il n’aurait même pas su nommer, c’était la visite qu’il avait rendu aux Kotani plus tôt dans la journée.
Est-ce qu'il avait espéré y trouver Nao ? Peut-être, même si ce n'était qu'un espoir ridicule auquel il ne croyait pas. Sa venue eu le mérite de surprendre la fratrie. Yasuo se demanda sûrement ce que l'étrange copain coréen gay de Naoki foutait là sans son protégé. Et à vrai dire, à cette question, il aurait bien aimé que Ren, qu'il se désola au fond de trouver chez lui, lui donne une réponse. Mais si ce dernier ne rata pas une occasion de faire l'idiot à son arrivé, il se montra rapidement plus surpris sous les interrogations du chanteur, voire étonnamment inquiet pour une personne à l'allure si insouciante.
Naoki était parti.
Est-ce que Ren savait quelque chose ?
Est-ce qu'il lui avait parlé d'une destination ?
Est-ce qu'il l'avait contacté... ?
Est-ce qu'il avait la moindre idée d'où il pouvait être ?

Mais malgré les questions du chanteur toutes plus désespérées les unes que les autres, force fut de constater que Naoki n'avait prévu aucun voyage avec son ami. De plus, Ren finit par lui avouer sur un ton amer mais qui laissait transparaitre son inquiétude et son chagrin, que Nao n'avait plus répondu à ses messages depuis quelques jours... quelques jours qui semblaient correspondre au soir où le jeune homme avait disparu. Sans plus d’élément, le Coréen était reparti, ce même air absent sur le visage que lorsqu’il était arrivé. De retour dans sa chambre, il était parti pour reprendre son attente…

Mais son regard se perdit alors sur le paquet toujours emballé qui avait été abandonné sur son lit en même temps que ce mot qu’il connaissait sûrement par coeur. Il ne savait pas pourquoi il ne l’avait pas encore ouvert… ou peut-être que si. Mais s’il l’avait évité durant tous ces jours, sa main se tendit pour le saisir tandis qu’il se laissa tomber sur le lit. Il demeura inerte quelques secondes et l’on aurait pu croire qu’il allait de nouveau renoncer et l’abandonner un jour de plus sur le matelas… Mais ses doigts finirent par pincer un coin du papier et il en déchira un bout mollement. Puis un autre et encore un, laissant les morceaux d’emballage gire sur le sol. Dans ses mains, il tenait à présent un grand livre épais. La couverture était simple quoique finement travaillée. Pas de titre. Alors il l’ouvrit sur le première page et compris qu’il s’agissait d’un album photo… Des photos prises par Naoki. D’eux, de lui, de leur dix derniers mois. Ses yeux se baladèrent lentement sur les clichés, tournant les pages chapitrées. Il y reconnut Kô, leur ancien colocataire et puis, sur une page joliement titré “Umberto”, apparut un adorable chiot à la démarche maladroite. Sur une autre photo, la boule de poil avait ce regard espiègle, une casquette léopard dans la bouche.
L’image était adorable, peut-être douloureuse pour certain. Pourtant, Mikio n’esquissa pas le moindre rictus. Ni attendrit, ni attristé. Il continua de parcourir les pages jusqu’à tomber sur cette photo, centrée sur une des feuille appartenant à la partie “Italie”. Ils apparaissaient tous les deux, souriants, éclairés par le coucher du soleil sur le mont Palatin. Il entendit toutes les explications que Naoki lui avait débité au cours de la journée. Sur le Colisée et sur cette ancienne place importante de la Rome Antique. Il ne se souvenait pas de tout mais chaque mot l’avaient intéressés… à moins que c’était parce qu’il trouvait déjà le côté intello de Naoki bien trop craquant…
Ça lui manquait…. Quand est-ce qu’ils repartiraient tous les deux ?

Et c’est alors que ses yeux se perdaient plus certainement sur ce visage souriant que l’implacable vérité le frappa. Pour la première fois depuis des jours son regard se releva pour consulter la date affichée par le radio réveil. Depuis combien de temps attendait-il ?
Si l’envie lui prit de se retourner une fois de plus pour fixer sa porte, il en fut incapable. Sa vision s’était brouillée, noyée par de grosse larmes silencieuses et sa bouche s’était tordue en un atroce rictus de douleur. Elle ne s’ouvrirait pas cette porte. Naoki ne la passerait pas. Ils ne partiraient pas non plus en voyage. Pas plus que l’aîné ne le trouverait dans sa chambre. Il n’était plus dans l’appartement, ni à l’aéroport, ni chez les Kotani. Naoki n’était plus là.

Il était parti et il ne reviendrait plus. Voilà la vérité.
Il était parti, sans lui, sans une explication. Tout juste le temps d’un sourire, d’un mensonge et il avait disparu de sa vie. Pour toujours ?
Les larmes, il ne parvenait pas à les arrêter. Il n’essayait même pas. C’était à peine s’il les sentait… parce qu’il y avait cette affreuse douleur dans sa poitrine qui s’était réveillé et qui prenait le pas sur les autres sensation. Il y avait ce trou béant et saignant qu’il n’avait pas voulu voir, ni accepter. Il était pourtant là depuis le soir où Nao avait quitté l’appartement. Depuis qu’il avait emporté avec lui sans vergogne ce qui était censé s’y trouver. Ses yeux se reposèrent sur le mot qui accompagnait l’album… Naoki lui souhaitait une vie parfaite… Quel idiot. Comment pouvait-elle l’être sans lui ?

Ca faisait mal. Si mal…. C’était trop soudain, trop brusque…. Il se sentait suffoquer à l’air de sa fenêtre. Et à la douleur et les larmes s’ajoutaient un flot d’incompréhension ainsi que ce sentiment d’abominable injustice. Et il y avait toujours la même question… Peu importe la raison, elle demeurait la même… Pourquoi ?
Pourquoi Naoki l’avait quitté comme ça ?
Alors qu’ils frôlaient le bonheur… Quelle obscure raison pouvait justifier un départ si cruel et balayer tous les mots, toutes les promesses… ?
Qu’avait-il raté ? A côté de quoi était-il passé ?
…. Ou bien aurait-il dû s’en douter ?
… Naoki n’avait-il pas essayé de l’abandonner une fois ?
Mais ça n’aurait plus dû arrivé, n’est-ce pas ? Naoki voulait rester avec lui. Quelques jours encore avant, tout semblait pourtant porter à le croire. Et la journée même avant sa disparition avait été cruellement parfaite... alors…pourquoi si soudainement ? Il avait eu ce changement de comportement soudain au magasin et il avait semblé si nerveux une fois rentré… Manifestement, Naoki avait pris la fuite. Mais pourquoi ??
Pourquoi il ne savait rien ??

Un sentiment peu commun chez lui se mit à gronder dans son ventre. Une colère rare qui refit surface plus violemment que sur cette scène au bat, et qui se manifesta par des poings si serrés que ses jointures blanchirent. Un sentiment de révolte, d’injustice ravagea son être tandis que les mêmes interrogations, hurlées dans sa tête, fusaient encore et encore. Pourquoi l’avoir quitté si brusquement ? Pourquoi ne pas lui en avoir parlé ?? C’était injuste, incompréhensible, inacceptable… ! Ses lèvres subirent une violente morsure nerveuse mais il ne sentit pas le gout du sang…. Il n’y avait qu’une douleur. La même, dans sa tête, son ventre, sa poitrine…
Il lui en voulait. Terriblement. Comme il ne lui avait jamais voulu auparavant. En avait-il déjà voulu à quelqu’un à ce point ? Il l’avait abandonné. Il l’avait vraiment abandonné cette fois-ci. Et tandis qu’il se perdait un peu plus dans ce sentiment de révolte, le souvenir de ce sourire qu’il lui avait adressé au bar avant de le quitter, ne le fit que plus enrager. Oui, il lui en voulait de lui avoir souri. Il lui en voulait encore plus de l’avoir fait au bras de cette femme avec laquelle il avait disparu. Il lui en voulait pour lui avoir donné cette dernière image de lui.
Bien sûr, il se doutait - il l’espérait -  que cette femme ne faisait pas parti du voyage. Il comprenait qu’elle n’avait été qu’un alibi pour mieux endormir le coeur stupide du chanteur afin de disparaître sous son nez. Il lui en voulait pour lui avoir menti. Il lui en voulait pour lui avoir fait ressentir ce pincement au coeur avant qu’il ne lui arrache sans pitié en s’envolant pour une destination inconnue. Sans lui.
Il lui en voulait pour avoir endormi son coeur naïf depuis plus longtemps encore. Pour lui avoir fait croire qu’il ne risquait rien. Que tout allait bien. Qu’ils seraient toujours ensemble.
Et plus il fouillait dans ce coeur qu’il n’avait plus, plus la colère et le chagrin l’envahissait, laissant jusque dans sa bouche un gout douloureusement salé… à moins qu’il ne s’agissait juste de ses larmes qui ne savaient plus par où couler.

Un instant, il se surprit même à détester celui dont il n’avait cessé de guetter le retour. Il le détesta pour l’avoir abandonné et pour le faire souffrir de cette façon…. Il n’avait jamais eu aussi mal de sa vie. Jamais… Rien n’avait jamais causé une telle violence en lui. Rien n’avait semblé tant le bouleverser, le ravager, l’écraser à ce point…. En fait, il le détesta tellement qu’il fut évident qu’il ne s’agissait là pas de haine… mais de tout cet amour qu’il avait pour lui, cet inconditionnel adoration débordante, qui ne savait plus comment être éprouvé.

Alors, tous ces reproches et cette rancoeur, Mikio comprit qu’il les adressait pas à Naoki mais bien à lui. Il était celui à blâmer… pour avoir laissé partir Nao ce soir là, pour avoir été con et ne pas avoir su réagir autrement que par jalousie en ne faisant rien. Plus encore, il s’en voulait pour ne pas avoir anticipé, pour ne pas avoir vu que tout n’était pas ce rêve parfait auquel il aspirait. Il s’en voulait pour avoir été naïf et pour avoir ses seuls mots pour une garantie quand Nao lui, ne lui avait rien promis. Il s’en voulait pour avoir espéré bêtement tout ce temps quand au fond il savait depuis le début…
Si Naoki l’avait abandonné, sa rancune ne ferait pas taire sa douleur. Il pouvait bien essayer de le détester, il était parfaitement incapable de plus l’aimer. Et il l’aimer tellement à en crever que se résoudre à le laisser disparaitre de sa vie… non. C’était impensable. Ce qui lui restait de coeur le lui assurait… renoncer à Naoki, c’était renoncer à battre. Il ne pouvait pas. Il ne voulait pas crever. Il voulait Naoki. Il voulait qu’il revienne. Il voulait le revoir, comprendre….
Il pouvait bien lui faire tous les reproches du monde, tandis qu’il balayait vainement ses larmes sur ses joues, Mikio savait à cet instant que lui ne l’abandonnerait pas et qu’il donnerait tout pour le retrouver. Et il le retrouverait, c’était une certitude.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
“Ne t’en fais pas pour moi.”

Ça n’avait mené à rien. La visite chez Serizawa Daisuke avait été un échec cuisant. Ce qu’il avait cru apprendre ne l’avait ni aidé, ni même rassuré. Mais le pire, c’est qu’il s’était fichu de lui. A croire que les Serizawa avait un talent familiale. La seule piste avec laquelle il était repartie après une longue conversation durant laquelle l’oncle de Naoki l’avait visiblement mené en bateau, ce numéro de carte durement obtenu… C’était faux.
Un mensonge de plus et un retour à la case départ qui était bien trop dur à encaisser…
Bordel… Quand on le lui avait annoncé, une nouvelle vague de rage était montée en lui. L’envie de retourner tambouriner à la porte de ce vieux chacal n’était pas moindre, comme celle de lui hurler dessus ce qu’il pensait bien fort de lui. Est-ce que ça l’amusait de faire tourner en bourrique un pauvre gars qui cherchait son neveu ? Est-ce qu’il se fichait à ce point de ce qu’il pouvait lui arriver ?
Si Daisuke avait probablement plus d’informations qu’il ne voulait bien le dire, Mikio s’était néanmoins abstenu d’y retourner. L’oncle était probablement sa meilleure piste mais il n’en obtiendrait rien de plus, il le comprenait… Y retourner, c’était prendre le risque de perdre son sang-froid et faire un geste regrettable… Dans le meilleur des cas on le jetterait simplement dehors. Dans le pire, il se retrouvait avec la police sur le dos et il n’avait pas besoin de ça pour poursuivre ses recherches. Non, il savait juste désormais que Serizawa Daisuke n’était pas digne de confiance et qu’il valait mieux pour lui qu’ils se recroisent pas par la suite.

Mais Mikio n’était pas prêt à abandonner pour autant. Ce premier échec - était-ce seulement son premier - lui laissait certes un goût salé dans la bouche mais il ne pouvait pas s’arrêter maintenant. Pas tant qu’il ne l’aurait pas retrouvé… Laisser tomber, non. Il refusait tout simplement. Il devait s’obstiner… Oui, même si tout ce qu’il avait c’était cette fausse identité, sur laquelle il concentrait toutes ses recherches. Kobayashi Akira. Ce n’était pas rien en vérité… Et c’était probablement la seule fois où il pouvait se féliciter d’avoir tenu sa langue. Une omission qui lui permettait de conserver la seule piste qui pouvait le mener à son Naoki…

Et si un simple nom pouvait sembler bien léger, il avait un atout précieux dans sa manche. Ou plutôt dans ses contacts. Celui qui avait déclaré que la carte était erronée et à qui il faisait pleinement confiance pour ce jugement.
Alexander. Alex.
Plus qu’un ami d’enfance, il était un membre de sa famille. Ou plus exactement de celle de son meilleur ami, Jae Min. Et s’il avait plus ou moins coupé les ponts avec ce dernier pour des raisons stupides qu’il aurait bien le temps de ruminer plus tard, Mikio avait cependant régulièrement son cousin au téléphone. Principalement pour avoir des nouvelles de celui qu’il n’appelait plus… Alex vivait à Londres mais il était très proche de Jae.
Néanmoins, lorsqu’il avait décroché son portable la veille pour joindre l’Anglais, le motif de son appel avait été tout autre.

« Alex… J’ai besoin que tu m’aides à retrouver quelqu’un. »

En dehors sa relation avec Jae Min, Alex avait d’exceptionnelles compétences en informatique. Du genre à faire pâlir les agents du FBI dans les séries. L’Anglais était un personnage unique, souriant parfois turbulent et qu’on pouvait par moment trouver un peu simple. Pourtant, face à un ordinateur, le jeune homme se transformait en véritable génie, ce qui avait toujours intrigué le Coréen, lui qui n’avait aucune connaissance excédant un usage ordinaire… Et à vrai dire, il n’aurait jamais pensé à se servir de ce talent un jour. Jusqu’à hier, ce n’était pour lui que le scénario d’un film… Aujourd’hui, c’était sa réalité et il espérait de toutes ses forces que tout ça se terminerait dans un happy ending.

Ce fut sûrement la détresse du chanteur qui poussa Alex à accepter cette demande particulière et plus que surprenante. Il n’avait jamais entendu Mikio supplier à vrai dire… et ça avait de quoi interloquer. Naoki… Il devait retrouver Naoki… Ce prénom qu’il avait dû entendre quelque fois dans la bouche du Coréen au téléphone. Son colocataire avait-il dit. A présent, il ne prenait même plus la peine de le présenter… C’était Naoki et il fallait le retrouver, Mikio l’en priait.
Au fond, Alex avait de bonnes raisons de refuser… les mêmes qui auraient sûrement dû le pousser à lui demander de rentrer à Busan plutôt que de partir à la recherche d’un garçon qui l’avait quitté. Mais il avait accepté. Il avait même promis à ce misérable métis qu’il ferait tout son possible pour l’aider. Parce qu’il était trop gentil, parce qu’il aimait quand même beaucoup Mikio en dépit de ces cinq dernières années et probablement surtout parce qu’il n’aurait jamais osé refuser quand il n’avait jamais autant ressenti l’urgence et l’importance d’une telle demande…

Alors, Mikio lui communiqua aussitôt toutes les informations qui pourraient être utiles. Son nom et prénom, celui de sa fausse identité, son numéro de téléphone - celui qu’il connaissait -, des photos, ses pays favoris jusqu’à lui indiquer que Naoki avait manqué un départ pour la Nouvelle-Zélande la première fois… Il lui énuméra également ses activités favorites, poussant le vis jusqu’à préciser d’une voix un peu tremblante que Nao adorait la nourriture italienne… C’est vrai… Naoki n’irait pas s’installer dans un endroit où les pizza n’existaient pas, n’est-ce pas … ?
Tous ces éléments, parfois même détails ridicules, seraient probablement utile à Alex… mais il avait conscience au fond que c’était bien insuffisant quand le terrain de recherche était le monde entier.

Sans surprise, Alex lui apprit que le numéro de téléphone qu’il lui avait donné n’était plus actif. Evidemment que Mikio avait déjà essayé de l’appeler. Ça avait même été son premier réflexe… Et à chaque fois, c’était cette voix désincarnée qui lui répondait. Cette même voix qui l’avait rendu un peu plus fou de désespoir à chaque fois… Évidemment que Naoki ne lui répondrait pas… mais il avait persisté. Il avait même vérifié si le numéro enregistré depuis presque un an était le bon… Et il avait même été assez bête pour guetter la moindre sonnerie, sursauter à la moindre vibration fantôme en espérant toujours qu’il s’agissait de Naoki… mais ce n’était jamais lui. Naoki ne l’appellerait plus, pas plus qu’il ne lui répondrait.
De Serizawa Naoki, il ne semblait plus rester aucune trace. Aucune en dehors de ce qu’il avait laissé dans cet appartement… des vêtements, des photos… et deux coeurs anéantis.

Alex était gentil. Il faisait de son mieux pour rassurer Mikio avec sa maladresse bienveillante. Mais la vérité c’était que l’Anglais était désormais l’unique bouée à laquelle le Coréen pouvait se raccrocher. Parce qu’il ne pouvait rien faire d’autre que placer tous ses espoirs en lui… Il ne voulait pas s’avouer vaincu maintenant. Il retrouverait Naoki et tout rentrerait dans l’ordre. C’était ce qu’il se répétait. Il le retrouverait et cette plaie béante qui semblait s’infecter un peu plus chaque jour sans lui finirait par se refermer. Oui… Il guérirait… à condition qu’il puisse de nouveau serrer Naoki dans ses bras.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
"Je suis heureux de t’avoir rencontré"

L’attente reprit.
Il avait donné toutes les informations, utiles ou non, à Alex… et s’il eu beau chercher, il n’avait pas d’autre moyen de l’aider. Il était désormais quasiment sûr que Naoki avait quitté le Japon… et de Tokyo, il ne pouvait rien faire. Il était parfaitement impuissant ici… Pourtant, les jours suivants, il se mit à arpenter les rues de la capitale quand il n’attendait pas à la maison. Avant de se rendre à son travail, vers lequel son pas se faisait de plus en plus lourd, il cherchait dans les bars, les restaurants qu’il savait ou pensait fréquentés par Naoki.
Les parcs, le bord de mer, Eita….
Mais cette recherche a priori stratégique n’était en vérité qu’une errance aussi douloureuse qu’hasardeuse durant laquelle il ne trouvait rien d’autre que du temps à combler dans l’attente d’un appel, d’une bonne nouvelle… Les jours défilaient, Mikio répétait le même manège vain… et rien.
Rien que ce silence et cette douleur sourde dans sa poitrine qui ne parvenait pas à s’apaiser. Une angoisse qui par moment l’étouffer… et menaçait d’éteindre ce stupide espoir auquel il s’accrochait désespérément.

Un soir de plus, Mikio poussa la porte de l'appartement. Jouer ce soir avait été terriblement difficile. C’était le bar dans lequel il s’était mis en tête de changer les idées à Naoki…. Le bar que ce dernier avait quitté au bras de cette fille. Le dernier bar, le dernier endroit où ils avaient partagé le même espace avant qu’il ne s’évanouisse dans la nature. Il ne se souvenait pas être arrivé en retard, pas plus qu’il ne se souvenait des paroles du patron. Pourtant il avait bien dû lui faire des remontrances durant la soirée. Il n’avait pas donné son meilleur jeu. Mais il se souvenait uniquement de ce poids si lourd qu’il avait durement traîné sur la scène et qui n’avait fait que peser un peu plus à chaque accord.
Est-ce que c’était son coeur ?
Nao n’était pas censé l’avoir emporté avec lui ?
Il ne battait plus pareil. Ce n’était qu’une sensation fantôme qui l’avait poursuivi jusqu’à chez lui. Qui le poursuivait en réalité depuis qu’il était parti… Naoki.
La douleur, elle, était pourtant bien réelle. Lancinante, incessante, toujours présente. Elle se fit un peu plus entendre quand, pénétrant dans l’appartement devenu trop grand pour lui, il ne reçut qu’un accueil semi-enthousiaste d’Umberto. Le chien avait trottiné vers lui, sa queue battant l’air bien moins rapidement qu’à l’habituel. Il renifla son papa, pleura pour quelques caresses et réitéra ce même manège qui durait maintenant depuis des jours et qui brisait un peu plus les miettes de son coeur… « Non Umberto… il n’est pas là… » Derrière lui, il n’y avait personne. Derrière la porte, il n’y avait personne non plus. Mais Umberto s’obstinait à chercher après lui. Une fois que le Coréen était rentré, une fois qu’il avait eu ses caresses, il ne le rejoignait pas dans le salon pour en réclamer plus. Il ne réclamait pas non plus de sorties ni de repas. Il s’asseyait simplement devant la porte et la fixait.

Quand Naoki était parti en Australie, Umberto agissait déjà un peu de cette façon. A cette époque, son papa le rassurait, lui parlait de son autre papa. Parfois, il lui tendait même ce boitier complexe qui faisait des images comme la télé et d’où sortait la voix de celui qui lui manquait. Il l’entendait lui parler en Italien et il lui répondait d’un aboiement joyeux. Et quand la conversation prenait fin, il se laissait convaincre par quelques câlins sur le canapé avec son second papa.
Mais c’était différent aujourd’hui. Naoki n’était pas en Australie, ou peut-être l’était-il mais il n’en avait informé personne. Il ne repasserait pas non plus cette porte au bout de deux semaines. Quand à son papa coréen, il n’était plus aussi rassurant. Il avait pourtant l’air d’essayer… Il lui avait déjà dit que Papa reviendrait. Qu’il le retrouverait. Mais peut-être tentait-il seulement de se convaincre seul… Umberto ne comprenait peut-être pas tout mais il le voyait bien que Mikio le cherchait de la même façon que lui. Qu’il attendait désespérément. Et qu’il était incapable de formuler la moindre promesse….
Alors devant cette porte d’entrée qui ne s’ouvrait jamais après le chanteur, Umberto préférait attendre.

Mikio finissait par renoncer à faire bouger son chien, même après lui avoir servi sa gamelle, et il regagnait sa chambre. Rester dans le salon face à cette scène lui brisait le coeur qu’il n’avait plus… Il vérifiait néanmoins que le lendemain que son fils avait mangé - ce qu’il faisait sûrement pendant la nuit où le matin, quand lui-même abandonnait sa veille.
Le chanteur poussait une nouvelle porte vers cette pièce obscure uniquement éclairée par la lune. Si la fenêtre n’était pas déjà ouverte, il y remédiait et se calait sur son rebord. C’était sa nouvelle place désormais. Peu confortable certes, mais il s’en moquait bien. Il y avait bien un fauteuil à côté mais… Il ne voyait pas assez bien le ciel à son gout. De la fenêtre, il pouvait se noyer dans cet océan sombre. Se perdre dans cette mer de constellation qu’il avait appris à reconnaître. Pas toutes bien sûr, il devait même faire des erreurs. C’était devenu comme un jeu, mécanique et sans amusement. A vrai dire, il ressentait par moment cette lame familière dans son coeur. Mais ça avait au moins le mérite de tuer le temps…

« La Grande Ours. » La grosse casserole. C’était la première qu’il avait toujours su repérer. Après elle, l’étoile Polaire. L’étoile des marins. Pas très loin, il y avait… « Le dragon. » Mais il n’était pas certain de bien le voir. Ses yeux fatigués se détournèrent du ciel pour se poser sur téléphone qui n’avait pourtant pas vibrer. Il n’était sûrement qu’un idiot à prétexter chaque fois qu’il n’avait peut-être pas entendu… On n’était jamais trop prudent songeait-il. Mais il n’y avait ni message, ni appel. Aucune notification intéressante. Alex lui avait déjà fait un rapport peu concluant plus tôt aujourd’hui… Mikio ne pouvait décemment pas le harceler. S’il avait quelque chose, il savait pertinemment que l’Anglais l’appellerait aussitôt. Pourtant, il s'obstinait à lui envoyer un message chaque jour… Pauvre Alex. Et lui n’était définitivement qu’un crétin…

Son écran balayé, il s’obscurcit sur ce visage tant aimé mais qui lui faisait pourtant si mal aujourd’hui. Par masochisme surement, Mikio rappuya sur le bouton pour éclaircir de nouveau son téléphone et se perdre quelques secondes - minutes - de plus sur cette photo. Naoki abordait un air surpris tandis qu’il s’occupait parfaitement de leur fils à moitié recouvert par une serviette humide. Il aimait tellement cette photo… Elle ne valait pas celles de l’Italien mais, elle avait le mérite d’avoir été pris au bon moment. Et puis Nao, bien que ça ne changeait pas du reste du temps, était vraiment beau dessus.
Quelle journée…
Elle ne remontait pas à si loin pourtant… ça ressemblait à une autre époque.
Une époque où ils étaient heureux ?
Ou bien était-ce Mikio qui avait été trop naïf…. Vraiment si naif…

Le poids dans sa poitrine s’alourdit. Avec difficulté, il déglutit et se rendit compte que sa gorge était tout aussi nouée.
Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu’il était parti ?
Pourquoi ne lui avait-il rien dit ? Pourquoi ne pas lui avoir fait confiance ? Pourquoi Mikio se trompait-il sur toute la ligne ?
Il ne lui faisait pas confiance. Mikio n’était pas magicien.
Il ne le retrouverait pas… ?
Non… ça non… Il secoua la tête.
Qu’est-ce qu’il ne comprenait pas ? Qu’est-ce qui lui échappait tant chez Naoki ?
Tout. Trop de choses… Son oncle l’avait si bien souligné d’ailleurs. Il ne savait rien de lui… Non. Il savait assez pour vouloir tout faire pour le retrouver.
Daisuke avait dit autre chose aussi… Il avait laissé entendre que Nao fuyait. Quoi… ? A quoi est-ce qu’il voulait échapper ? Sûrement pas lui… Si ? Il ne pensait pas. Il ne savait pas à vrai dire… Naoki… est-ce qu’il avait des ennuis ?
Mais quel genre ? Dans quel pétrin s’était-il fourré ?
… Ou est-ce qu’il s’imaginait des choses ? Se faire peur pour se rassurer ?
… Se persuader que ce n’était pas de sa faute… ?
Quelque part, il était forcément fautif… Il ne serait pas là sinon, dans le noir d’une chambre, à se poser toutes ces vaines questions sans avoir la moindre chance d’obtenir une quelconque réponse. Il ne serait pas tout seul. Il n’aurait pas si mal.
Pourquoi Nao était parti… ?

Il avait beau poser en boucle cette question, il ne parvenait à aucune conclusion satisfaisante. Et tout ce à quoi il s’accrochait désormais c’était l’idée qu’il le retrouverait coûte que coûte… Parce que s’il abandonnait…. Il ne savait pas ce qu’il ferait ensuite… Mais tout lui paraissait inacceptable. Il devait le retrouver et le ramener à la maison.
C’était tout ce qui comptait….
Vraiment… ?
Et Naoki ? Ça ne comptait pas ce qu’il voulait ?
… Il ne voulait pas vraiment être loin de lui… si ?
…. Est-ce qu’au final, ce qui faisait tenir Mikio n’était pas juste un mensonge ? Une motivation purement égoïste ?

Son écran redevint noir à nouveau. Dans une faible expiration, il abandonna son téléphone dans sa poche pour fouiller de nouveau les étoiles. N’était-ce pas ridicule de les trouver tellement moins belles quand il n’était pas là ? L’arrière de son crâne cogna l’encadrement de la fenêtre et ses yeux se perdirent longuement sur la voûte céleste. Machinalement, il reprit son jeu. Peut-être aussi par égoïsme quand sa réflexion se faisait trop déplaisante. Il préféra se poser d’autres questions. Retrouvant sa casserole, il se demanda… Naoki jouait-il aussi à ce jeu stupide de là où il était ?
Est-ce qu’il regardait aussi le ciel ?
Est-ce qu’il cherchait son cerf-volant… ?

Inconsciemment, il se mit à le chercher à son tour. Il suivit le chemin que Naoki lui avait indiqué plusieurs fois pour le trouver. Il y avait beaucoup de cerf-volant dans le ciel… et d’autres formes qui n’avaient pas de correspondances officielles… Mais celui-là, Mikio tenait à le trouver.
« Ophiuchus. » Un miracle qu’il parvienne à le prononcer. Il s’était entrainé beaucoup pour ça. Pour obtenir un sourire fier de Nao… Et à quoi ça lui servait maintenant ? Maintenant qu’il l’avait trouvé et qu’il savait le dire ? Qui était là pour le féliciter ? Il était seul. « Quel nom barbare… » Alors personne ne le réprimanderait avec une moue vexée. Personne ne se sentirait blessée de cette réflexion dite à haute voix puisqu’il n’y avait personne pour l’entendre. Naoki était parti. « Eh toi, le cerf-volant…. Pourquoi tu ne me le ramène pas hein ? » Il était si seul qu’il se mettait à parler aux étoiles maintenant ? A quel point était-il ridicule ? « Pourquoi tu ne m’emmène pas à lui ? » Il n’avait pas bu. Il n’avait pas de fièvre. Est-ce qu’il avait déjà perdu l’esprit ? Dès l’instant où Nao avait disparu… « Stupide cerf-volant… » Mais il s’en moquait parce qu’il n’y avait personne pour le juger. Personne pour entendre sa gorge se serrer. Personne pour lui souligner qu’il se battait contre rien. Personne pour lui faire remarquer qu’il pleurait…

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

“...et chanceux...”

« Aie…! » Mikio lâcha immédiatement le couteau et porta son doigt à sa bouche. Très vite, un goût métallique envahit sa bouche. « Merde… » Des yeux, il fouilla la cuisine à la recherche d’un essuie tout mais il ne trouva rien d’autre qu’un torchon usé qu’il se résolut à utiliser. Le tissu s’imbiba rapidement et prit une couleur sanguine peu avenante. Face à ce résultat, le Coréen fronça le nez. Quel abruti… Il avait tout intérêt à se recentrer s’il ne voulait pas perdre un doigt…
Il poussa un soupire las et jeta un regard vers sa préparation qu’il décida simplement d'abandonner pour le moment. Ses nouilles sautées attendraient. Couper une carotte n’avait visiblement jamais été aussi dangereux. Mieux valait réparer sa connerie s’il ne voulait pas avoir une mauvaise surprise au moment de gouter… Le vampirisme, ce n’était pas encore son truc.

La vérité, c’est qu’il n’avait de toute façon pas très faim. Ses nouilles, il les avait fait parce que… parce qu’il devait bien avaler quelque chose aujourd’hui. Même si son estomac était noué, même si rien ne lui faisait envie, ni n’avait de goût. S’il s’écoutait, il se laisserait sécher sur le rebord de sa fenêtre…. Or il ne pouvait pas faire ça. Il avait un chien dont il devait s’occuper et qui demeurait d’ailleurs sa seule motivation à ne pas vivre exclusivement dans sa chambre. Et puis, il ne pouvait pas non plus se laisser trop aller car… qu’est-ce qu’il dirait à Naoki quand il le retrouverait ? Quel droit aurait-il à surveiller qu’il mange bien s’il ne le faisait pas lui-même ? Un minimum. Il devait faire un minimum d’effort…

Cependant, face au miroir de la salle de bain, il fallait se rendre à l’évidence. Il ressemblait déjà à une épave. Croiser son regard lui faisait pitié. Il n’avait déjà pas des yeux très grands mais là… Ses cernes étaient abominables. Personne n’oserait lui dire qu’il avait bonne mine… Il secoua la tête pour se reprendre et ouvrir la pharmacie à la recherche de pansements. Le lavabo était déjà maculé de tâche rougeâtres alors qu’il venait tout juste de se débarrasser du torchon. Il ne s’était pas raté… Une bande semblait plus judicieuse qu’un pauvre pansement.
Des pleures aiguë et lancinant attirèrent son attention à ses pieds. C’était Umberto qui l’avait rejoint dans la salle d’eau, la queue basse et l’air qu’il pouvait presque qualifié d’inquiet. Et c’était peut-être bien tout ce qui avait pu le pousser à quitter son poste... Le chien avait dû sentir l’odeur acre du sang et venait s’enquérir auprès de son papa. « C’est rien Bébé… Ça va. » Il aurait aimé s’accroupir pour le rassurer mais il ne voulait pas risquer de souiller sa belle fourrure immaculée. Alors il continua de fouiller et quand il mit enfin la main sur une bande. Il désinfecta maladroitement, réprimant une grimace douloureuse avant d’appliquer grossièrement la bande autour de son doigt. Le résultat n’était pas des plus élégant mais peu importe, tant que ça tenait…

S’assurant qu’il ne pourrait plus tâcher son chien qui n’avait pas quitté la pièce, il s’autorisa à s’accroupir pour flatter doucement son cou et tenter de lui souffler des mots réconfortants : « Ça va, regarde… J’ai rien… » Il lui montra sa main pansée et Umberto l’a renifla avant de s’essayer au coup de langue magique pour soigner complètement son papa… Il eu un faible sourire. Si faible en fait qu’il était probablement le seul à savoir qu’il souriait. Ou à le croire… « Ça va bébé… Je vais bien… » Là aussi, il devait être le seul à croire à ce mensonge.

Évidemment qu’il n’allait pas bien. Il pouvait bien faire tous les efforts du monde pour faire semblant, personne ne pouvait y croire. Pas avec cette gueule… Ni en manquant de se couper le doigt. Il était clairement ailleurs… de plus en plus… Et le manque de sommeil ne l’aidait pas.
Ça faisait un mois maintenant… Un mois qu’il ne parvenait pas à fermer l’oeil la nuit. Quand il finissait par s’endormir, c’était d’épuisement. Il lui était arrivé de s’endormir sur le rebord de la fenêtre, dans son fauteuil… Mais son lit…
Il était trop grand. Trop froid pour lui tout seul. Il ne s’y faisait pas. Se coucher était devenu une épreuve… Quand il cherchait encore l’odeur de Naoki sur l’oreiller, sa poitrine se comprimait bien trop pour que les larmes ne noient pas instantanément ses yeux. A présent, il n’y avait presque plus rien… rien que le vide. Il préférait depuis quelques temps le canapé, près de son chien quand il acceptait enfin de l’y rejoindre… Il ne dormait pas mieux mais au moins ni l’un ni l’autre n’était tout seul dans son coin.

Ça n’empêchait pas ce flot de questions de le submerger. Umberto avait beau lui apporté un peu d’apaisement, ça ne suffisait pas pour faire taire son angoisse. Cette absence de résultat le rendait fou… L’absence de Naoki tout court le rendait fou… Où est-ce qu’il était… ? Qu’est-ce qu’il faisait ? Est-ce qu’il allait bien ?
Il savait qu’Alex faisait de son mieux mais Naoki avait visiblement trop bien travaillé pour couvrir ses traces. L’Anglais essayait néanmoins de rester optimiste et Mikio ne pouvait pas lui en vouloir. Il était toujours plus utile que lui tout seul… Mais tout ce qu’il voyait, c’était les jours défiler. Sans Naoki. Lentement… telle une agonie silencieuse. Il devait le retrouver… mais avant, il devait se reprendre lui-même. Il ne pouvait décemment pas continuer comme ça… Pas quand son état affectait clairement son travail.
… Quand il y allait.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

C’était devenu de plus en plus difficile. Il s’était déjà fait renvoyer un soir parce qu’il allait « faire fuir les clients avec une tronche pareille », selon le patron du bar. Parfois, il n’avait tout simplement pas la force d’attraper sa guitare… Il préférait rester avec Umberto et ses seules sorties se résumaient à leur promenades. Se bouger… il essayait vraiment pourtant. Peut-être pas assez bien… Naoki lui manquait. Il lui manquait à en crever…

En sortant de la salle de bain, il passa inévitablement devant la porte de sa chambre. Celle de Naoki… Elle était fermée, parce qu’il prenait bien soin de la garder ainsi. Surtout lorsqu’il cédait à l’entrouvrir… Mikio s’arrêta devant. Est-ce qu’il allait le faire encore une fois ? Sa poitrine était douloureusement comprimée. A quoi ça lui servirait ? Sa main se tendit pourtant vers la poignée, non sans une nervosité certaine. Entre ses doigts, il la serra et remarqua qu’ils tremblaient…. Est-ce qu’il aimait tant que ça se faire du mal ? Il actionna la poignée et poussa la porte.
Bien sûr, une fois de plus, il ne trouva pas Naoki à l’intérieur. Il n’y avait personne, il le savait. Il n’espérait aucun miracle en ouvrant cette porte.
… Alors quoi ? A quoi bon continuer de l’ouvrir et se planter devant pour observer une pièce parfaitement vide ? Il allait simplement la refermer, comme toujours, continuer sa route et reprendre cette attente insupportable. C’était tout ce qu’il y avait à faire…

Mais cette fois, Mikio franchit le pas de la porte. Il n’avait jamais osé le faire depuis que son cadet avait rendu cette chambre orpheline. Il ignorait pourquoi aujourd’hui il ne pouvait rien faire d’autre que s’avançait à l’intérieur. Sa poitrine n’était pas moins douloureuse. Son poing était fermement scellé contre sa hanche. Il entendit sur ses talons les pas de son fils qui n’avait pas pu plus exploré que lui… L’atmosphère était lourde. Pas seulement à cause de la chaleur ou de l’absence d’aération depuis un mois. C’était tout autre chose qui pesait sur le fantôme de son coeur…
La pièce était restée telle quelle. Rien n’avait bougé ou presque. Très peu de choses avaient été emportées… Si Mikio regardait sous le lit, il verrait sûrement que la valise avait disparu. Il ne s’infligea cependant pas cette constatation. La guitare n’était plus là. L’appareil photo manquait aussi. Qu’en était-il de son violon ? Il aperçut son étui à sa place. Naoki ne l’avait visiblement pas pris. Il n’avait sûrement pas eu la place de la faire dans la précipitation du départ. Le dressing ouvert était encore plein mais il n’eut pas le coeur de s’y aventurer davantage.
Puis son regard se fixa en face de lui, sur ce mur de photos qui donnait autrefois toute son âme à cette chambre pourtant inutilisée. Elles n’avaient pas bougé. Cette fois, elles ne formaient aucun mot d’adieu. Elles demeuraient juste là… Comme si Nao n’était jamais parti. Comme si tous ces visages avaient encore une raison de sourire. Mikio s’adonna à une bien étrange contemplation… Hors du temps. Hors de toutes ses préoccupations qui le bouffaient à petit feu. Hors de cette douleur qui pourtant, consommait sa poitrine chaque seconde un peu plus qu’il se perdait sur ces clichés… Il ne comptait pas y toucher. Non… Tout jeter ne lui effleurait même pas l’esprit… Il n’en serait jamais capable. Il était faible… si faible… Et désespéré, dans cette chambre qui semblait bêtement être devenu un sanctuaire…

Il fit quelques pas de plus jusqu’au lit. Ses doigts vinrent effleurer le couvre lit parfaitement placé. Sa poitrine se serra mais il ne recula pas. Au contraire, il se laissa lentement tomber sur le matelas. Le lit de Naoki… C’était très certainement stupide de céder à s’y allonger. Il avait si peu dormi dedans que le Coréen ne pouvait pas espérer y trouver la moindre trace de parfum familier… Mais ça n’alourdissait pas moins son coeur qui menaçait de craquer… Parce que les souvenirs l’inondèrent impitoyablement… Ils avaient partagé cette couche lorsque Nao était malade. Ils avaient passé de nombreuses nuits et journées blottit l’un contre contre l’autre en dépit de la fièvre du plus jeune. Naoki… Mikio se souvenait de la faible poigne de ses mains qui s’accrochaient désespérément à lui, qui le retenaient de toutes ses maigres forces alors même que l’aîné n’avait pas l’intention de s’éloigner. Il se souvenait de ce corps tremblant qui cherchait la chaleur d’un autre, de ce nez qui fouillait un cou pour se soulait à une odeur réconfortante. Il entendait à nouveau cette bouche qui l’implorait de le serrer plus fort, qui lui faisait promettre de ne pas le quitter.
Il ne le quitterait jamais… Il serait toujours là pour lui. C’était sa promesse. Celle qu’il faisait sans hésitation.
Alors pourquoi… ? … Pourquoi Nao était parti ? Pourquoi croyait-il avoir le droit de le quitter lui ?
Ses doigts s’étaient serré sur les draps qui jusqu’alors n’avaient aucun aucun pli. Tremblant, il profana un peu plus le parfait ordre de cette chambre dont il se moquait éperdument. Et même si personne ne le voyait, il s’obstina à cacher son visage contre le matelas, serrant les dents quand sa gorge se faisait de plus en plus serrée. Naoki… Bon sang… Pourquoi était-il parti comme ça… ?
Il ne pouvait l’avoir voulu… Pas après tout ça…
Mais s’il n’avait pas le choix… S’il ne pouvait plus rester près de lui… S’il n’était pas parti pour une raison si futile que ça… Mikio pouvait-il vraiment prétendre à le ramener ?
Qu’est-ce qu’il ferait si tout ça ne menait à rien ? Qu’est-ce qu’il ferait si Nao lui disait qu’il ne rentrait pas avec lui ? Devrait-il le forcer ? Etait-ce vraiment juste ?
Ou devrait-il renoncer… ? Maintenant… abandonner… Accepter qu’il ne le reverrait peut-être jamais… ? Pourrait-il seulement vivre avec ça… ? Ou plutôt sans lui… ?
Sa mâchoire grinça et il fut incapable de retenir ce sanglot qui attendait dans sa gorge depuis trop longtemps…  

Une vie sans lui… Il ne l’imaginait même plus maintenant. Ça lui semblait si impossible qu’il ne pouvait vouloir que le retrouver… Ça ne pouvait pas se finir comme ça… Il n’y survivrait pas. On pouvait bien se moquait de lui, il n’exagérait pas… Son état était déjà assez déplorable…
Était-ce bien raisonnable ? Se rendre malade à ce point pour un gosse qu’il ne connaissait pas depuis un an ? Un gosse dont il était tombé éperdument amoureux… un gosse qui s’était gravé si profondément dans son coeur qu’il l’avait forcément emporté avec lui… Naoki
Qu’est-ce qu’il faisait si loin de lui ?
Est-ce qu’il avait aussi mal que lui ? Est-ce qu’il n’avait vraiment plus besoin de lui ?
Lui… Lui il avait besoin de Naoki… Désespérément…
Reviens…. S’il te plait… Reviens…
J’ai besoin de toi… Reviens…
Je t’aime…


Naoki aussi. Il lui avait dit tant de fois. Une dernière sur ce mot… Il ne lui avait pas menti, il en était sûr. Mais ce qu’il lui souhaitait ensuite… Une vie parfaite ? Remplie de ce qu’il méritait ? Naoki… Comment tu pouvais être aussi stupide ? Et cruel…
Crétin… C’est toi que je veux… C’est toi que j’aime…

Une pression sur son pied lui fit tourner le visage. Umberto pleurait au pied du lit et frottait désormais sa tête contre sa cheville. Il n’était pas tout seul… il y avait ce bébé… qui souffrait surement autant que lui. Il déglutit avec peine et s’essuya grossièrement son visage ridiculement mouillé. Il se redressa tout aussi péniblement et tapota le matelas pour donner le signe tant attendu par son fils. Umberto sauta aussitôt sur le lit et s’allongea aux côtés de son papa… Ce dernier glissa un bras sous lui pour l’attirer doucement et l’animal se laissa faire, posant son museau contre l’emplacement vide de son coeur. « Pardon mon chien…. Je sais qu’il te manque à toi aussi… » Il caressa doucement sa tête tandis que sa seconde main se posa sur ses yeux… « Je voudrais être moins pitoyable… J’essaie, je te promets… mais…. je sais plus quoi faire…. Je sais plus… » Il tenta en vain de retenir ses nouvelles larmes qui furent accueillit par un coup de langue qui se voulut sans doute consolateur… D’une caresse sur le museau, Mikio le remercia puis son regard se posa sur cette gourmette qui n’avait jamais quitté son poignet… Il retourna légèrement la plaquette pour distinguer l’inscription raffinée… Naomi… et la date de leur rencontre…
Offert le soir d’une Saint Valentin bien étrange… peut-être là où tout avait commencé à basculer… À moins que ça ne soit à Narnia, comme il l’avait suggéré lors de leur dernier matin… Mais quoiqu’il en fut, cette gravure prouvait que leur histoire n’avait rien de commun et tout de spéciale… Naoki l’avait dit lui-même ce soir là… Ils étaient destinés à se rencontrer…  Alors…ça ne pouvait décemment pas être si éphémère, non ?

Est-ce que tu l’as gardé toi aussi…?
Est-ce que tu te souviens de ce que tu as dis ?
Est-ce que tu le crois toujours ?
Est-ce tu repenses à tout ce chemin, tous ces moments ensemble ?
Est-ce que tu crois vraiment que ça doit se finir comme ça…?
Moi, je suis peut-être qu’un crétin naïf mais… je crois à chaque mot que tu as prononcé sur nous… J’y crois si fort que si je devais avoir tort, ça me crèverait sûrement…
Mais tu as promis… Tu as promis que ce n’était pas un mensonge…
Alors qu’est-ce que tu fais loin de moi.. ?
Si seulement tu pouvais entendre mon coeur hurler, supplier… Si seulement tu savais… Tu reviendrais… pas vrai… ?



:copyright:️ MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Jeu 19 Mar - 18:23
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Naomi ✻ when stars are away
« Quand j’étais petit, j’avais cette boîte. A trois reprises, sur trois notes, elle déraillait légèrement. Mais pour cette raison, je m’y étais attaché encore plus. Comme un imbécile, je me disais que si j’aimais assez fort cet objet cassé, ça prouverait qu’il avait encore le droit d’être aimé et apprécié pour la jolie musique qu’il savait faire. Je trouvais ça trop triste de la jeter et pourtant, je ne pouvais pas l’écouter autant que je le voulais parce que j’avais peur qu’on me la prenne. Je me disais, elle est imparfaite, comme moi, et pourtant elle fonctionne encore, elle peut encore offrir des choses et si elle n’a plus personne pour l’écouter, elle finira par ne plus jamais marcher.
Je pense que j’étais un peu pareil au début, cassé par endroit mais avec ce petit truc, cette envie de marcher malgré tout, de respirer un peu…, d’essayer….
Mais quand mon père a cassé ma boîte à musique sous mes yeux, j’ai compris ce jour là que, moi aussi un jour, malgré tous les efforts que je ferai, j’arrêterai de marcher. »
Août 2016
Avec un regard vide, il avait étudié sans réellement y prêter attention l'écran qui indiquait les vols de départ. Il n'avait pas fait comme les autres voyageurs, il n'avait pas non plus fait comme le Naoki d'un autre temps qui regardait cet écran et choisissait sa prochaine expérience de vie sur une envie subite... le pays qu'il voulait visiter cette fois et d'une manière différente pour tenter de combler des années de vide en ayant conscience d'en être incapable.
Non, son regard à lui, il n'avait même pas regardé le nom des villes, il s'était porté directement sur les heures. Il n'avait pas choisi un pays, il avait choisi une heure qui lui permettait d'avoir le temps d'acheter un billet puis de se faire enregistrer. La destination n'avait aucune importance. Tout ce qui comptait ce soir, c'était de partir le plus vite possible.
Avait-il si peur que son père le retrouve avant qu'il ne puisse décoller ? C'était impossible... même s'il avait probablement entendu dans la soirée que son fils était à Tokyo, il ne le retrouverait pas si vite. En fait, son départ aurait même pu attendre le lendemain... dans le fond, il le savait. Mais il savait aussi qu'une heure de plus... même quelques minutes... juste un instant pourrait faire basculer sa résolution comme la dernière fois où il s'était retrouvé dans cet aéroport avec la même idée en tête... Partir

Cette nuit, il ne pouvait pas courir le risque de faire demi-tour. Il n'avait pas le droit de laisser du temps à son coeur pour diriger ses pas vers la sortie... puis vers un taxi... et enfin dans leur appartement à Odaiba où il rentrerait, avec un peu de chance, avant le retour de Mikio... avant qu'il ne se rende compte qu'il était parti sans même lui dire au revoir... en mentant.
Il n'avait pas eu le choix, c'est vrai. Mais ce n'était pas cette excuse qui ferait taire la culpabilité. Mikio aurait toutes les raisons du monde de lui en vouloir. En fait, ce serait sans doute pour le mieux qu'il le fasse. S'il pouvait se mettre à le détester, ce serait plus simple d'oublier qu'un jour, il y avait eu un troisième colocataire. Un type qui se prétendait italien... et ce n'était que l'un de ses nombreux mensonges.
Il ne voulait pas que Mikio souffre. Comme la dernière fois où il se trouvait ici, il voulait partir en s'imaginant un coréen, un vrai, souriant... se mettre en chemin pour une vie où il trouverait le bonheur qu'il méritait tellement. Cette image, il devait la garder autant qu'il ne devait pas trop y penser pour le moment. Il ne pouvait pas laisser une seule chance à son coeur de décrédibiliser ce qui lui permettrait de partir.

Il n'avait pas le choix. Il n'avait vraiment pas le choix. Il se l'était répété en se dirigeant vers le guichet pour acheter son billet d'avion... un aller simple.
S'il restait... il détruirait cette personne qui avait tellement compté pour lui... la seule à avoir été capable de prendre autant de place dans ce coeur qu'il avait eu le miracle de faire battre.
Son coeur... cette chose dans sa poitrine qui lui donnait à présent l'impression de se déchirer à chaque pas qui l'éloignait de Mikio.
ça ira mieux dans l'avion
C'était ce qu'il avait pensé à son attention en posant une main dessus... mais il savait que ce n'était qu'un mensonge.
A compter d'aujourd'hui, il souffrirait comme jamais il n'avait souffert avant. A chaque seconde loin de Mikio, son coeur battrait d'une manière douloureuse pour s'abîmer de plus en plus. Ce coeur que son coréen lui avait donné, il finirait probablement en miettes... ce serait pire qu'un coeur qui n'avait jamais marché... mais il ne pouvait pas regretter d'avoir fait la rencontre de quelqu'un comme Park Mikio. Non, s'il le regrettait, ce n'était que pour ce dernier. Lui, il était toujours le chanceux qui avait appris à aimer... qui aimait encore aujourd'hui... plus qu'il ne le ferait jamais...

« Bonsoir. Un aller-simple pour Dublin sur le prochain vol s'il vous plait.» il n'avait pas prononcé un mot de plus, il avait fait glisser le passeport de ce Kobayashi Akira sur le comptoir, ce nom qu'il utiliserait désormais...
« Nao… » il ne l'entendait pas vraiment... il ne l'entendrait plus... « Naoki… » ... plus jamais... son prénom... de la voix de Mikio... ce ne serait plus que là... quelque part dans les battements douloureux d'un coeur qui essaierait de se souvenir, toujours... de la voix de celui qu'il aimait.
Se mordant la lèvre pour contenir ce regard qui s'était embrumé, il l'avait détourné pour se perdre sans but précis pendant que l'homme en face de lui préparait son billet. Nerveux, ses doigts s'étaient mis à triturer la poignée de sa valise. Plus fermement quand ses yeux s'étaient détournés dans la direction d'où il venait.
Non. Il ne pouvait pas faire demi-tour. Pas cette fois. Il n'en n'avait pas le droit. Ça irait... même si ça n'irait pas. Depuis le début, il l'avait toujours su que ce jour viendrait.
« Je t'aime yeobu… »
Fermement, sa main s'était serrée sur la poignée. Avec force, il avait fermé les yeux tandis que son coeur lui donnait un coup plus douloureux que les autres.
Le premier vol... ce n'était pas encore assez tôt.

Il n'avait même pas pris la peine de regarder le billet qu'on lui avait tendu. Il l'avait récupéré avec son passeport, avait remercié l'employé qui lui avait conseillé de se dépêcher étant donné l'heure proche de départ, puis il s'était dirigé vers l'enregistrement des bagages en forçant ses pieds à faire un pas après l'autre.
Il ne s'était pas montré moins angoissé une fois devant cette première formalité.
Ce n'était pas son père... c'était quitter Mikio... cette douleur qu'il ressentait à présent n'avait rien à voir avec la peur d'être rattrapé avant d'avoir pu prendre la fuite.
Il avait peur. C'est vrai. Mais il avait peur de se comporter comme un idiot et de rebrousser chemin. Il avait peur de n'être qu'un faible qui rentrerait et attendrait avec impatience le retour de Mikio, s'il n'était pas déjà là, pour le serrer dans ses bras, lui demander pardon... lui demander de l'aimer... toujours...
Un "toujours" bien éphémère s'il restait...
Et il avait peur de quitter Mikio. Il n'avait pas le choix... il pouvait se répéter ses mots sans fin... cette crainte... cette souffrance... elles ne se taieraient jamais.
Aujourd'hui, sans Mikio, il était encore moins que ce rien qu'il était hier... avant de le rencontrer.

Les contrôles. Passer les contrôles, il l'avait fait la première fois aussi.
« Nao… »
Il le ferait encore cette nuit.
Dans cet avion, il allait y monter.
Ce qu'il allait faire à Dublin, il n'en n'avait aucune idée. Mais ce n'était pas important. Il n'y réfléchissait même pas. Trouver un hôtel en arrivant, ce serait déjà bien.
« Nao… »
Pas maintenant. Ces appels ne pouvaient pas tourner en boucle maintenant dans ses pensées.
Il allait y arriver. Il le devait.
Qu'est-ce qu'il faisait au juste ?
Est-ce qu'il en voulait de cette vie sans Mikio ?
Non... mais de la vie, il n'en n'avait jamais vraiment voulu... il n'avait appris qu'à l'apprécier aux côtés de son coréen.

De l'autre côté des portiques, il avait récupéré ses affaires dans le bac en plastique et replacé sa guitare sur son dos. Son regard s'était levé pour repérer les panneaux et il avait pris la direction de cette dernière étape qu'il n'avait pas été capable de passer des mois plus tôt.
Il n'y aurait pas beaucoup à attendre. Pas assez de temps pour hésiter. Changer d'avis.
... rentrer... ce ne serait que quelques heures d'un bonheur égoïste... quelques jours...
... pourtant, Mikio était capable de rendre une seconde magique.
C'était le dernier appel pour son vol qui l'avait ramené à la réalité. Ce n'était que là qu'il avait pris conscience que ses jambes avaient arrêté de le porter vers cette étape infranchissable. Figé dans le hall d'embarquement, il avait secoué la tête pour revenir à lui.
Il le devait. Maintenant. Monter dans cet avion.
Il n'aurait jamais pensé que de simples pas puissent être à ce point douloureux, et pourtant, il y connaissait quelque chose à la douleur.
A chacun d'entre eux, son coeur avait protesté. Lorsqu'il avait tendu son passeport et son billet à l'hôtesse, il avait craint de ne plus être capable de tenir debout. Son souffle s'était coupé et sa poitrine lui avait fait si mal qu'il avait dû serrer sa main sur sa chemise pour ordonner à son coeur de se taire.
D'un hochement de tête, il avait répondu au "vous allez bien ?" de l'hôtesse et avait récupéré ses effets.

Plus que quelques pas
Une inspiration, une expiration et il s'était forcé à dépasser ce point qu'il n'avait pas su dépasser la dernière fois.
Ses pensées s'étaient faites plus violentes. A chaque pas, il s'était ordonné d'en faire un autre jusqu'à se trouver devant l'hôtesse qui l'avait guidé vers sa place. Ses affaires rangées, il s'était assis sur son siège. Avec des mains tremblantes, il avait tiré ses téléphones de sa poche. Le premier déjà éteint avait été abandonné dans son sac.
Le second... celui des gens qui comptaient pour lui... celui de Mikio... son index était resté en l'air, au dessus du bouton, incapable de bouger pendant plusieurs secondes. Son regard s'était perdu sur le fond d'écran... sur la photo de son Michan... et son coeur avait soufflé un "je t'aime à sa place. Et puis, il avait appuyé, enfin... avant de faire une connerie de plus. Le visage de Mikio avait disparu, l'écran était devenu noir... autant sans doute que ce coeur qui criait ce sentiment d'injustice. S'il ne voulait pas prendre soin de lui... pourquoi ne pas l'avoir laissé à la seule personne capable de le faire ?
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
« loading. »
Août 2016
Cette porte sur laquelle son regard était figé à présent, il ne la voyait pas vraiment. Comme un automate, il avait suivi l'employé de l'hôtel à l'intérieur. Sans être véritablement présent, il n'avait pas prêté attention au discours habituel que lui servait l'homme. Il avait pourtant le droit à la version mielleuse mais, pour y couper court, sa main avait fouillé un instant dans sa veste et il lui avait tendu un pourboire plus que généreux avant de le remercier. Un simple mot pour lui faire comprendre qu'il n’avait pas besoin de tant de paroles.
D'une main, il avait repoussé la porte derrière lui après avoir accroché sur la poignée l'écriteau indiquant qu'il ne voulait pas être dérangé.
C'était la seule étape qu'il connaissait. Le voyage en lui-même. Partir, se trouver un hôtel et puis... ?
Il n'avait aucun projet en dehors de celui de prendre la fuite. Dublin. Il ne savait pas ce qu'il y ferait. Pas grand chose. Ce serait la première réponse qui viendrait dans ses pensées.
Contre la porte, sa main s'était appuyée un peu plus, rejointe par son front. Quelques secondes, ses yeux s'étaient fermés. Il y était arrivé. Il était parti. Est-ce qu'il était supposé se féliciter pour ça ?

Dans l'avion, avant qu'il ne décolle, il avait dû retenir ses jambes. Il s'était vu se lever, descendre précipitamment en y abandonnant tout et retrouver Mikio. Mais il n'avait pas bougé et son coeur avait continué ses harcèlements incessants dans sa poitrine.
A l'escale, ça avait été plus facile. Comme un robot, il avait changé d'avion. Il était incapable de se revoir monter dedans, s'installer, il ne se souvenait même pas du voyage. Il était déjà trop loin de lui à ce moment... son coeur ne supportait déjà plus la distance avec le seul propriétaire qu'il désirait.
Et puis, il était descendu, il avait récupéré ses affaires et avait suivi le premier chauffeur de taxi qui l'avait abordé. Pas une fois, malgré ce regard fixé sur la fenêtre, il n'avait accordé d'importance au paysage. Il avait continué dans sa lancée des "choses à accomplir" et avait réservé cette suite pour une durée indéterminée... ou plutôt, Akira l'avait fait. C'est vrai... il n'était plus Naoki désormais. Il en avait été tellement au cours de ses mensonges qu'il ne savait même plus trop quel "italien" était vrai... mais la veille, quand l'avion avait décollé, Naoki était mort. Il ne reviendrait plus. Cette vie était terminée. Celle d'Akira ne serait probablement pas plus brillante... elle passerait probablement trop vite du point de vue d'un autre... pour son coeur, elle durerait un siècle... une éternité.

C'était terminé maintenant.
Se retournant, son regard s'était posé sur une fenêtre et son dos avait rencontré la porte. Il faisait nuit... à Tokyo... c'était l'après-midi.
Mais quelle importance l'heure qu'il était là-bas... il n'y mettrait plus jamais les pieds, non ?
Laissant son dos glisser contre la porte, il s'était assis contre cette dernière.
Est-ce qu'il avait pleuré une fois pendant ce voyage ? Il n'en n'était pas sûr... son coeur l'avait fait. Et maintenant, il ne prêtait pas vraiment attention aux larmes qui coulaient en abondance sur ses joues. Une main serrée contre son coeur, il avait tenté inutilement de calmer cette douleur atroce.
Alors c'est terminé ? Je ne le reverrai plus jamais ?
Non. Son coeur ne supplierait plus... il finirait par comprendre que Mikio n'était plus à présent que le souvenir d'un rêve trop parfait. Et pour lui faire payer, il décidait de se venger en rendant la souffrance insupportable.
C'était ok. Il l'avait mérité après tout... il l'avait cherché.... Il l'avait compris avant ce soir qu'il n'y survivrait pas.

Ramenant ses jambes contre lui, il les avait emprisonnées de ses bras avec la force qu'il lui restait. Là, dans cette cachette qu'un enfant s'était souvent choisi pour pleurer quand personne ne le voyait, il s'était laissé aller, longuement, incapable de céder à la fatigue même s'il n'avait pas fermé les yeux du vol.
Il ne pouvait pas se lever maintenant. Il n'en n'avait pas la force... il n'en n'avait pas non plus l'envie. Alors les minutes s'étaient rapidement transformées en heures. Et malgré la position inconfortable, il n'avait plus bougé. Il n'y avait rien à attendre... il n'y avait rien à faire non plus...
Souhaiter que son esprit se vide était naïf. Son coeur venait lui rappeler trop souvent, à chaque seconde, un visage qu'il n'avait pas la force de chasser... ça allait... avoir mal... si en récompense, il n'oubliait jamais le moindre trait d'un visage qu'il avait tant aimé regarder ou dessiner du bout des doigts.

Le jour avait fini par le déranger et sa tête avait enfin quitté sa cachette pour plisser les yeux face à cette clarté.
A quelle heure est-ce qu'il était arrivé ici hier ? Peu avant minuit, mais il n'en gardait aucun souvenir.
Lève-toi maintenant.
Le corps endolori par cette position qu'il avait gardée trop longtemps, il était parvenu à se redresser dans une grimace avant de reposer son dos contre la porte un moment. Sans énergie, il avait tiré ses affaires jusque dans la chambre pour ouvrir sa valise et en sortir sa trousse de toilettes et un boxer. Et puis, il s'était traîné jusqu'à la salle de bain où il avait pris une douche. Avec des gestes sans âme, sans véritable conscience, il avait accompli cette routine et était ressorti de la salle de bain, les cheveux humides, l'esprit pas mieux réveillé.
Il devait dormir. Au moins un peu. Il verrait ensuite.

Sans remettre en question ce choix, il avait ouvert le bar pour en tirer la première bouteille qui lui était tombée sous la main. De la vodka, probablement, il n'avait même pas prêté attention au goût quand il en avait bu plusieurs gorgées pour faire passer les somnifères.
La plaquette de médicaments en main, la bouteille remise à sa place, il avait poussé ses jambes jusqu'à la chambre, ramassant au passage son sac avant de se laisser tomber sur le lit. Sa tablette, ses écouteurs, son "Mimi l'ourson", et le t-shirt volé à Mikio avant de partir, c'était tout ce qu'il avait sorti avant de repousser le sac de l'autre côté du lit.
Gêné par la clarté, sa main s'était tendue ensuite en quête de la télécommande et il avait baissé les stores pour plonger la chambre dans la pénombre. Plaçant ensuite ses écouteurs dans ses oreilles, il avait allumé sa tablette et s'était empressé de se déconnecter de skype avant qu'on ne l'y voit connecté... avant de voir si Mikio l'était de son côté... il ne devait pas.
Rapidement, son doigt avait sélectionné le dossier intitulé "Michan" et il avait mis la première vidéo du dossier. Son coeur s'était enflammé de souffrance dans sa poitrine, sa main libre avait tenté de le calmer un instant avant de relever le t-shirt de son coréen jusqu'à son nez... ça faisait encore plus mal... oui... mais il ne pouvait pas s'en empêcher....

Alors, malgré les larmes qui étaient revenus, il avait cherché un peu plus à sentir cette odeur qui lui manquait déjà.
Elle ne resterait pas. Et cette pensée avait laissé passer de nouvelles larmes qu'il avait vainement essuyées d'une main.
Il l'oublierait.
Un jour.
Non ?
Bientôt, il n'aurait plus qu'une marque de parfum pour tricher... est-ce qu'il tiendrait jusque-là ?
La réponse à cette question, il ne s'en souciait pas... quand celle du temps que ça prendrait à ce t-shirt pour perdre cette odeur de laquelle il avait le sentiment de ne pas s'être assez enivré, elle l'obsédait.

Ça faisait mal.
C'était curieux pour lui, de se dire que ça n'avait jamais fait aussi mal... il était pourtant habitué à la souffrance.
Mais aujourd'hui, c'était différent. Aujourd'hui, tandis qu'il sentait les cachets faire son effet, alors que son esprit s'embrumait malgré cette douleur, il avait pensé qu'il aurait peut-être dû en prendre plus.
Ce serait bien... maintenant... que mes yeux ne s'ouvrent plus jamais
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

Août 2016
Dans la pénombre, sa main avait tâtonné sur le chevet près de lui en quête de sa montre sur laquelle elle avait fini par se resserrer. Après avoir allumé la lampe, il avait glissé l'objet devant ses yeux malgré la lumière dérangeante pour pouvoir y lire l'heure. Ça faisait combien de temps au juste qu'il restait dans le noir ?
... pour répondre à sa question, il faudrait d'abord s'en poser une première. Quel jour on était ?
Il n'en n'avait aucune idée. Il ne s'en souciait pas vraiment.
Mais maintenant, il savait au moins l'heure. 06h07... il était 22 heures ici. Considérant un instant la molette pour changer l'heure, son doigt n'y avait finalement pas touché et il avait reposé l'objet sur le meuble avant d'étudier un plafond qu'il pouvait enfin distinguer.

Se lever. Oui. Il allait le faire. Plus tard. Il ne se sentait pas encore la force d'affronter cette nouvelle vie qui n'aurait rien de vivant. Alors sa main s'était tendue et avait éteint une nouvelle fois la lumière. Il était resté de longues minutes à fixer le plafond qu'il ne voyait plus à nouveau. Sans y réfléchir, sa main s'était reposée sur son coeur et y était restée un moment comme pour soulager ce vide qui l'étouffait depuis qu'il était parti.
Vide. Il l'était tout autant. Il se reprendrait, il le savait. Il n'en doutait pas. Pas plus qu'il ne doutait du fait que ça ne durerait qu'un temps. Mais faire semblant à nouveau, il ne savait pas s'il était prêt pour ça aujourd'hui.
Fouillant le lit, il avait mis la main sur sa tablette et avait appuyé à plusieurs reprises pour allumer l'écran, sans succès. Ce n'est qu'à la troisième tentative qu'il s'était souvenu que la batterie était à plat. D'un soupir, son regard avait considéré la pénombre et identifié la forme de la commode où se trouvait son chargeur.

Il avait pensé écouter une nouvelle fois Mikio chanter... il aimait sa voix.... Se torturer un peu plus ne lui posait pas de problème s'il pouvait entendre son coréen chanter. Ça... il l'aurait toujours alors que son odeur, il ne la trouvait déjà plus dans ce t-shirt qu'il s'obstinait pourtant à garder avec lui dans ce lit, tout comme ce nounours qu'il lui avait offert quand il se trouvait malade
Partagé quelques secondes entre ses options, il avait fini par rejeter la couverture. Il voulait prendre une douche de toute manière... c'était l'une des seules choses qui l'avait tiré du lit dernièrement. Ça, les cachets... et les choses qui lui faisaient penser à Mikio... comme s'il en avait besoin... il ne l'oublierait jamais....
A peine assis dans le lit, ses pieds s'étaient posés sur le sol pour se relever... et se rasseoir aussitôt. Trop rapide. Sa main s'était portée à son front le temps que le vertige lui passe.
Depuis combien de temps exactement il n'avait rien avalé ?
Il n'en n'avait aucune idée non plus. Il ne se souvenait plus de son dernier repas.
Manger quelque chose. Il faudrait probablement l'ajouter à la liste.

Plus doucement, il s'était relevé pour se traîner jusqu'au meuble sur lequel il avait reposé sa tablette à charger. Au salon, il s'était arrêté pour appeler le room service. Des fruits ou des yaourts... ce qu'ils avaient, peu lui importait... quelque chose de léger.
C'était à peu près de cette manière qu'il avait commandé avant de s'apprêter à raccrocher. La voix au bout du fil l'avait retenu quelques secondes de plus, la sienne n'avait formulé que quelques mots d'accord, la consigne de laisser la nourriture dans le salon, avant de reposer le combiné. C'est vrai, il avait laissé cet écriteau à la porte, la femme de ménage n'était pas venue depuis qu'il était arrivé ici.
Combien de temps ?
Cette question, il ne pouvait toujours pas y répondre autrement que par "quelques jours"... il l'imaginait en tout cas.

Le temps, il l'avait perdu autant sous cette douche. Quand il était ressorti de la salle de bain, son regard s'était posé sur la table du salon et les aliments arrivés dessus pendant qu'il se lavait.
S'il retournait dans sa chambre maintenant, il ne mangerait rien. Alors malgré ce soupir et le manque de courage, il avait allumé une lampe du salon et s'était installé face à l'épreuve imposée. Est-ce que Mikio l'avait harcelé pour manger quand ça n'allait pas pour qu'il se montre aussi peu raisonnable une fois qu'il se retrouverait seul ?
Hum... il n'aurait pas été ravi de ses progrès éphémères en la matière....
Même si pour lui, se forcer à avaler un fruit et un yaourt était un réel effort. Il y avait mis un temps ridicule pour d'autres mais il était parvenu à vaincre ce devoir imposé.

Sans considérer le téléviseur et cette option, il avait repris ensuite la direction de la chambre. Ramenant sa tablette avec lui dans le lit, il avait déposé le chargeur sur le chevet avant de rallumer l'écran.
Il était trop tard pour faire quelque chose maintenant. Alors il avait pensé qu'il pourrait voir demain. Oui... il se forcerait à faire un peu semblant... quand le jour se lèverait enfin, il se pencherait peut-être sur le cas d'Akira. Qu'est-ce qu'il avait envie de faire de sa vie ?
Il n'en savait rien. Pour lui, Kobayashi Akira était un étranger. Un inconnu qu'il devait construire parce que c'était comme ça que les choses étaient supposées se faire. Il n'était pas obligé d'en avoir envie. Il le devait, c'était tout.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
« Je t'ai menti sur plein de choses.... Mais il y a des trucs que tu sais sur moi qui sont vrais, certains que j'ai même découvert avec toi.
J'aime vraiment les yaourts. Je sais, c'est con quand on a été habitué à manger de la grande cuisine. Mais j'adore vraiment ça. Surtout les yaourts à boire. En fait, j'aime les laitages en général. C'est vrai... j'ai une préférence pour les trucs un peu enfantins. Je pourrais manger que ça... avec les fruits bien sûr. Surtout la fraise, la framboise ne vient qu'en second. En trois c'est plus difficile, peut-être la pêche.
Le bleu. Le bleu c'est la couleur que je préfère. Je ne sais ni voler, ni nager, et pourtant mon coeur penche vers le bleu. C'est encore plus étrange quand on sait ce qu'il représente, entre autres, le rêve et la vérité... je ne sais pas faire le premier et je suis tout l'inverse du second.
Quoi d'autre ? L'Italie bien sûr... ce n'est pas pour rien que je passe mon temps à me prétendre italien. Ceci dit, j'aime beaucoup la Corée. Je l'aimais déjà beaucoup avant toi et que notre troisième colocataire soit un coréen, j'étais ravi. Le coréen est une langue que j'aime réellement... encore plus quand elle est parlée par toi.
L'astronomie. La mythologie. La littérature... même si ce serait difficile de ne citer qu'un livre maintenant. En fait, tu sais, je suis vraiment un intello.... Je crois que je commençais à moins m'en cacher... j'ai dû me perdre une fois ou deux avec toi.
La musique. La photographie. Mes deux passions interdites bien que j'ai eu un violon pour cadeau quand j'étais enfant.

Mais si je ne devais dire qu'une seule chose... une chose que je trouve belle... celle que je préfère... rien qu'une... je tricherais et je parlerais de toi. On a le droit non ? ... de préférer une personne par dessus tout le reste.
Je commencerais sûrement par parler de ton sourire. Oui Michan, ton sourire, c'est vraiment le plus beau que je connaisse. Quand tes lèvres font ce truc que je me force souvent à faire... mon coeur a cette curieuse réponse.
Et puis je parlerais de tes mains.
Ton odeur.
Ta voix.
Ton rire.
Tes yeux. On avait beau plaisanter dessus parfois avec Kô, au début en tout cas... ton regard... je n'en connais pas de plus beau non plus. Je pourrais m'y perdre des heures tu sais. Même si j'ai déjà eu trop honte de relever les yeux vers toi, j'aimerais avoir le droit de ne plus le quitter. Tu sais, je pense vraiment que t'es un envoûteur. Un magicien au moins. Et même si de trop nombreuses fois, tu as fait lutter mes talents de menteur, tu m'as fait perdre le contrôle, je ne t'en veux pas.

J'imagine que je devrais parler plus longuement de tes bras aussi. Et de tes mains. Ta tendresse. Oui, elle aussi, c'est celle que je préfère. C'est bien l'italien qui dit ça... est-ce que tu serais surpris si je t'avouais qu'elles ne t'arrivent pas à la cheville ? Ces conquêtes que je voyais souvent. Ton affection, elle n'est même pas comparable à la leur. Pour avoir encore un peu de la tienne aujourd'hui, je donnerai tout. Tes mains, quand elles se posent sur moi, mon coeur adopte un rythme étrange, parfois trop rapide. Je serais incapable de compter le nombre de fois où j'ai souhaité que le temps s'arrête alors que tu me serrais dans tes bras. Je voudrais y être maintenant... quand je m'endormirais... à la fin... j'aimerais vraiment être capable de partir en imaginant que je resterais pour toujours à cette place où je me sens le mieux....
Oh... en plus de sourire, tes lèvres sont douées pour autre chose. Tes baisers. C'est les meilleurs aussi. Mais tes lèvres sur ma peau, sur les miennes... je serais bien incapable d'expliquer ce qu'elles me font. Que ce soit pour les battements de mon coeur... de ce coeur qui t'appartient... ou pour ce flou... tout se mélange dans ma tête... et sur le moment il n'y a que toi... ce que tu mets dedans... tu ne m'aimes pas autant que ça n'est-ce pas ? J'ai vraiment envie de t'imaginer heureux aujourd'hui tu sais.

Même si mon coeur souhaite retrouver toutes ces choses que j'aime chez toi... juste toi... entièrement. Même si je le sens se plaindre à chaque battement... même si tu me manques... même si je t'aime... j'ai vraiment envie que quelque part, ce Michan que j'aime tant, il soit en train de sourire. Parce que pour ça aussi je n'ai pas menti. Un jour, tu le seras vraiment, ce que tu mérites... le plus heureux des hommes. »
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

« Et puis, j'ai fait ce que je fais depuis 21 ans... essayer.
Essayer en sachant que je n'y arriverai jamais... à vivre. »

Le regard perdu à l'extérieur de la boutique, il avait regardé sans les regarder ces gens qui continuaient la routine de leur vie. Deux amis qui ne s'étaient pas vus depuis longtemps partager une conversation sur le bon vieux temps, rire à une plaisanterie vieille de dix ans qui ne les amusait plus qu'entre eux aujourd'hui. Une femme parler à son chien en le promenant, fièrement, parce qu'il était sans doute pour elle le plus parfait des animaux. Un enfant traîner sa mère par la main parce qu'elle devait absolument revenir en arrière pour voir ce qui avait intéressé son fils dans la vitrine d'une boutique précédente. Un homme se disputer avec son épouse au téléphone parce qu'il avait complétement oublié ce dîner auquel il n'avait de toute manière pas très envie d'aller ce soir.
Quand il était enfant, son regard semblait un peu plus vivant. Autrefois, il se serait perdu d'une manière différente... avec la curiosité de chercher à voir comment c'était ailleurs. Son imagination se serait mêlée à la partie et il aurait inventé une blague pas si amusante que ça à ses deux amis... parce que lui ne savait pas être drôle bien sûr. Le chien de cette femme aurait eu un prénom et même des pensées... oui, lui, il se serait dit qu'il avait la maîtresse la plus gentille de toute l'Irlande. L'enfant... quel jouet il avait vu dans cette vitrine ? Ce n'était peut-être qu'un gâteau gigantesque qui avait réveillé la faim pour un repas qu'il rêvait entièrement en sucre. L'homme... il aurait persuadé sa femme d'abandonner ce dîner, avant de la kidnapper pour en prendre un autre au bout du monde.

Aujourd'hui, il s'était contenté de voir l'évidence sans réellement y prêter attention. Moins curieux, Akira n'avait fait que laisser le temps se passer tandis qu'il se forçait à trouver sa propre routine. Il ne savait toujours pas la vie qu'il aurait mais au moins... il était sorti pour se permettre de la chercher.... D'une certaine manière.... C'est vrai, le sac qu'on lui avait tendu maintenant et pour lequel il avait payé en insérant sa carte de crédit dans le lecteur, il n'avait rien à voir avec ce japonais dont il ne connaissait pas grand chose maintenant.
Remerciant la vendeuse, il était sorti de la parfumerie et avait continué son chemin sur le même trottoir dans l'attente de croiser la prochaine boutique sur sa liste.
A plusieurs reprises, son regard s'était baissé vers le sac et son coeur avait battu de désespoir au souvenir d'une odeur qu'il ne sentirait plus jamais parfaitement. Seule sa mémoire serait désormais là pour tenter de s'en souvenir.... Asperger un t-shirt, un ours en peluche, du parfum de Mikio... ce n'était qu'une faible drogue pour continuer à se torturer quand jamais il ne pourrait faire taire le manque ailleurs que dans les bras de son coréen.
Et pourtant, une bouteille après l'autre, il continuerait à se torturer jusqu'à ce que dans sa tête, des mots prononcés plus résolument ne viennent proposer un silence, un vide agréable : "on arrête ?"

Et le jour où il arrêterait enfin, la personne qu'aurait été Akira n'aurait plus aucune importance. Il partirait en espérant retrouver les bras, le sourire... l'odeur... la voix... d'une personne qu'il n'avait jamais rencontrée. Il ne serait plus que ce Naoki en manque d'une personne qu'il n'aurait jamais dû connaitre... de choses que cette dernière n'aurait jamais dû lui offrir. Il l'espérait... pouvoir en retrouver un peu ce jour-là, lorsqu'il fermerait les yeux.
Mais maintenant, il devait persister pour une raison qu'il ne saisissait même pas. Essayer sans être jamais capable d'y arriver. Cet acharnement dont il avait fait preuve pendant plus de 20 ans, il avait de plus en plus de mal à le comprendre.
Et pourtant, Akira était rentré dans une nouvelle boutique et avait jeté un coup d'oeil rapide sur les téléphones jusqu'à ce qu'un vendeur ne vienne lui demander s'il pouvait le renseigner. ça ne lui avait pris que quelques secondes pour demander un téléphone et l'abonnement qui allait avec. Quelques minutes pour tout remplir puis payer. Et à la question s'il lui fallait autre chose, il avait bien évidemment répondu non.
Avec cette différence entre un Naoki et un Akira, il était sorti. Quelle utilité ferait-il d'un second téléphone de son côté ? Des gens importants, il n'en connaîtrait plus. Aujourd'hui, il n'aurait plus qu'un répertoire rempli de noms de vagues connaissances qui ne marqueraient en rien sa vie. C'était mieux comme ça. Il le savait, ça aurait toujours dû être comme ça. Il s'était perdu au cours de l'année passée....
Les choses seraient plus simples aujourd'hui... oui... il pouvait toujours se le répéter.

Il n'avait traîné qu'un peu plus avant de rentrer à l'hôtel. A la réception, il avait commandé du café et un "repas" léger avant de se diriger vers les ascenseurs pour remonter en direction de sa chambre. Une fois à l'intérieur de cette dernière, il avait posé ses achats sur la table du salon, déballé le parfum de son coréen pour en mettre sur l'ours en peluche qu'il avait aussitôt porté jusqu'à son visage.
Faible à ce point, oui... incapable d'attendre quelques minutes alors que cette odeur n'avait fait que serrer douloureusement son coeur... parce qu'il y manquait quelque chose... Mikio.
C'était mieux que rien. Il ne pouvait pas avoir plus, il se l'était répété et son nez avait cherché à s'enfouir plus certainement dans l'ours tandis qu'une main avait balayé rapidement sa joue pour en chasser les larmes. Ses yeux s'étaient fermés et pendant de longues secondes, il avait juste respiré ce parfum en tâchant d'imaginer le reste.
Ne pas trop le faire. Avancer. Il savait qu'il devait procéder ainsi... mais la vérité c'était qu'il était incapable de faire sans ces moments de torture. Et si quelques coups frappés à la porte ne l'avaient pas tiré de ce songe douloureux, il se serait perdu bien plus que quelques minutes.

Rouvrant les yeux, sa main s'était assurée rapidement que ses joues ne trahissent rien et un rapide détour par la salle de bain avait eu pour but d'ouvrir avec un visage neutre. Après une courte salutation, il s'était décalé pour laisser passer l'employé et son chariot. Une fois ce dernier dans le salon, l'homme était revenu à sa hauteur pour s'assurer qu'il n'avait besoin de rien d'autre « Si je peux me permettre Monsieur, cette nouvelle coupe de cheveux vous va à la perfection. » comme s'il avait oublié ce changement, sa main s'était relevée pour passer un instant dans ses cheveux avant d'afficher un sourire tout aussi faux que lui qui cadrait parfaitement avec l'ambiance. L'employé balançait sans aucun doute ça à tous les clients qui se rendaient chez le coiffeur. Ce n'était rien, il avait l'habitude de cette ambiance dirigée par les mensonges. Et il s'était prêté au jeu en lui tendant un pourboire avant de le regarder quitter la suite et refermer la porte derrière lui.
Il se doutait que blond n'était pas exactement une couleur affectionnée par un certain milieu près duquel l'employé semblait vouloir se trouver.
Son père aurait détesté. En fait, voir les cheveux de son fils maintenant l'aurait mis en colère, il le savait.
De son côté, il ne savait pas trop ce qu'il lui avait pris quand il s'était retrouvé face au moment de choisir chez le coiffeur. Changer, ce n'était pas si mal que ça. Akira commencerait en étant blond, c'était un début, mais pour le reste...
... son regard s'était posé tour à tour sur son appareil photo, puis sur sa guitare....
Avec quel objet tenterait-il de tenir un peu ?
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
« Tu sais, en fait, je suis bien plus à l'aise avec le mensonge. Les apparences, les sourires si bien mimés quand mais lèvres n'ont pourtant aucune envie de les former, les histoires pour faire de moi quelqu'un de pas trop mal... qui peut en tout cas vivre comme si de rien n'était, les plaisanteries pour couvrir le fait qu'à l'intérieur je n'ai plus envie de grand chose... à part ce que je ne peux pas avoir....
C'est mon monde tout ça. Mentir, je l'ai toujours fait et la vérité c'est que c'est beaucoup moins perturbant que sentir mon coeur me forcer à la sincérité à tes côtés.
J'aurais aimé être capable d'inventer une jolie histoire qui aurait pu me permettre de rester à tes côtés.
Oui, même si je sais qu'elle n'existe nul part... j'aurais voulu la trouver cette histoire pour que demain, ce soit sur ton visage que mes yeux s'ouvrent. »

« Ah ! Le retour du héros ! » reprenant place sur la partie de banc qu'il occupait plus tôt, le faux italien avait répondu d'un sourire à celui qui l'avait interpellé « Alors ? Cette visite d'appartement ? A la hauteur de tes attentes ? » et dans un autre sourire, il avait tiré son verre rempli depuis son départ pour en boire quelques gorgées « C'est quand même cool d'avoir des appartements au-dessus pour les employés. Mon patron, c'est tout juste s'il nous donnerait une niche. Je paie bien trop cher pour... » d'une tape sur sa tête, le dénommé Dominic avait fait taire son camarade pour enchaîner « On s'en fout de combien tu paies ! Nous on voulait entendre une histoire de cul ! » il n'avait pas pris la peine de souligner à l'un de ses nouveaux "amis" qu'un italien ne parlait jamais d'histoire de cul, il n'avait fait que secouer la tête tout en reposant son verre avant de jeter un coup d'oeil aux alentours de son nouveau QG « Hey le tombeur, t'as du rouge à lèvres dans le cou. » sa main libre s'était levée pour se porter à son cou et l'essuyer, sous les rires de ses camarades, il avait ensuite regardé ses doigts pour constater l'absence de couleur avant de secouer la tête. Puis, faisant mine que la maladresse n'était pas volontaire, il avait pris la parole pour la première fois depuis son retour « Combien de verres depuis mon départ ? » après un nouveau rire, de nouvelles gorgées, Derek, l'accusé avait répondu « Bah faut dire qu'on a eu le temps d'en descendre pas mal, on y croyait plus à ton retour ! » secouant la tête pour toute réponse, il avait laissé le temps à celui qui lui faisait face d'ajouter « Mais comme on n'est pas des chiens, on a pensé à remplir le tiens. » nouveau sourire, verre levé et il ajoutait « De vrais princes. »

Et puis, la conversation reprenait son cours là où ils l'avaient abandonnés tous les trois avant que leur nouveau camarade ne vienne l'interrompre en reprenant sa place. Il l'avait écouté, y avait même participé et s'était prêté volontiers au jeu de l'interrogatoire quand le sujet s'était intéressé à lui à nouveau. Non, il n'avait pas de petite amie. Oui, il trouvait ça plus simple parce que, comme il l'avait souligné « Je préfère bouger, j'ai jamais trop le temps de m'attacher aux gens. » c'est vrai, Akira changeait souvent de QG. Quelques semaines plus tôt, il traînait quelque part aux Etats-Unis et n'était même pas certain de rester bien longtemps à Dublin aujourd'hui. Il allait se poser quelques temps et il verrait bien si cette ville avait quelque chose d'intéressant à lui offrir. C'était en tout cas la version qu'il avait donné et que tous avaient validé comme vérité.
Et puis la jolie barmaid avait fait son retour et dans toute leur classe, ses "amis" avaient eu le comportent d'adolescents rien qu'à leurs regards. Evidemment, il n'y avait pas eu que ça et quand elle avait précisé que les verres étaient offerts par la maison, Derek, après un rire gras, avait coloré le visage de la femme avec un « Il était si bon que ça ? » sans noter plus que ça l'air fier que son ami abordait, Akira avait relevé les yeux vers l'irlandaise pour lui adresser un sourire et un plus calme « Merci Noreen. » et puis, d'une chaleureuse pression sur son épaule, la jolie barmaid avait pris congés pour laisser de nouvelles taquineries fuser à cette table.

Si le sujet était revenu par moment à ses exploits, il avait tourné dans d'autres domaines. Il ne les connaissait que depuis peu et Akira avait dû reparler brièvement de lui à quelques reprises. Ils avaient plaisanté, le dialogue n'avait jamais été bien sérieux sauf peut-être du côté d'Andrew qui s'était perdu un instant à vouloir jouer les guides et qu'un « On s'en fout bouffon. » avait ramené à l'ordre. Dom' avait été d'ailleurs le premier à quitter la table sous le motif que ses affaires l'attendaient et qu'un client s’impatientait de le voir venir pour faire de jolis rêves au pays des merveilles « Et puis, j'veux bien faire un peu de social en vous parlant mais je vends mieux la nuit ! D'ailleurs Derek, tu me dois toujours de la thune. Juste au cas où t'aurais oublié. » un léger malaise du mentionné avait accompagné son départ et puis la conversation s'était poursuivie un temps avant que le dernier nommé ne quitte à son tour la table. Les deux restants s'étaient alors séparés et Akira était sorti pour retrouver sa voiture non loin du bar après un signe de main et un dernier sourire à l'attention d'Andrew.
Mais ce sourire, dès qu'il était monté dans sa voiture, il s'était effacé. Et c'est sans en avoir un seul qu'il avait conduit jusqu'à l'hôtel qu'il occupait toujours. Le suivant n'avait été formé par ses lèvres qu'en saluant l'hôtesse à l'accueil et il avait tâché de le garder jusqu'à sa chambre. Mais quand la porte s'était refermée derrière lui, son visage avait perdu toute trace de bonheur. Vidé de toute émotion, il n'avait rien affiché de plus que ce qu'il était réellement.
Rien.

Sur du vide, il avait construit ce Kobayashi Akira qui faisait sa vie ici, à Dublin, pour un temps. Naoki n'existait plus, il l'avait laissé mourir en montant dans cet avion à Tokyo.
Tous les jours, il se forçait à sortir un peu Akira, à lui bâtir quelque chose pour simplement essayer sans en avoir réellement envie. Encore et toujours... il se forçait. Mais quand il était de retour dans cette chambre, quand il se retrouvait seul, il le redevenait... ce Naoki sans vie... si vide.... Et cette douleur dans sa poitrine, qui ne le quittait en réalité jamais, elle reprenait le contrôle pour guider chacun de ses gestes.
De sa poche, il avait tiré son téléphone pour l'éteindre avant de l'abandonner sur le meuble d'entrée. Puis il avait déboutonné sa chemise, le regard perdu dans un endroit qu'il ne savait pas quitter même pour donner les moyens à Akira de démarrer mieux quelque chose, d'exister plus longtemps. Soigneusement, il avait replié ses affaires avant de prendre une douche pendant de longues minutes. Vêtu d'un boxer, il s'était dirigé vers le frigo et en avait considéré un instant le contenu sans réellement le regarder.

Qu'est-ce que Mikio faisait maintenant ?
Cette question, il avait conscience de la laisser venir à de trop nombreuses reprises dans ses pensées.
Appuyé contre la porte, ses doigts étaient venus jouer avec la gourmette à son poignet pour la faire tourner autour de celui-ci. Laissant le froid du frigo agresser un moment sa peau nue, il s'était perdu trop longuement et ses yeux s'étaient fermés pour mieux visualiser un visage qu'il ne reverrait jamais. Il s'était concentré pour le faire sourire et il s'était perdu plus encore en essayant d'entendre son rire. Il n'en n'entendrait jamais plus d'aussi beau. Il le savait. Mais qui sur Terre pouvait prétendre avoir un rire plus beau que celui de Park Mikio ?
Personne.
Par habitude, sa main était remontée sur ses joues pour essuyer les larmes dont il devinait la présence. Et puis, ses yeux s'étaient rouvert et il n'avait pas trouvé la force suffisante pour permettre à sa main de se tendre et de faire un choix. Il n'avait pas trop bu, ce n'était pas important, et il avait préféré à un quelconque laitage un somnifère accompagné de quelques gorgées du premier alcool sur lequel sa main était tombée dans le mini bar.

Puis, ses pas l'avaient dirigé jusque dans sa chambre où il avait remis un peu de parfum à son ours en peluche avant de se laisser tomber sur le lit, le nez enfoui dans son ourson. Fort, il l'avait serré contre lui de longues minutes à essayer de trouver un peu de ce qui lui manquait, de ce qu'il n'aurait plus jamais.
Combien de temps est-ce qu'il était supposé faire semblant ?
Encore un peu... juste encore un peu....
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
« Dans le fond, ça a toujours été plus simple pour moi d'être seul que d'être entouré de gens auxquels je tiens. Ces derniers mois, tout était devenu trop compliqué. J'aurais dû réagir avant, je ne sais pas comment j'ai fait pour me laisser couler autant. C'était peut-être juste trop agréable.
Pourtant, je n'ai pas oublié. Je sais ce que je mérite et ce que je ne mérite pas. Cette leçon de savoir qu'il y a un prix pour être proche de moi, je l'ai retenu aussi.
Oui, être seul, c'est le mieux pour moi, et pour les autres. Maintenant, ce noir que je souhaite si fort... j'aimerais simplement qu'il soit éclairé un peu par toi quand je m'accorderai enfin d'y aller. »


Au dessus du clavier, ses doigts s'étaient arrêtés une nouvelle fois et un soupir lui avait échappé. Ce courriel, est-ce qu'il y avait une bonne manière de le tourner de toute manière ? Sans doute que non. Ce n'était que quelques mots pour dire qu'il allait bien, quelques mots pour un mensonge rassurant, quelques mots qu'il se devait d'écrire à présent et qu'il avait pourtant mis tant de temps à taper sur son clavier.
Ce n'était pas la première fois qu'il essayait. Depuis quelques jours, c'était même l'un de ses objectifs quand il démarrait sa journée. Et pourtant, dans les brouillons de sa messagerie, il y avait toujours ce "1", ce mot qu'il n'arrivait pas à écrire et qui semblait être condamné à ne jamais s'envoyer.
Levant les yeux vers l'horloge du café dans lequel il se trouvait, il avait étudié ses chances d'y arriver avant son prochain cours quand son téléphone avait troublé ses estimations.




Dom'
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Yo playboy ! Toujours dans ton délire d'étudiant ? On bouge ce soir ? Andy voulait aller à cette soirée minable, l'anniversaire d'un ami ou j'sais plus trop mais j'ai de meilleurs plans. Comme toujours, Dom vous sauve de l'ennui ! D'ailleurs, si t'as réfléchi un peu à ma proposition, j'ai exactement ce qu'il te faut ! Tu seras pas déçu du voyage avec moi. Allez, à plus tard !  


Du bout des doigts, il avait repoussé son téléphone sans répondre à ce message pourtant beaucoup plus simple à écrire. Evidemment qu'ils sortaient ce soir. Ils l'avaient déjà fait la veille mais pas le jour d'avant parce qu'il avait préféré s'éclipser dans un autre pays. Mais ce soir, s'amuser, fêter la jeunesse, faire les cons, Akira était toujours de la partie quand ça rimait avec soirée. Et est-ce qu'Akira le serait pour ce truc en plus ?
...
De drogue, il n'en n'avait pas déjà assez dans sa vie ?
Faisant tourner sa gourmette autour de son poignet, ses pensées étaient passées à d'autres problèmes, à ce courriel dont il avait relu les premiers mots.




Unknow
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Salut ! Je ne sais pas si tu te souviens de moi, on avait l'habitude de se retrouver au royaume de Ronald tous les deux ! Tu sais, le grand, cet idiot que t'as fait la connerie de définir comme ton meilleur ami ?  


Est-ce qu'il voulait vraiment commencer sur une note d'humour ? Rester dans son éternel foutage de gueule ?
...
Peut-être pas. Il n'en savait rien. Mais c'était mieux de dédramatiser les choses non ? Lui dire qu'il allait bien, qu'elle n'avait pas à s'inquiéter... elle ne s'inquiétait pas hein ? Keira avait déjà mieux à faire que se soucier d'un idiot qui partait sans même laisser un mot.
Si elle se doutait peut-être des raisons, quelque part, il le savait, ce n'était pas une excuse pour partir comme ça sans prévenir.
Dans un soupir, son doigt avait glissé vers la touche "delete" et il avait effacé chaque mot jusqu'à ce "salut".
Ce n'était pas si compliqué que ça. C'était Keira.

Nouveau soupir... des doigts qui glissent sur des touches sans s'y appuyer et il s'était repris. Tout ce qu'il avait à faire, c'était la prévenir, lui dire qu'il allait bien... et voir ce qu'il voudrait lui dire d'autre sur le moment. Peut-être que cette fois, il n'y avait pas besoin de tant y réfléchir...




Unknow
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Salut Keira,

Je suis désolé, j'ai dû partir. Je n'ai pas eu le temps de te voir avant. Je sais, j'aurais quand même dû trouver un moyen de t'écrire ce mail plus tôt. T'as le droit de m'en vouloir. Je n'ai pas vraiment d'excuses et je comprendrais si je ne recevais aucune réponse de ta part. Mais si jamais un jour tu décidais d'envoyer des nouvelles à cet imbécile de meilleur ami que t'as fait la bêtise de te choisir, tu peux le faire sur cette adresse.
Je vais bien.
 

... "bien"... oui, c'était pas trop mal ça... mais ça manquait sans doute de quelque chose, même par écrit... relevant les yeux une fois de plus vers l'horloge, il avait cherché quelques secondes avant d'ajouter la suite.




Unknow
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
J'ai décidé de faire un peu tout et rien pendant quelques temps. Je reviens d'Autriche, je te mets quelques photos en pièces jointes pour Tôta et pour toi si tu veux voir. Tu lui passeras le bonjour ?
 

Ouvrant le bon dossier, il avait fait glisser quelques photos dans le mail puis, à nouveau, ses doigts étaient restés un instant au dessus des touches. Il avait envie de lui dire plus, mais en même temps, il ne savait pas trop quoi.
Laisser ce courriel dans ses brouillons et y revenir plus tard ?
... il avait déjà laissé passer assez de jours comme ça.
Et puis, ce qu'il aurait voulu lui dire maintenant, ce qu'il avait sur le coeur, ses mercis pour avoir eu une amie comme elle... il pourrait lui faire de la peine ou l'inquiéter. Alors ses doigts n'avaient pas été si fidèles que ça à ce qu'il aurait voulu lui écrire et ils avaient continué sans trop en dire.




Unknow
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Prenez soin de vous.
 
Il n'avait pas ajouté ce prénom dont il ne se servait plus. Il ne s'était pas relu. Il n'avait pas plus hésité et avant de le faire, il avait cliqué sur "envoyer". Son regard s'était posé sur ce "1" jusqu'à ce qu'il disparaisse de l'écran et puis il avait fermé son ordinateur qu'il avait rangé dans son sac.
Sa main s'était tendue vers sa tasse de café qu'il avait terminé, puis elle s'était emparée de son appareil photo après avoir déposé de l'argent sur la table.
Son sac sur les épaules, il était sorti dans les rues et ses pas l'avaient mené jusqu'à son école. Sur la route, il ne s'était arrêté que deux fois, pour deux photos dont il ne ferait pas une bonne critique.
Il ne savait toujours pas pourquoi il s'obstinait. Cette école, ce n'était que le moyen de continuer à prétendre, mentir pour mieux tenir, comme toujours. Mais est-ce qu'il avait vraiment envie de continuer à le prendre en photo ce monde ?

:copyright: MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Jeu 26 Mar - 12:46
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Gilbert & Jesus ✻ the end of Mimidonna
“Merci d’avoir fait partie de ma vie ”

« Tu rentres bientôt ? » Le visage perdu sur la mer en contrebas, le jeune homme ne lui répondit pas. Il semblait fasciné par les vagues qui venaient mourir contre les rochers. Dans un envoutante tendresse, elles embrassaient une dernière fois la roche avant de disparaître. « J’ai mis du temps à te trouver. » Il se souvenait avoir fait un long chemin… C’était épuisé qu’il s’était finalement assis près de lui. Ce n’était pas grave, ça valait le coup. C’est ce qu’il avait pensé en laissant son regard voguer sur l’horizon familier. « Je suis content que tu sois là. » Il trouvait le paysage parfait… Alors, lui ne pouvait qu’aimer n’est-ce pas ? « C’est beau. » Le coeur du Coréen manqua un battement. Une sensation de manque lui comprima la poitrine mais son visage trouva étrangement le moyen de sourire. Pas autant que toi, pensa-t-il. « Ça fait longtemps que je voulais t’emmener ici… On y reviendra si tu veux. » Il avait encore tant de choses à lui montrer ici. « Tu verras, tu vas adorer Busan. » II en était certain. Ils y retourneraient ensemble. Mais pour l’heure, sa main vint trouver la sienne et la serra sur la roche froide. « On rentre ? » Il se faisait tard. La nuit tombait, l’air devenait de plus en plus frais et surtout… « Tu me manques. » Oui, il était temps qu’il rentre à la maison. Et puis ils étaient attendu alors il ne fallait pas trainer.
Le regard du garçon daigna enfin se détacher de l’eau pour se poser sur l’aîné. Un sourire triste marquait sa figure…. Mikio ressentit un frisson électrique le traverser ainsi qu’une grande sensation de froid. Il s'aperçut ensuite qu’il ne tenait plus sa main… Il ignorait comment mais elle lui avait échappé. « Je pars Michan. » Son regard se fit plus intense. Plus douloureux. Mais son sourire était toujours là. Sincèrement faux. « Je ne reviendrais pas. » Une protestation resta bloqué au fond de sa gorge et il ne comprit pas pourquoi il demeura incapable de récupérer sa main. « Merci Michan… » Et tandis que son corps s’avançait vers le rebord, Mikio tendit le bras en vain « Je t’aime. » Il bascula alors dans ce qui s’était transformé en précipice et le hurlement déchirant de l’autre n’empêcha pas Naoki de se faire avaler par la houle puis disparaitre…

« NON ! »
Mikio se redressa dans un sursaut en dépit du poids sur sa poitrine. Dans un couinement effrayé, Umberto sauta au sol puis se secoua dans un geste outré. Confus, le Coréen reprit ses esprits et se ressitua, aidé par la présence de son chien. Il était dans le salon, à Odaiba, sur son canapé où il s’était visiblement assoupi. De même pour Umberto qu’il avait inévitablement réveillé… une pointe de culpabilité lui tordit le ventre : « Pardon… » Il espérait sincèrement qu’il ne lui en voudrait pas trop.
D’un geste rapide, il essuya son visage humide et prit une grande inspiration. Un rêve… Ce n’était qu’un mauvais rêve… Sa main passa dans ses cheveux et il laissa sa tête retomber en arrière, contre l’accoudoir. Ce n’était pas la première fois qu’il faisait ce genre de rêve… Du moins, lorsqu’il arrivait à aligner plus de deux heures de sommeils consécutives. Cependant, ces derniers temps, il parvenait plus facilement à s’endormir… Ça n’allait néanmoins pas forcément de sa volonté, ni d’une véritable amélioration de son état. Au contraire… Son corps avait probablement atteint sa limite et le contraignait au repos plus fréquemment. Ça ne l’empêchait pas de se faire avoir à chaque fois qu’un songe lui montrait trop clairement celui qui lui manquait bien trop …
Il ne fuyait pas ces rêves en fuyant le sommeil. Ils étaient cruels, insupportable au réveil… mais il avait le désespoir de se dire qu’un instant, flou et parfois sans cohérence, il le voyait… Seulement il ne pouvait décemment pas juste s’enfermer dans cet appartement et dormir…

Il se forçait toujours à bouger. Au moins pour sortir Umberto parce que c’était important. Tous les deux arpentaient alors Tokyo dans de longues balades qui pouvaient parfois durer plusieurs heures. A travers la ville, Mikio reprenait son errance incertaine en compagnie de son fils… mais il ne trouvait pas plus de traces de Naoki. Est-ce qu’il cherchait vraiment toujours ? Il avait fait le tour de la ville, des clubs, des restaurants… Le tour de ses amis également. Aucun ne semblait avoir plus de nouvelles… Il y avait eu cette jeune femme, une blonde aux faux airs assurés qui avait toqué à sa porte pour demander s’il savait où se trouvait Naoki. Bien sûr qu’il avait failli lui fermer la porte au nez parce qu’elle était une femme qui osait réclamer son Naoki déjà parti au bras d’une autre. Une stupide jalousie l’avait presque poussé à la faute mais il avait reconnu la demoiselle à temps… A sa connaissance, Sakuta Keira n’était pas une simple conquête de son colocataire. Il se souvint d’elle et de ce que Nao disait à son sujet. Son amie… Sa meilleure amie ? Peu importe, il n’avait visiblement pas pris la peine de la prévenir elle non plus. Il s’en sentit désolé pour elle néanmoins et il lui dit que s’il le retrouvait, il la préviendrait… et que si elle avait la moindre info, il lui demandait de la lui dire. Keira était parti mais il n’avait pas eu plus de nouvelles depuis. Chez les Kotani, on ne trouvait toujours pas plus de Nao.

Alors, quand il se lassait de sa course contre le vent, Mikio finissait simplement par s’échouer dans un parc ou la plage. Peu importe tant que l’endroit lui semblait assez paisible… Du calme, c’était tout ce qu’il demandait dans ces moments là.
Mais ce n’était pas le même genre de calme qu’il recherchait habituellement… En temps normal, c’était là qu’il sortait sa guitare pour jouer, trouver l’inspiration sur les cordes… Mais cela faisait bien longtemps qu’il ne sortait plus Miyabi. Abandonnée dans un coin de sa chambre, elle comptait les jours depuis que Mikio avait renoncé à la toucher… Mais elle n’était pas la seule rejetée. La musique semblait généralement banni… Il ne jouait plus ni se laissait aller à l’écoute d’une chanson sur son téléphone ou à la radio…
C’était dans le silence qu’il semblait prostré.

A vrai dire, ses interlocuteurs étaient tout aussi limité. Il avait toujours régulièrement Alex au bout du fil et même s’il essayait de ne pas l’appeler trop souvent, l’Anglais le joignait de lui-même pour prendre de ses nouvelles. Inutile d’être un génie pour comprendre qu’il s’inquiétait pour le Coréen… Mikio était visiblement plus obsédé par sa recherche d’Italien que par son état…  
Alex était vraiment gentil. Et lui, en plus ne de pas mériter toute cette gentillesse, il ne pourrait jamais lui rendre un quart de ce qu’il avait fait. Il devrait peut-être songer à rentrer pour commencer à réparer certaine erreur dont il ne comprendrait l’ampleur réel que trop tard…

Le seul à qui il pouvait vraiment parler à vrai dire, c’était Umberto. Celui qui partageait sa peine demeurait son confident le plus fidèle… Cependant, il évitait les longues lamentations. Parce que son fils avait besoin d’être réconforter autant que lui. C’était à deux qu’ils essayaient de se changer les idées à travers les balades et les jeux. Malheureusement, Umberto ne montrait plus autant d’enthousiasme à courir dans les parcs ou sur le sable. Quand Mikio détachait sa laisse, le chien trottinait tout juste alentour pour laisser sa truffe redécouvrir le terrain. Quant à la balle que Mikio apportait avec eux, parce qu’il ne s’amusait plus à dénicher de beaux bâton, il concédait à la ramener une ou deux fois, avant de revenir se coucher au pied de son papa et d’attendre avec lui. Le Coréen avait beau l’encourager à jouer, relancer la balle encore… il finissait par aller la chercher lui-même avant de renoncer. Il faut dire qu’il ne devait pas avoir l’air très convaincant quand il parlait de s’amuser… Mais Mikio s’était rendu à la triste évidence : Umberto déprimait. Et si de retour à la maison, il attendait moins poster devant la porte, il passait beaucoup de temps à dormir, se levant tout juste quand la faim le tiraillait. Au moins, il restait coller à son papa mais quant à savoir si c’était une bonne chose…..

Probablement pas. Mais au fond de son petit coeur demeurait encore l’espoir que son sauveur Italien reviendrait. Un espoir auquel il semblait se raccrocher au moins autant que le Coréen pour s’animer soudainement en pointant la porte d’entrée du museau. Ses oreilles et sa queue se dressèrent vivement en alerte et il s’élança, contournant prestement le canapé pour se planter aussitôt à l’entrée. Evidemment, cette soudaine agitation ne put que faire sursauter le coeur de Mikio qui ne parvint pas à suivre Umberto du regard suffisamment longtemps. Il dû se redresser, tant bien que mal pour considérer son chien… le coeur battant. S’il s’animait ainsi, ça ne pouvait vouloir dire qu’une chose n’est-ce pas ?
Le coeur du Coréen avait tous les droits de se méprendre. Tous les droits de croire à s’en briser quand dans l’entrée ses petits yeux fatigués se posèrent sur une longue silhouette familière… mais qui n’était pas celle qu’il espérait. Dans l’entrée se tenait, non pas Serizawa Naoki, mais Nakamura Hideki. Pourtant, Umberto connaissait les pas de Naoki par coeur. Il savait l’identifier alors même qu’il n’avait pas terminé de monter les escaliers. Se tromper, il ne le pouvait pas… mais voilà : il était lui aussi arrivé à un point où il était près à croire en n’importe quel pas par désespoir…

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Evidemment, Mikio ressentit de la déception et il en était désolé pour son ami. Néanmoins, pour être tout à fait honnête, ce n’était pas le première fois que son fils lui faisait ce coup là. Et à vrai dire, comme toutes précédentes, Mikio avait bêtement espéré que cette fois-ci, ce serait bien sur le visage parfait de son colocataire qu’il poserait les yeux.
Il devait pourtant savoir que c’était impossible. Qu’à ce stade, il n’avait plus à espérer que Nao revienne de lui-même. Il n’avait même plus les clés de l’appartement. Mais il était un idiot qui ne savait faire taire son coeur plus idiot que lui encore. La seule personne qu’il pouvait espérer voir passer cette porte sans qu’il ne lui ouvre, c’était uniquement Hideki.

Hideki qui s’obstinait à lui rendre visite régulièrement. Bien sûr, ça n’avait rien d’anormal dans l’absolue seulement… Mikio n’était clairement pas la meilleure compagnie. Et sa tête ne s’améliorait pas vraiment entre chaque visite… C’était sûrement ce qui poussait son ami à revenir à chaque fois d’ailleurs, à son grand désespoir. Il ne pouvait lui en vouloir mais il préférait que ces moments demeurent courts …. Voire inexistant. Hideki n’avait pas besoin de le voir comme ça…

Il avait bien conscience qu’aujourd’hui, il n’avait pas un meilleur visage à lui offrir, ni même une meilleure conversation. Il pouvait néanmoins faire passer ça sur le dos de la sieste dont il venait d’émerger. Si Hideki venait pour manger, il n’avait qu’à se servir, il connaissait le chemin. Il s’excusait néanmoins pour le vide qui remplissait ses placards… Mikio ne faisait que le minimum de courses ces derniers temps… Et s’il aimait beaucoup le batteur, il songea naïvement  que cela écourterait peut-être sa visite.
Mais Hideki ne l’entendait visiblement pas de cette oreille. Les courses ne furent pas un souci, il les avait fait. Ce qui fit froncer les sourcils au chanteur… Il en était vraiment arrivé là ? « C’est… T’es pas obligé de faire ça Hideki… » Et répondre qu’il s’ennuyait n’était pas une bonne réponse. Il y avait des tas de choses plus intéressantes à faire que s’occuper d’un Coréen en mal de son “ami pour de vrai”.
S’il prenait seulement le temps d’y songer, il n’y avait peut-être qu’Hideki pour mesurer plus justement le manque que son aîné subissait. Il était le seul qui avait eu, à son grand damn, un réel aperçu de leur affection… Et s’il aurait eu toutes les raisons de fuir et de ne plus jamais parler à Mikio après ça, il était là aujourd’hui. Dans son couloir…. Avec une valise ?

Il n’avait pas seulement fait les courses. Il n’était pas non plus venu seul. Son regard se porta plus bas, là où Umberto s’agitait nouvellement, entouré cette fois de deux boules de poils, l’une longue et touffue et l’autre plus courte sur pattes. C’était les deux chattes de l’idole, celles qu’il affichait un peu partout sur les réseaux sociaux et dont Umberto était dingue depuis son premier séjour chez le Nakamura.
Très bien. Son chien avait l’air content et il devait reconnaître que ça faisait longtemps qu’il ne l’avait pas vu aussi éveillé mais…. Hideki, qu’est-ce qu’il fichait ?

La réponse évidente, Hideki la troqua contre une autre, plus à lui : « J’ai pas payé mon loyer. » Non, elle n’était pas plus acceptable mais elle était claire. Il ne venait pas seulement prendre le goûter ici. Et si Mikio râla, s’il tenta de le dissuader, il comprit rapidement que ses valises ne bougeraient pas d’ici autrement que pour se retrouver dans une chambre inoccupée…
Pourquoi ? Qu’est-ce qu’il venait s’emmerder ici quand il avait sans le moindre doute bien d’autres choses à faire ? Il avait une vraie carrière lui. Et rien à faire ici… avec un abruti qui sabotait la sienne en oubliant de plus en plus souvent d’aller au travail…  
Il avait mieux à faire que jouer les nounous. Mieux à faire que subir cette tronche là.
Et le voir dans cette cuisine lui préparer à manger en ignorant ses protestations n’avait fait qu’alourdir un peu plus sa poitrine. « Hideki… » Sors d’ici… Rentre chez toi…
Il n’avait pas besoin de lui. Il n’avait pas à faire ça… Qu’il s’en aille, qu’il le laisse.
Parce qu’injustement, ce n’était pas lui qu’il voulait voir. Ce n’était pas de lui dont il avait besoin. Naoki… C’était tout ce qu’il lui fallait pour aller mieux….

Mais Hideki n’était pas près de rentrer et Mikio n’avait pas réellement la force de le chasser. Encore moins ses chats qui trouvèrent rapidement leur place contre Umberto… Et si plusieurs fois encore, les jours suivant, le Coréen lui demanda de rentrer chez lui il renonçait toujours aussi vite à lui faire changer d’avis. Hideki était borné et lui, il était fatigué.

De la compagnie, il n’était pas sûr que c’était ce qu’il lui fallait. Peut-être que si son ami avait été là depuis le début, il se serait fait à sa présence plus aisément… Mais ce changement brutal l’avait d’abord embêté. Hideki était gentil, serviable et il semblait avoir cette étrange mission d’amuser la galerie… mais sourire comme rire, Mikio en était de moins en moins capable. Tout juste pour être poli. Le reste était terriblement fade, sans saveur ni couleur… parfois même douloureux. Pauvre Hideki…. Est-ce qu’il voulait vraiment rester avec lui ? Mikio n’avait rien de drôle, ni même d’agréable. Au moins, Umberto restait mignon.

Malgré tout et malgré lui, la présence du jeune homme l’obligeait néanmoins à se bouger un peu plus parce qu’il refusait de se donner en spectacle. Des efforts, il en faisait déjà le minimum vital et il trouvait ça amplement suffisant. Il n’avait besoin de rien d’autre pour s’occuper de son chien et mener ses vaines recherches sur internet en attendant un appel d’Alex…. Pour son nouveau colocataire, il essayait d’avoir l’air moins pitoyable…
Mais il arrivait des fois où il ne supportait plus ni effort, ni présence….
Des fois où celle d’Hideki le contrariait juste et le mettait bêtement en colère…. Mais elle n’était réellement dirigée que contre lui… Parce qu’il ne pouvait pas empêcher Hideki d’être là. Parce qu’il n’était visiblement plus capable de s’occuper de lui et qu’il fallait qu’il emmerde les autres….

Si la gentillesse d’Hideki l’agaçait parfois injustement… Mikio comprendrait plus tard que son ami n’avait pas emménager ici par pitié. Il l’avait fait… comme lui l’aurait fait avec Nao. Il avait ressenti le besoin de s’occuper de lui, comme un devoir qu’on ne peut ignorer. Evidemment, ça n’avait rien à voir avec un quelconque sentiment amoureux… C’était plus comme un instinct viscéral.
Un instinct qui n’avait rien de plus justifier chez Hideki lorsqu’on le connaissait un peu… Mikio comprendrait pourquoi il s’était obstiné à s’occuper de cette épave qu’il devenait… Et il lui devait sûrement des excuses. Beaucoup d’excuses…. Il n’avait pas seulement inquiéter son ami, il avait aussi dû lui faire du mal en se comportant de cette façon. Davantage les jours où il s’enfermait une bonne partie de la journée dans sa chambre parce qu’il ne se sentait pas la force d’affronter un regard qui n’était pas celui qu’il voulait voir…. Une retraite qu’il s’autorisait d’autant plus qu’il n’avait plus peur de laisser Umberto seul depuis que ses amies félines étaient là… Il pouvait rester allonger dans son lit défait, à fixer le plafond ou le fond d’écran de son téléphone. Seul… avec cette douleur dans le coeur. Ces jours-là, quand il estimait qu’il s’agissait d’une journée de trop, elle se faisait trop lourde pour qu’il soit capable d’afficher un visage décent…
Il avait mal et honte de lui. De sa faiblesse. De ne pas savoir retrouver Nao. De ne pas savoir avancer sans lui. De ne même pas le vouloir….
Combien de temps ce cirque allait-il durer ? Combien de temps Hideki supporterait ce spectacle qui n’avait rien de distrayant ? Combien de temps lui allait-il tenir ?
Y aurait-il seulement une fin ?
Souffrir comme ça…. Toute une vie…
Comment pourrait-il l’endurer ?

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

‘‘Je souhaite que la tienne soit parfaite…’’

C’était une journée de plus dans son lit. Dans le noir. Une odeur de cuisine filtrait à travers la porte close. Bien qu’elle fut bonne, elle ne parvint pas à ouvrir l'appétit de son ventre noué.
Hideki n’était toujours pas rentré chez lui. Depuis combien de jours s’obstinait-il à jouer les nounous ? Il veillait avec entêtement à ce que son aîné mange bien, l’aidait même dans ses papiers accumulés dans une boîte aux lettres qu’on avait oublié d’ouvrir depuis un moment. La paperasse était bien le dernier de ses soucis, si bien qu’il n’avait même pas réalisé n’avoir rien payé pour le loyer… Etonnant quand avec le peu qu’il avait gagné ces derniers temps, il aurait probablement dû se retrouver à la rue aujourd’hui. Le mystère s’était rapidement résolu lorsqu’il découvrit que sa part de loyer avait largement été payé par son ancien colocataire. Cette découverte avait heurté le Coréen. Naoki… Qu’est-ce qu’il cherchait à faire ? Il voulait l’entretenir de loin ? A moins que ce ne soit qu’une excuse ridicule… C’était presque à se demander s’il n’avait pas envoyer Hideki…
Non… Le chanteur était juste bien trop gentil…et lui n’était qu’un idiot à lui râler dessus.
Un soupire fendit le silence de sa chambre.
Depuis quand s’était-il retrouvé dans ce rôle là ?
Il n’avait pas besoin qu’on s’occupe de lui. C’était son rôle de s’occuper des autres. De prendre soin de Naoki… Mais Nao n’était pas là.

Où était-il ? Dans quel pays avait-il fui ? Quelle vie avait-il choisi de mener loin de lui ?
C’était toujours les même questions qui tournaient dans sa tête. Et à cela, la présence d’Hideki n’avait rien changé. Quant aux réponses, Alex n’était pas plus capable encore de les lui donner. Il faisait de son mieux, il le savait. Il avait trouvé des Kobayashi Akira mais aucun ne s’était révélé être Naoki… Ils n’avaient aucune véritable piste et le fugitif n’avait que trop bien couvert ses traces, probablement aidé par son oncles.
Il ne voulait pas être retrouvé et donc, il ne voulait plus être aux côtés de Mikio.
C’était une conclusion à laquelle il arrivait trop souvent ces temps-ci… Amer, douloureuses… mais de plus en plus claire.

De raison cependant, le Coréen n’en avait toujours pas. Le choix…. Peut-être que Nao ne l’avait vraiment pas eu… Et s’il avait été obligé de partir… Pouvait-il réellement prétendre à le ramener ? Etait-ce vraiment la bonne décision ? Ou bien ne le faisait-il pas uniquement pour lui… Dans ce cas, il était peut-être plus juste d’abandonner. Renoncer avant de devenir véritablement fou…

Il avait beau se répéter que c’était ce qui le faisait tenir, son état physique et mental était de plus en plus discutable. Le manque de sommeil marquait désormais indéniablement sa figure. En dépit des repas que lui servait Hideki, son visage s’était nettement affiné. Son ventre avait fondu. Ses T-shirt lui semblaient grands… mais refaire sa garde robe il n’en avait pas l’envie. Et si son ami lui proposait régulièrement de sortir pour s’aérer la tête… A quoi bon s’il ne pouvait même pas se saouler pour alléger un peu son coeur ? Il était fatigué. Mais la douleur, elle, ne s’atténuait pas.

Ses yeux s’étaient clos une énième fois, traduisant l’absence d’envie de faire le moindre effort. Demain. Il essaierait demain. Les miettes de son coeur pesaient trop lourd aujourd’hui. Il ne savait pas encore ce qu’il dirait à Hideki quand il viendrait toquer à sa porte… peut-être qu’il ne répondrait pas et feindrait de dormir. Au moins Umberto aurait quand même droit à sa promenade…
Tsss. C’était affligeant. A vrai dire Mikio se méprisait lui-même mais ça n’avait pas d’importance dans ces moments-là… Il n’y avait rien à faire à part attendre… Sauf que ça ne passait jamais. Tout ce qu’il pouvait espérer c’était un sursaut d’effort ou, comme souvent, qu’il cède à la persévérance d’Hideki… Peut-être arriverait-il à le tirer de sa chambre avant la fin de la journée qui sait. Pour l’heure, le chanteur s’était retourné dans son lit, face au mur, en rabattant son bras sur son visage comme s’il ne faisait pas assez noir dans la pièce.

Il n’était pas vraiment sûr de vouloir dormir. Ni de le pouvoir à vrai dire… Mais son téléphone ne lui laissa pas l’occasion d’y réfléchir. Une première vibration lui fit ouvrir les yeux contre son bras mais il se renfrogna assez vite et dans un frottement contrarié, se cala un peu mieux. Il n’avait envie de parler à personne. Pas aujourd’hui. Ni Alex, ni Hideki, ni sa mère - surtout pas sa mère. La seconde vibration, plus insistante lui sembla-t-il, lui fit froncer les sourcils. Une partie de lui refusait de bouger, l’autre lui pointa du doigt cette petite flamme qu’il essayait d’ignorer ces derniers temps. Cette flamme qui diminuait mais ne disparaissait pas, subsistait en flammèche tenace et qui lui parlait d’espoir. Auparavant, il se serait jeté sur son téléphone pour répondre immédiatement, n’espérant entendre qu’une voix au bout du fil, ou au mieux, une autre familière qui lui annonçait la seule et unique nouvelle qu’il voulait écouter. Mais si son coeur s’entêtait à sursauter comme si tout était toujours parfaitement probable, lui était las d’essuyer les dégats chaque fois plus grands… Las d’avoir mal. Las d’une absence qu’il ne saurait jamais combler…
Mais la douleur était inévitable, qu’importe les fois où il essayait de moins y croire. Il n’y parvenait pas. Est-ce qu’il était maso ? Ou bien cette partie de lui savait qu’il avait réellement besoin de cet espoir, aussi douloureux pouvait-il être à porter ?

Ce fut ce même espoir qui le poussa à attraper son téléphone à la quatrième vibration pour le porter à son oreille. « Allo ? » Sa voix n’était pas bien éveillée mais elle fut assez claire. Il n’avait pas pris le temps de vérifier qui l’appelait cependant… peut-être l’avait-il fait exprès quelque part. « Allo ? » Mais son interlocuteur demeurait muet. Mikio fronça les sourcils. Il n’avait pas fait l’effort de décrocher pour parler à du vent. « Hey… » lâcha-t-il quelque peu agacé. Est-ce que c’était le réseau qui déconnait ? Ses yeux se plissèrent, disparaissant sous ses paupières et il détacha le téléphone pour consulter l’écran. Aucun numéro ne s’affichait. « Qu’est-ce… ? » Est-ce que c’était le numéro d’Alex qui avait bugué comme il l’appelait d’un autre pays ? Ou une blague ?
Mikio reposa le téléphone contre son oreille. Il devait peut-être raccrocher…. Mais au bout du fil, s’il écoutait attentivement, il lui sembla bien entendre une respiration… Faible mais bien présente…
C’était peut-être bien une mauvaise blague.
Ou bien….

« Nao ? »

Il y avait une pause de quelques secondes avant que sa bouche n’ose prononcer ce prénom. Un prénom directement adressé… Ca n’avait rien de probable et pourtant, le Coréen avait poussé l’absurde jusqu’à demander après un silence : « Nao est-ce que c’est…- » Bip.

Et ce coup de fil avait pris fin. Aussi vite qu’il était survenu. Il n’avait apporté aucune réponse. C’était presque comme s’il n’avait jamais eu lieu. Parce qu’il aurait probablement pu être un de ceux que Mikio rêvait… Une illusion de plus. Une nouvelle chimère douloureuse. Alors il avait retiré l’appareil de son oreille puis avait fixé l’écran devenu noir.
Pourquoi…. ? Pourquoi avait-il cru un instant que c’était lui ? Pourquoi s’obstinait-il à se faire du mal ? Il reposa le téléphone face contre son coeur et ferma les yeux. Evidemment… que ça ne pouvait pas être lui.

Fou… Il l’était peut-être déjà au final. Croire… Ce n’était peut-être pas si bon que ça. Il perdait la tête. Naoki bouffait son coeur et son esprit… Mais qu’est-ce qu’il faisait vraiment maintenant ? A part se lamenter dans son lit et croire en l’absurde…
Il ne pouvait pas continuer comme ça… à chasser du vide.
Naoki avait besoin de lui… Il devait le retrouver…
Mais n’essayait-il pas de se persuader d’une nécessité illusoire ? C’était lui, en vérité, qui avait besoin de Naoki. A lui qu’il était devenu indispensable… Mais où est-ce qu’il allait comme ça ? Il foutait sa vie en l’air et emmerder ses amis… Il était un moins que rien, pathétique, misérable… ça ne pouvait pas durer.
Est-ce qu’il n’était pas temps d’arrêter… ?
Mettre un terme à cette torture… ?

Une force insoupçonnée lui permit de se redresser dans le lit peu de temps après. Il parvint même à tenir sur ses deux jambes pour rejoindre la porte de sa chambre. Une grimace barra son visage lorsqu’il l’entrouvrit, éblouie par la lumière dans le couloir. Mais il réussit à sortir de son antre pour trouver la salle à manger. Là, il tira une chaise ce qui attira surement l’attention du japonais dans la cuisine puisqu’il l’entendit le féliciter ou quelque chose du genre, sûrement pour s’être levé. Il n’avait pas trop écouté, il s’assit juste sans un mot, le regard fixé sur la table. Ce ne fut que lorsqu’Hideki le retrouva, probablement pour s’enquérir à sa façon de son état, que le Coréen daigna lui accorder un regard. Est-ce qu’il lui avait posé une question ? Mikio n’y avait pas répondu. Ses yeux s’étaient de nouveau baissé pour considérer son poing mollement fermé sur la table.

Peut-être que son ami l’interpella de nouveau mais le chanteur était visiblement trop songeur. Il ouvrit cependant la bouche au bout de longues secondes, sans pour autant répondre davantage au garçon. Il ne s’éclaircit pas la gorge, si bien que ses premiers mots sonnèrent rauque : « Je crois…. Je crois que je vais rentrer à Busan. »
Oui. Il était peut-être temps d’abandonner.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
“…remplie de tout ce que tu mérites.”

Est-ce qu’il devait faire sa valise dès maintenant ?
Hideki lui avait gentiment proposé son aide pour les cartons...
Il devait au moins prévenir sa grand-mère s’il partait. Ca faisait un moment qu’il ne l’avait pas appelé, elle allait s’inquiéter…
Umberto… Évidemment qu’il l’emmenait. Peu importe comment il l’avait eu, c’était son bébé. Il partageait la même peine que lui. Ca l’attristait de devoir le séparer des chats de Hideki… mais peut-être se trouverait-il d’autre copain à Busan ? Et puis, il aimait la plage Umberto. Il aimerait sûrement beaucoup la sienne…. Ce que dirait sa mère ? Il l’ignorait. Mais  il l’imaginait mal le mettre à la porte. Elle qui recueillait le moindre chaton un peu perdu… Oui, sûrement qu’Umberto aurait de la compagnie là bas. C’est bien… Oui, très bien…

Et lui, il retrouverait Jae, son meilleur ami. Il était plus que temps qu’il rentre… Ce gosse qu’il avait quitté il y a cinq ans avait sûrement bien grandi. Et il lui manquait. Bien plus qu’il ne lui avait montré ces dernières années… Jae lui en voudrait peut-être et il aurait raison après tout. Mais ça ne lui semblait pas si important sur le moment… Il verrait bien mais tant qu’il rentrait. Oh il avait conscience que cela n’aurait rien d’un retour très glorieux mais au moins, il serait chez lui…

Chez lui… Sa plage, son rocher….
Est-ce qu’il y retrouverait Naoki comme dans son rêve ? Se laisserait-il tomber près de lui, dans un soulagement salvateur ? Parviendrait-il à le retenir … et le sauver ?
Non. Il n’aurait pas à le faire… Parce que Nao n’y serait pas. Il ne le trouverait ni à Busan ni à Tokyo…
Nao… Il ne le verrait plus jamais.. Pas vrai ?

Non… Je ne veux pas….

Il fallait qu’il appelle Alex. Il devait le prévenir qu’il rentrait et qu’il n’avait plus besoin de chercher… Peut-être se sentirait-il un peu coupable de ne pas avoir réussi à aider Mikio. Il avait fait tout ce qu’il pouvait alors ce dernier ne pouvait pas lui en vouloir… Et quelque part, il l’avait aussi aidé à prendre conscience qu’il ne pourrait pas le retrouver… et qu’il fallait arrêter. Oui, Alex n’avait pas à se sentir triste. Mais le Coréen savait aussi que le fait qu’il rentre ferait également plaisir à l’Anglais… Et il promettait que lorsqu’il aurait un peu d’argent, il ferait un séjour à Londres pour le remercier de son aide. Peut-être avec Jae….

Mais… Et Nao… ?

Pour ça, il fallait encore qu’il trouve du travail. Il n’en avait pas été capable cinq ans plus tôt. Parce qu’il était un gosse capricieux à l’époque… Et aujourd’hui ?
Il ne valait clairement pas mieux. Il était pire qu’un moins que rien. Et sa guitare… Il n’était même pas sûr de savoir la reprendre. Est-ce qu’il allait l’abandonner dans un coin de sa chambre à Busan aussi ? Et qu’est-ce qu’il ferait sans elle ?
Il essaierait de trouver un job, le premier qui voudrait bien de lui, et il ferait en sorte de ne pas se faire virer. De ne pas faire honte une fois de plus à sa mère…
Mais la rendre fière ça… Ca semblait définitivement irréalisable désormais.
Il ne ferait rien de très grand dans sa vie, c’était certain. Sans étude, ni même un pauvre diplôme… et maintenant sans la seule chose qui le rendait un peu intéressant… Non, il n’avait rien à espérer de brillant.
Mais il devrait s’y faire...Parce qu’il n’avait pas le choix. Il survivrait… surement … C’était déjà ça…

Je ne veux pas de cette vie…


Ce n’était pas si noir. Peut-être que son père voudrait bien de lui dans sa boutique. Ca lui paraissait une bonne idée… Il la connaissait par coeur, ses moindres recoins… Si elle n’avait pas trop changée. Il avait fait tant de fois l’inventaire avec lui, et s’il n’avait aucune compétence dans le commerce, il ferait des efforts pour apprendre… Peut-être qu’un jour, il pourrait reprendre la boutique…
Et si ce n’était pas suffisant, il pourrait peut-être demander aux Hwang…. ? Ca, c’était moins sûr. Après 5 ans d’absence, Hwang Tae Hyun risquait surtout de lui répondre avec perte et fracas. Peut-être qu’il n’aurait même plus le droit de manger dans leur restaurant…
Il verrait bien ce que serait sa nouvelle vie…

Non… C’est pas ça… C’est pas ce que je veux… Rendez le moi… C’est avec lui que ma vie est…

Quelque part, peut-être que les rugissements du chef de famille Hwang et les vociférations de sa mère parviendraient à couvrir les lamentations de son coeur…

Arrête ça… !

Ou peut-être finirait-il par choisir de le jeter simplement à la mer…

Naoki….

Mais avant tout, il devait prévenir Alex.
Et comme si ce dernier l’avait su, son téléphone vibra dans sa poche. Hideki était reparti dans la cuisine, lui n’avait pas bougé de sa chaise. Il avait tout juste remarqué le thé que son ami lui avait servi quand la vibration dans sa poche lui avait fait baisser les yeux. Un autre appel… Encore une blague ?
Mollement, il tira l’appareil et constata cette fois-ci que le numéro et le nom était bien affiché et qu’il s’agissait de l’Anglais.

« Hello. » Il faisait au moins l’effort de la langue. Du moins pour le premier mot, quoiqu’il sonna un peu las. Mais ceux qui suivirent, de son interlocuteur, ne manquèrent au contraire pas d’énergie. Alex s’exprima d’une manière qui semblait mêler panique et excitation, si bien que le chanteur cru l’entendre s’emmêlait bien plus que d'habitude entre l’anglais et le Coréen. « Quoi… ? Qu’est-ce que tu dis Alex… ? Parle moins vite s’il te plait, je comprends pas… » avait-il essayé de répondre doucement, pressant une tempe de ses doigts libres. Il avait soudain mal au crâne… à moins qu’il venait seulement de s’en apercevoir.

Alex reprit. Plus lentement, il sembla même reprendre depuis trop le début puisqu’il employa des termes qui sonnaient allemands aux oreilles coréennes et qu’il devinait trop techniques, informatiques et magiques. Il cru quand même comprendre dans ce charabia qu’Alex avait mis les appels vers son téléphone sous surveillance. « Celui que tu viens de recevoir… Not mine… the last one… Il vient d’Italie ! » Mikio se figea. De Rome, plus précisément. Son coeur sursauta. Est-ce que c’était une cruelle coïncidence … ? Alex ne l’aurait pas appelé pour une simple coïncidence.
On ne l’avait pas seulement appelé de Rome. L’appel venait directement de la chambre l'hôtel où ils avaient séjourné Nao et lui le printemps dernier. Leur chambre… pas une autre… Celle-ci…. Ca ne pouvait pas être une coïncidence.

« Ca veut dire que c’est… »

Ca ne pouvait être que lui. Naoki. Cette respiration, si faible et si retenu qu’il avait entendu à l’autre bout du fil… C’était la sienne. Ce prénom qu’il avait adressé… C’était bien le sien.
Son poing vint couvrir sa bouche et il sentit son regard s’embrumer tandis qu’à l’autre bout du fil, Alex s’excusait de ne rien pouvoir lui dire de plus puisqu’il s’agissait seulement des coordonnés de l’hôtel. Il fut bien incapable de lui répondre durant plusieurs longues secondes, sa gorge demeurant trop nouée quand dans sa poitrine, l'affolement tambourinait en grand fracas.
Qu’est-ce que signifiait ? Pourquoi… ? Pourquoi Nao avait-il essayé de le joindre ? A quoi jouait-il ? S’il ne voulait plus entendre parler de lui, s’il ne voulait le voir, ni lui parler… pourquoi l’appeler ?
Ce fut presque d’un ton absent qu’il remercia Alex puis raccrocha.

Une douleur sourde broya alors son ventre et étouffa son coeur…. L’inquiétude, l’angoisse et la culpabilité suivies de près par une colère vivement dirigée contre lui, le submergèrent. Naoki avait peut-être des ennuies… Peut-être était-ce bien contre sa volonté qu’il était loin de lui… L’appeler de cet hôtel… Mikio n’aurait pas pu le deviner sans Alex alors… pourquoi ? Pour quelles raisons ? Qu’est-ce qu’il se passait en ce moment dans la tête de Naoki ?

La douleur pesante dans sa poitrine semblait vouloir lui remémorer ses promesses…
Il ne pourrait jamais le savoir s’il renonçait.
Pouvait-il vraiment rentrer à Busan et envoyer en l’air toutes ses promesses ?  
Cet appel… n’était-ce pas la preuve qu’il avait eu tort de vouloir abandonner ?
Il n’en avait pas le droit. Oui, il se sentait crever un peu plus chaque jour à l’absence de Nao. Oui, il désespérait de ne pas savoir comment le retrouver. Mais qu’espérait-il vraiment en abandonnant ? Mourir à petit feu sur sa plage d’une douleur qu’il ne saurait jamais guérir ? C’était absurde… Il ne pouvait pas renoncer… Pas tant qu’il ne serait pas assuré que Nao aille bien. Pas tant qu’il ne serait pas certain qu’il n’y avait plus la moindre envie chez Naoki de rester près de lui. La moindre chance. Le moindre espoir….
Il devait retrouver Naoki. S’il voulait avancer, il n’y avait pas d’autre solutions. Oui même s’il devait se retrouver incapable de le ramener, il devait au moins comprendre pourquoi il était parti et pourquoi il devrait renoncer à lui…
Il devait le retrouver et ce même s’il devait perdre ce qui lui restait de coeur en route.

« Tout va bien ? » La voix de Hideki le fit atterrir et il tourna un regard changé vers lui. Ce que son ami avait dû percevoir puisqu’il lu son interrogation dans ses yeux avant de secouer la tête et se lever. « En fait, je vais pas rentrer à Busan tout de suite… Je vais à Rome. »

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
“…remplie de tout ce que tu mérites.”

“Tu es et tu resteras la plus belle personne qu’il m’ait été donnée de rencontrer.”

« Monsieur… Tout va bien ? »
Ses sourcils se froncèrent et ses paupières luttèrent à s’ouvrir. Il plissa le nez et les yeux tandis que la lumière douce de l’aube agressa sa vision fatiguée. « Monsieur… » Il sentit une main hésitante presser timidement, presque avec crainte, son épaule. Un faible grognement lui répondit et il l’entendit reculer d’un pas. Ce n’était pas tant que cette présence était venu déranger son sommeil qui n’était pas si profond que ça, mais quand essayant de bouger, une douleur froide avait parcouru la surface de son dos. La grimace qui avait alors déformé sa figure n’avait pas dû arranger le sentiment d’inquiétude que ressentait celle à qui appartenait cette voix féminine.
Au prix de beaucoup d’efforts, il parvint néanmoins à se redresser, non sans enfouir immédiatement sa tête dans ses mains gelée. Il avait froid, mal partout et surtout, une terrible migraine. Quel jour il était ?  « Mmnnh… » S’il avait tenté de s’exprimer, ce ne fut qu’un nouveau grognement qui franchit ses lèvres. Dans un mouvement maladroit son pied percuta une canette de bière vide qui s’en alla rouler plus loin et dont le bruit avait dû faire sursauter la pauvre enfant. Elle devait être bien trop généreuse pour s’entêter à rester près de cet ivrogne… Il renifla bruyamment et ébouriffa ses cheveux déjà en bataille avant de faire de son mieux pour s’éclairer la gorge. C’est d’une pénible voix qu’il parvint enfin à articuler ses premiers mots en japonais : « Ca va…. Merci…. » Il s’efforça même de lever ce regard fatigué vers elle, réussissant au bout de quelques secondes à voir autre chose qu’une frêle silhouette. Les premiers rayons du soleil se reflétèrent sur ses cheveux blonds probablement teintés et éclairèrent plus certainement son petit visage de poupée aux traits inquiets. « Vous avez besoin d’aide ? » Mais si elle était mignonne, il ne parvint même pas à se faire la réflexion, frottant son visage avant de le secouer pour la rassurer définitivement… ou presque : « Vous en faites pas… Je vais rentrer. »

« Je peux appeler un taxi si vous vou-… » - « N-non merci », la coupa-t-il le plus gentiment possible. « C’est gentil mais j'ai mon téléphone… Ca va aller. » Malgré une moue inquiète et un regard qui était passé de droite à gauche comme si elle cherchait tout de même de l’aide, elle finit par hocher la tête et se redresser. Il réalisa alors que son visage lui était vaguement familier. « D’accord…. A bientôt alors. Faites attention à vous. » Bien que l’inquiétude demeurait la plus forte, une chaleur perçait dans sa voix, comme une certaine affection qui l’intrigua. Et tandis que la jeune fille s’éloignait enfin, non sans lancer un ou deux derniers regards derrière, Mikio revit cette même silhouette s'asseoir plusieurs fois à une table d’un des bars où il jouait avant. Avant qu’il ne se fasse définitivement virer.
Il s’en sentit désolé alors pour cette jeune femme qui semblait malheureusement avoir reconnu l’épave qu’il était, mais il ne pouvait plus lui répondre “à bientôt” désormais.

Sa sauveuse évanouie, il demeura de longues secondes sans bouger sur ce banc en pierre où il avait visiblement passé la nuit. C’était presque à se demander comment il avait réussi à s’endormir là dessus par cette température glaciale à son goût. L’épuisement avait dû l’aider… Et l’alcool ? Qu’est-ce qu’il avait fichu hier soir ?
Passant une énième fois sa main trop froide sur son visage nullement reposé, il rassembla ses idées et même si la fatigue embrumait ses pensées, il se souvint assez vite du bar dans lequel il avait échoué la veille. Il s’en souvenait même trop bien pour en déduire que sa tentative de se saouler avait été un échec. Quel crétin, il le savait pourtant… tout ce qu’il pouvait récolter c’était les effets d’une gueule de bois. Mais l’alcool ne l’aider ni à oublier, ni à endiguer l’écoulement impitoyable de ces secondes sans lui. Soulager son coeur… Il n’y arrivait pas plus qu’il n’était capable de le retrouver. Pas même dans un misérable rêve ivre…

Rome, ça n’avait rien donné.
Sans réfléchir très longtemps, il s’était envolé pour la capitale de l’Italie. Argent ou non, il avait réussi à prendre un billet et même réserver cette fameuse chambre d'hôtel… Mais bien évidemment qu’il n’y avait trouvé aucun Nao là-bas. S’il n’était que de passage, lui était arrivé trop tard. La réceptionniste avait bien semblé vaguement le reconnaître sur la photo qu’il avait montré, mais il n’était définitivement plus ici. Il l’avait peut-être raté d’un jour seulement…  Après tout qu’espérait-il ?
Bien sûr que Nao ne l’attendait pas derrière la porte de leur chambre, ni sur le lit, ni sur le balcon. Il n'abordait pas ce sourire taquin sur les lèvres et ce regard qui signifiait généralement au Coréen qu’il valait mieux fuir. Il ne l’avait pas non plus accueilli avec quelques mots d’Italien, ni gratifié de ce si plaisant “Tesoro”. Non. La porte s’était ouverte sur une chambre vide où seul le fantôme d’un souvenir subsistait… Mais pas de Nao.
Malgré ça, comme s’il n’était pas sûr d’avoir assez mal, il s’y était attardé. Sur le balcon, il s’était perdu à admirer la vue qu’ils avaient admiré ensemble des mois plus tôt. Jusqu’à entendre leur guitare s’accorder et leur doigts chercher sur les cordes la suite de la chanson… Et quand ce fut trop pour que ses yeux ne le menacent pas une nouvelle fois d’innonder ses joues, il ne su être plus sage en rentrant pour perdre son regard sur ce lit… Ce lit dans lequel Nao avait dû se coucher seul, sans lui… Ce lit duquel il avait probablement passé cet appel, avec ce téléphone posé juste là…
Il ne comprenait toujours pas pourquoi… Qu’est-ce qu’il lui avait pris à cet instant. Pourquoi Nao était revenu ici, pourquoi avoir essayé de l’appeler…. Quel était son but ?
Le contacter ? Le rendre fou ? Lui demander de venir le chercher en jouant aux devinettes ?
Nao ne devait pas se douter qu’il était ici à présent. Il ne devait même pas envisager que son appel puisse le trahir… Mais s’il aurait pu se féliciter de ne jamais avoir parlé des talents d’Alex à son colocataire, force était de constater que ça n’avait pas été suffisant pour le mener jusqu’à lui.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Alors il avait poussé le vis en retraçant leur séjour comme s’il espérait naïvement y trouver des indices que Nao aurait semés afin qu’il le retrouve… Une idée absurde qui avait pourtant guider chacun de ses pas du pied de leur hôtel, en passant par le Colisée devant lequel il était passé, tout comme cette fontaine dans laquelle il était tombé. Et comme si la stupidité lui donnait des ailes, il avait même retrouvé le chemin vers le restaurant de Benito où il s’était arrêté. Là, devant la porte, son coeur s’était mis à battre douloureusement et il n’avait pas eu besoin de rentrer pour les revoir à table à se taquiner et à plaisanter bêtement sur leur pseudo couple. Peut-être qu’un vague sourire avait étiré ses lèvres à ce moment là mais il avait surtout été infiniment triste. Et pourtant, il avait fait violence à son coeur en poussant la porte du restaurant… Une clochette avait teinté son arrivé. Il ne se souvenait plus de l’heure mais le service était probablement terminé puisqu’il se rappelait d’une salle déserte dans laquelle était apparue un chef Italien étonné, près à chasser poliment ce touriste qui ne savait pas lire les horaires. Peut-être qu’il ne l’avait pas reconnu tout de suite - après tout, les chinois avaient tous la même tête -, et il était vrai également que Mikio avait quelque peu changé depuis le printemps dernier. Mais surtout, cette fois, il était seul. Cependant, alors que le cuisinier avait ouvert la bouche, le Coréen lut dans son regard une hésitation et il fit de son mieux pour lui adresser un sourire - le mieux dont il était capable aujourd’hui. « Bonjourno Benito… I’m Mikio », avait-il péniblement prononcé. L’Italien sonnait encore plus bizarre dans sa bouche à cet instant. Mais le plus dur restait à venir… Se présenter comme l’ami de Naoki… Ce que sa gorge avait bien plus de mal à faire car il la sentit se nouer, au point qu’il n’eut pas à surmonter cette épreuve : Benito le devança. Il se souvint que le chef avait ouvert les bras en s’exprimant soudainement beaucoup trop vite en Italien, moulinant ses mains jusqu’à ce qu’elles n’attrapent Mikio par les épaules et le secouent d’une façon probablement affectueuse pour un Italien…. Naoki était définitivement plus doux avec lui, mais passons.

S’il n’avait évidemment pas compris un traître mot de ce que le chef avait dit, il lui avait semblé avoir entendu le prénom de son ancien colocataire et le ton qu’il avait pris, bien que effrayamment vif, avait été du genre merveilleusement étonné. S’il avait su manier la langue de Dante, il aurait probablement compris que Benito l’avait bel et bien reconnu et qu’il trouvait sa visite surprenante quand elle suivait de près celle de son petit rital bridé. Et Dieu qu’il aurait aimé parler Italien à cet instant pour savoir mieux communiquer et peut-être retrouver son fugitif… Mais il ne s’était pas laissé démonter. Du mieux qu’il pu il engagea une conversation, baragouinant en trois langues différentes pour parvenir à faire comprendre qu’il recherchait Nao… Est-ce qu’il était venu ici récemment ? Est-ce qu’il savait où est-ce qu’il se trouvait ? Peut-être avait-il prévu d’élire domicile ici après tout…. Si Benito aurait pu choisir d’écourter cette discussion compliquée, il prit lui aussi le temps de se faire comprendre et à force de persévérance, Mikio comprit au moins que Naoki était bel et bien passé ici peu de temps avant.
A cette annonce qui lui sembla plus importante et authentique que la vague identification de la réceptionniste à l’hôtel, son coeur s'affola et les traits du coréen durent le trahir puisque Benito parut plus prévenant. Le chanteur l’entendit s’excuser, comprenant qu’il ne savait pas où cette fripouille avait bien pu disparaître après son séjour, lui qui voyageait tout le temps. Mikio avait secoué la tête… Ce n’était pas de la faute de Benito et il se doutait malheureusement que Nao devait bien se garder de donner sa nouvelle adresse - s’il en avait une. Et même s’il l’avait fait, comment aurait-il pu être sûr qu’il ne mentait pas, lui, le beau parleur italien ?
C’est vrai, il voulait le retrouver, il aurait tout donné pour ça… mais face à Benito qui avait pu parler à son Nao quelques heures à peine auparavant, il n’y avait plus qu’une chose qu’il voulait savoir plus que tout : est-ce que Naoki allait bien ?

A cette question obsédante, Benito finit par y répondre d’un grand oui enthousiaste qui serra une première fois son coeur de soulagement. Naoki… Il avait surement débarqué ici avec son grand sourire et c’était bien ce que le chef paraissait mimer… Mais comment aurait-il pu lui dire autrement ? Que cette canaille était bel et bien arrivé comme une fleur dans son restaurant, un sourire italien éclatant aux lèvres, une nouvelle coupe de cheveux scandaleuse sur la tête. Ah si, il avait eu l’air d’aller bien, quoiqu’il l’avait peut-être trouvé un peu maigre… à moins qu’il ne l’avait toujours trouvé trop maigre ?
Mais il n’avait pas su le dire ou le faire comprendre à Mikio… Alors tout ce qu’il avait pu faire de plus pour lui, peut-être parce qu’il avait eu pitié de cette mine là, au contraire, abattu, c’était l'associer à une table et lui amener un plat de pâtes au nom imprononçable. Sûrement délicieuses, mais qui avait surtout pesé lourd sur le coeur du Coréen tandis que dans son assiette il songeait à Nao. Nao qui était bien venu ici… Nao qui allait bien….

Vraiment bien ? Il ne pouvait en être véritablement certain, mais il était sorti en se répétant ces mêmes affirmations, non sans avoir chaudement remercié Benito. C’était cependant tout ce qu’il tirerait de cette visite.... Et rien de plus tandis qu’il achevait finalement son périple sur le Mont Palatin d’où il pouvait voir le soleil se coucher. Il fut bien évidemment incapable de le trouver aussi merveilleux que celui observé aux côté de Naoki…. le plus beau de toute sa vie, pensait-il. Et c’était bien ici qu’ils avaient pris cette photo tous les deux que Mikio aimait tant et garder précieusement dans son portefeuille. Mais là encore… ce paysage magnifique qui devenait cruel contemplé seul, ne lui apporta aucune autre réponse.

Nao était là… Il va bien…

Il avait repris l’avion le lendemain pour Tokyo et depuis, rien d’autre ne s’était passé. Il n’avait pas retrouvé miraculeusement Naoki puisqu’il n’avait véritablement rien ramené de concret. Tout juste une constatation extérieur dont il doutait de plus en plus au fil des jours tandis qu’il se remémorait toutes ces fois où Nao l’avait trompé avec ces faux sourires… Naoki n’allait peut-être pas si bien que ça et il n’avait toujours aucune idée d’où il se trouvait. Fouler la même terre que lui n’avait en rien apaisé son coeur et semblait même l’avoir rendu plus lourd.
Quant à Alex, il n’avait pas trouvé de nouvelle faille. Nao n’avait visiblement commis aucun autre faux pas. Lui n’avait pas reçu de nouveau coup de fil.
Il n’avait pas d’autre moyen de le pister et partir à l’aveuglette dans tous les pays qui pouvait possiblement plaire à Naoki n’était pas envisageable avec son compte en banque. Pour la énième fois, Mikio se retrouva coincé à la capitale nippone…

S’il n’avait plus songé à renoncer depuis la dernière fois, le doute s’immisçait de nouveau régulièrement en lui quant à ses chances de le retrouver un jour… Il refusait d’abandonner mais il s’était depuis mis en place un nouveau jeux de patience cruel… Quand il s’était pourtant ordonné d’étouffer ces espoirs absurdes, il se mettait désormais à espérer plus fort qu’encore une fois, le téléphone sonne. Encore une fois pour que celle-ci, il parvienne à lui parler, lui demander de rentrer… et peut-être entendre de nouveau le son de sa voix.
Un jeu pénible qui mettait son coeur et ses nerfs à rude épreuve au point qu’il y cherchait parfois des échappatoires aussi stupides que se saouler quand il ne le pouvait pourtant pas.

Qu’est-ce qu’il dirait Nao, s’il le voyait agir aussi bêtement, lui qui lui était toujours sur son dos ? Est-ce qu’il se moquerait ? L’engueulerait… ? Ou plus probablement, culpabiliserait… ? Tsss. Il n’avait rien à lui dire quand il était aussi pathétique.
Un soupir désespéré, dirigé largement contre lui-même, fendit la quiétude du parc encore peu fréquenté. Il n’allait pas passer la journée ici de toute façon. Mais lorsqu’il tenta de reconnecter ses jambes pour se lever, une vibration contre sa cuisse l’interrompit. Il tira son téléphone de sa poche et constata en premier lieu le voyant rouge qui indiquait la rade de batterie…. 9%. Il n’était pas sûr de tenir jusqu’à chez lui mais peu importe.
La seconde chose qu’il remarqua…. Ce fut les trop nombreux appels de son nouveau colocataire. Il se mordit sévèrement l’intérieure de la joue au point de bientôt sentir un goût métallique dans sa bouche. Aie…. Hideki n’avait visiblement pas apprécié qu’il découche sans être prévenu… Le pauvre avait dû se faire un sang d’encre. Il avait déjà insisté la veille pour l’accompagner mais le Coréen avait tenu à rester seul comme le crétin qu’il était…. Et maintenant ? Est-ce qu’il l’avait cherché toute la nuit ?
Il mordit plus fort. Si Nao lui avait fait ça, il serait devenu fou. Il n’était qu’un abruti et il avait intérêt à vite rentrer et s’excuser… Il pouvait bien s’en vouloir, ça ne changeait rien à sa connerie. Il s’empressa néanmoins d’envoyer un message à son ami…

Pianotant rapidement un mot d’excuse avant de ne plus le pouvoir, il lui écrivit qu’il allait bien et qu’il rentrait. Il éviterait néanmoins de lui dire où il avait dormi… Il en avait trop honte de toute façon. Cependant, cette nuit dehors par ce temps risquait de laisser des traces. Il avait peut-être échappé à la grippe une fois par miracle, mais sa santé n’était plus la même qu’en Août… S’il essayait de ne pas y penser, il parvenait difficilement à ne pas frissonner…. Prendre un taxi aurait probablement été une solution plus sage, mais après avoir jeté sa canette dans la première poubelle venue, il s’engagea machinalement vers le métro… Rentrer. Il devait rentrer.
:copyright:️ MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Mar 7 Avr - 13:55
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Naomi ✻ when stars are away
« Plus encore que d'ignorer qu'on pouvait aimer quelqu'un aussi fort, je ne savais pas que ce serait possible pour mon coeur de battre comme ça avant toi.
Tu vas peut-être trouver ça ridicule, sûrement en fait, mais... enfant, je l'ai ouvert ce dictionnaire au verbe aimer. La définition, je l'ai lue et relue comme si ça allait finir par entrer dans mon coeur et que je pourrais y comprendre quelque chose.
Oui, je l'ai même cherchée dans les dictionnaires des autres langues que j'ai étudiées.
Si on m'avait dit qu'il suffisait d'attendre de te rencontrer...
Si mon coeur avait su que ça lui ferait toutes ces choses...
Est-ce qu'il y a un entraînement pour les coeurs comme le mien ?
Une préparation... ou quelque chose ?
Ce n'est pas vraiment important... sans hésitation, je te l'ai laissé, il sera toujours à toi....
Mais tu sais, même si je ne l'ai plus, maintenant dans ma poitrine, j'ai l'impression qu'il a laissé quelque chose pour me torturer.
Cette douleur, d'être loin de toi... je sais qu'elle ne s'arrêtera jamais.  »

Oui. Les étoiles, il aimait vraiment ça.
Quelques secondes après avoir lu ce commentaire posté sur une photo qu'il avait mis sur son compte instagram une minute plus tôt, ses lèvres n'avaient pas su s'étirer dans le sourire qu'elles auraient dû former.



H&J_osh
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
C'est magnifique, comme à chaque fois. Je ne regrette pas de m'être abonné ! Mais dis-moi, encore un ciel étoilé ? Tu dois vraiment aimer ça les étoiles !

Il y en avait eu d'autres après ça, mais il ne les avait plus lus. Ses yeux s'étaient perdus dans sa photo comme ils l'avaient fait dans le ciel la nuit dernière. Depuis qu'il les avait remarquées enfant à travers la fenêtre de sa chambre, ces étoiles, il les avait aimées. Il avait cherché à s'en rapprocher sans en être capable. Comme un drogué en manque de lumière, il n'avait jamais su en saisir la clarté et il savait que sa main pourrait s'obstiner à se tendre, elle n'en n'attraperait jamais aucune. Non. Mais elles lui plaisaient quand même. C'était la seule chose qu'il aimait que son père ne pourrait jamais casser. Elles seraient toujours là, dans ce ciel, même les soirs où les nuages les cachaient... elles finissaient toujours par revenir pour apporter un peu de lumière.
Est-ce que c'était parce qu'il les aimait de loin qu'elles pouvaient briller en sécurité ?

Alors, quand était-il de Mikio, cette lumière qui avait donné à son amour pour les étoiles quelque chose de différent ?
Il brillait toujours, quelque part... n'est-ce pas ?
Quelqu'un comme lui ne pouvait pas s'arrêter de le faire....
Lui, tel Icarus, auquel il avait emprunté le nom pour ce compte instagram, il ne pourrait jamais trop s'approcher d'une telle lumière.
Oui, la mythologie, il avait toujours aimé ça aussi. Et ce nom lui avait semblé évident quand il s'était décidé à poster ses photos sur un compte sans trop de raisons. Il n'avait pas besoin de reconnaissance, il l'avait juste fait... comme la plupart des choses aujourd'hui. Comme s'inscrire dans cette école d'arts....

Une toux l'avait ramenée à la réalité et sa main s'était portée à sa bouche pour l'étouffer tandis que l'autre avait atteint la bouteille d'eau. Il avait attendu de se calmer pour boire quelques gorgées de cette dernière avant de l'entraîner avec lui vers la cuisine. Là, c'était sur la tasse que son regard semblait s'être perdu. Dans ses souvenirs, il avait revu Mikio lui tendre ce chocolat chaud, il s'était revu le boire contre lui, prendre sagement cette cuillère de miel et il s'était rappelé de son affection. Mais sur sa peau, il n'avait senti aucune caresse. Et bêtement, encore, il avait dû chasser des larmes de sa joue.
Renonçant à se préparer quelque chose de chaud, il était retourné, le pas faible, en direction du salon pour prendre la décision très "sage" de sortir un instant sur le balcon malgré la température trop basse. Un moment, en dépit de sa fièvre, il y était resté, appuyé contre la balustrade à regarder les étoiles.
Est-ce qu'il ne l'entendait pas la voix de Mikio ? Elle ne le disputait pas maintenant ?
S'il l'avait entendue, stupidement, il lui aurait répondu de venir le gronder ici.
Rien qu'une fois. Seulement rien qu'une fois. Il aurait aimé le revoir....
Mais parce qu'il savait qu'ils ne le devaient pas, que jamais plus leurs chemins ne se rencontreraient, il préférait se blâmer d'être trop idiot et laisser aller son imagination vers la stupidité.

Alors, comme souvent, comme chaque soir, avec ou sans microbes, il était rentré pour se laisser tomber dans son lit. Avant d'attirer la couverture pour se réchauffer, il avait attiré son ours en peluche pour y enfouir son visage. De longues secondes, il en avait respiré le parfum avant que sa main n'aille chercher la couette pour les couvrir.
Ses tremblements, qui ne s'étaient pas calmés, avaient été rapidement accompagné par une nouvelle quinte de toux et il n'avait pas eu le courage de se relever pour prendre quelque chose. Son seul acte de raison ce soir avait été de refuser de sortir malgré l'insistance de ses "amis". Il ne savait pas s'il serait en état d'aller en cours le lendemain mais il le souhaitait déjà pour pouvoir occuper ses pensées faiblement, jouer à Akira pour se forcer un peu....
Est-ce qu'Akira était souvent malade ?
Non. Akira avait une santé de fer.
Est-ce qu'il était Akira maintenant ?

Dans son ourson, ses yeux s'étaient fermés et tandis qu'il essayait de se faire envahir par ce parfum, il avait soufflé deux mots pour démarrer le début de son jeu de torture préféré « Bonne nuit Michan. » il était contre lui maintenant... en fermant les yeux, il arrivait à revoir les traits de ce visage qu'il affectionnait tant. Ce n'était qu'une illusion mais, dans sa tête, ses doigts s'étaient tendus pour l'effleurer. Ils avaient dessiné ce sourire puis ses yeux s'étaient perdus un peu plus avant de rencontrer les siens. Qu'importe les larmes sur ses joues à présent, son corps avait glissé sur le matelas comme pour se rapprocher d'un autre qui était bien trop loin de lui pour pouvoir l'atteindre.
Ce n'était que du vent. Dans la réalité, ce n'était que son ourson qu'il serrait contre lui et il n'y avait aucun visage à caresser. Il ne le retrouvait jamais... pas plus qu’il ne le pourrait demain... ou dans un an... est-ce qu'il serait toujours là pour prétendre respirer dans un an de toute manière ?
Il savait bien que non.
Et une fois de plus, il s'était bercé de l'idée qu'un jour, bientôt, quand ses yeux se fermeraient pour ne plus se rouvrir, ça aurait peut-être l'air plus réel que maintenant.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
« Je suis trop fatigué maintenant....
C'est bon non ? Si je ferme enfin les yeux....
Même s'il n'y a rien.
Même si c'est tout noir.
Cette douleur... je veux juste qu'elle s'arrête. »

Souffrir, il devait vraiment aimer ça dans le fond. Il en avait peut-être pris l'habitude.
Pourquoi est-ce qu'il se montrait aussi cruel avec son coeur ?
Oui, il avait toujours aimé l'Italie. Être un italien, pour de vrai, il aurait adoré ça. Cette langue, il la trouvait véritablement belle et il avait une affection toute particulière pour ce pays. Qu'il y revienne quelques jours, c'était normal.
Mais pourquoi fallait-il qu'il le fasse à Rome... en réservant le même hôtel dans lequel il avait séjourné avec Mikio, en demandant la même chambre... et en allant se perdre, une fois ses bagages posés dans tous ces endroits qu'ils avaient vu ensemble ?
Il n'en savait rien. Mais quelque part, il savait que dire qu'il l'avait fait sans y penser était un mensonge de plus. Il le réalisait maintenant.

... maintenant que ses doigts jouaient avec tous ces cachets sur la table de la terrasse de cette chambre.
S'il était là aujourd'hui, si la veille et encore aujourd'hui, il était retourné dans tous ces endroits dans lesquels ils s'étaient promenés avec Mikio, c'était bien pour arrêter de se torturer non ?
Il avait beau dire qu'il n'y avait pas réellement pensé quand il était parti sur un coup de tête de Dublin, que son retour était bien pris sur un autre vol... dans le fond, il devait le savoir, quelque part dans son coeur, qu'il se murmurait qu'il était temps d'abandonner maintenant.
Il l'entendait, cette petite voix qui lui répétait sans cesse qu'il n'avait plus envie de faire semblant. Que c'était ça ou abandonner... que retourner auprès de Mikio, il ne le pourrait jamais.

Alors il était venu là... parce que Tokyo lui était interdit. Dans les rues de Rome, il avait cherché les traces de celui qu'il aimait et il s'était torturé en se perdant dans des souvenirs. Mais imaginer Mikio trempé après cette chute dans une fontaine n'avait pas su le faire rire comme la première fois.
Se retrouver une nouvelle fois devant une autre réputée pour accueillir des souhaits, revoir Mikio jeter sa pièce... ne lui avait pas fait corriger sa première erreur en se permettant d'en lancer une à son tour.
Il avait tenté de reproduire chaque souvenir, il avait laissé ses pensées dériver vers chaque moment... même s'il avait bien conscience d'avoir tout gâché à l'époque. Dans ce lit, il avait essayé vainement de ressentir encore cette étreinte parfaite dans laquelle il aurait souhaité connaître son dernier soupir....

Mais il ne serait plus jamais réellement là. La personne après laquelle son coeur semblait courir, il ne la retrouverait jamais. De ça, il en avait toujours eu conscience, et pourtant, il persistait à se perdre pour laisser la douleur étouffer sa poitrine.
Si maintenant il avalait tous ces cachets, s'il se couchait dans ce lit qu'il avait autrefois partagé avec Mikio, est-ce qu'il arriverait à le retrouver ? Juste quelques secondes, même si ce n'était qu'une illusion plus forte... s'il abandonnait, est-ce qu'il aurait le droit de ressentir à nouveau, pendant une seconde de sa vie, que son coréen était près de lui et que tout n'était pas si sombre ? Est-ce que Mikio lui offrirait l'un de ses sourires ? Est-ce qu'on lui laisserait le temps de lui dire une dernière fois qu'il l'aimait ? Bien plus que ce que le chanteur devait penser....
Est-ce que ses bras, pendant ce temps trop court, il pourrait avoir la sensation qu'ils l'entouraient réellement ?

Il n'était qu'un idiot qui, par souci de fidélité, avait laissé sa main se tendre vers le téléphone de l'hôtel. Les tonalités auraient dû avoir le temps de lui faire retrouver la raison mais il avait attendu jusqu'à entendre ce « Allo », deux syllabes pour faire couler une première larme sur sa joue avant que ses yeux ne se ferment pour en entendre un second. Cette voix... elle lui manquait tellement.
Parle encore...
Ce troisième... il lui avait donné envie de mourir pour un quatrième.
S'il te plait Michan... parle pour moi...
Rien qu'encore un peu. Juste quelques sons... il avait besoin de l'entendre. Il lui manquait... il lui manquait tellement... est-ce que, contre sa vie, on le laisserait avoir quelques minutes dans ces bras... sentir à nouveau cette odeur... son odeur... pouvoir écouter les battements de son coeur, caresser son visage, ses lèvres, se serrer contre lui et respirer à nouveau avec un coeur qui s'affolerait... entendre sa voix un peu plus et lui réclamer une dernière chanson pour pouvoir s'endormir enfin ?

Si Mikio passait la porte de cette chambre à présent... est-ce qu'il serait assez fou pour lui demander, une fois encore, de ne plus le laisser se faire autant de mal ? ... de le retenir près de lui et de ne plus jamais lui accorder de décider de partir ?
« Nao ? »
Ce prénom. Son prénom. Celui qu'il n'avait plus entendu depuis tant de semaines... et prononcé par cette voix....
Il avait rouvert les yeux.
Est-ce qu'il l'avait bien entendu ?
Mikio venait réellement de l'appeler maintenant ou ce n'était que le fruit de son imagination ?

Comme s'il connaissait déjà la réponse à cette question et malgré son souhait de l'entendre encore, sa main s'était reculée de son oreille avec retard pour appuyer sur le bouton rouge du téléphone qu'il avait fixé bêtement pendant de longue secondes avant de l'abandonner sur la table.
« Nao »
C'était... c'était bien lui n'est-ce pas ? C'était bien sa voix qui venait de l'appeler non ?
Il ne l'avait pas rêvé...
Mikio...
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
« Depuis que je suis enfant, ça toujours été les mêmes questions en boucle....
Aujourd'hui encore je me demande pourquoi....
Pourquoi je suis là ?
Pourquoi je suis toujours là ?
Pourquoi je respire sans savoir le faire ?
Pourquoi je m'acharne alors que toi tu n'es plus là.... »

Dans un rire, sur une remarque stupide de Dom, il était descendu de sa voiture. Son regard s'était d'abord tourné vers le soleil qui se levait puis vers la voiture de son ami où il n'y avait plus que son propriétaire et Derek. Ouais, il y avait du progrès, il n'avait pas conduit. D'accord, il n'était pas certain que ce soit le plus sobre qui soit venu le chercher ce soir pour le ramener ensuite, mais vu l'état de Derek à l'arrière, ce n'était clairement pas le plus mort qu'il l'avait fait. Complètement défoncé, son ami avait tenu un dernier propos étrange « Waaaaah, t'es vachement grand quand t'es debout. T'as vu ça Dom ? Il a plus de centimètres que ton... merde c'est quoi déjà. Hey, dans Aladdin, le génie, il dit quoi déjà ?  ». Se tournant un instant à l'arrière, Dom avait regardé son ami, ou son client, avant de secouer la tête pour reporter son attention vers Akira sur un « Akiladdin, roi des tapis ! Yo la carpette... » bref... « Ouais... on va ramener le gentil singe faire dodo. » un sourire en réponse et il fouillait dans sa poche pour trouver les clés de chez lui qu'il avait finalement tiré « Tu vas réussir à trouver le trou ? Quelle question ! Ça te connaît ! » vraiment pas très italien... mais, sans le reprendre, il avait hoché la tête avant de lever la main pour saluer ses deux camarades.
Et puis, sur le son d'une voiture qui s'éloigne, il s'était tourné vers le bâtiment qu'il occupait à présent.

Vu de l'extérieur, la bâtisse ressemblait à une grande maison jumelle avec ses deux voisines. Mais le tout était divisé en plusieurs appartements dont le sien qu'il s'était finalement décidé à trouver après un temps à l'hôtel. De l'épaule, il avait poussé la porte pour rentrer dans le hall et se diriger vers les escaliers. Au 1er étage, il s'était arrêté pour ouvrir sa porte qu'il avait refermée d'une main avant que celle-ci ne tâtonne maladroitement pour trouver le verrou et le tirer. Incertain, son pas était passé par le grand salon pour le mener jusqu'à la cuisine. Une main sur le visage qu'il s'était frotté, il avait tendu l'autre vers la cafetière. Une fois que le café s'était mis à couler, sa main était venue défaire les boutons de sa chemise. Il avait trop bu, rien qu'un peu. Il s'en était fait une nouvelle fois la réflexion. L'avantage... il sombrerait sans doute facilement ce soir... enfin ce matin, peu importe. Sa nuit ne serait sans doute pas parfaite mais il ne passerait pas tant de temps à lutter.

Café en main, il était retourné vers le salon, puis dans sa chambre dont il avait ouvert la fenêtre avant de prendre un boxer dans ses affaires. Sur la route de la salle de bain, il avait retiré sa chemise et terminé son café avant de finir de se déshabiller pour filer sous la douche. Propre, les cheveux bien évidemment humides, il avait abandonné sa tasse dans l'évier puis il était retourné à sa chambre pour trouver son lit. Etudiant un instant les cachets sur son chevet, il avait délibéré intérieurement sur la nécessité d'en prendre ou non.
Jugeant que ça n'avait de toute manière que très peu d'importance, il avait craqué une capsule pour porter le cachet à sa bouche et l'avaler en quelques gorgées.
Et puis, son ourson contre lui, il avait levé les yeux au plafond tout en laissant ce parfum agréable lui chatouiller les narines.

Encore une journée.
Et puis le jour d'après ça.
Et puis celui d'après sans doute.
Mais dans le fond, depuis qu'il était rentré d'Italie, il se demandait si ça n'aurait pas été plus simple de céder à prendre tout ce qui se trouvait sur cette table au lieu de n'en n'avaler que deux.
La voix de Mikio... ce "Nao"... est-ce que c'était ce qui l'avait retenu ?
Une faible dose pour quelques jours de sursis. Une bien faible dose pour un sursaut et se forcer à continuer encore un peu.
Akira s'en foutrait non ? A part l'école, qu'est-ce qu'il faisait de toute manière ?

Il avait des "amis", des "amies" aussi... il sortait pas mal... et puis... il prenait des photos, quand ça lui prenait il voyageait ... parfois, il allait aider dans ce refuge et il s'y perdait mais ça... ça... il n'était pas certain que ce soit Akira....
Dans le fond, il n'était qu'une autre version qui prétendait s'en foutre de tout.
Il s'en sortait mieux cette fois non ?
Oui... tellement mieux qu'il avait resserré son ourson contre lui et que ses yeux s'étaient fermés par souci de torture.

Ce soir encore, il pourrait les regarder, il penserait la même chose qu'à son retour... il aurait les mêmes impressions que lorsqu'il se promenait dans ses rues qu'il avait parcourues avec son coréen.
Il manque quelque chose à ces photos d'Italie.
Il manquerait toujours quelque chose aux endroits qu'il avait vus avec Mikio maintenant.
Là. Près de lui. Il manquait quelqu'un dont il n'avait pas le droit d'exiger la présence.
Dans sa vie, le vide qu'il y avait toujours eu avait pris une toute autre dimension.
Plus grand.
Plus douloureux.
Plus obsédant.
Impossible à cacher pour ce coeur qu'il prétendait ne plus avoir.

Dans sa vie, il avait eu le droit à une jolie illusion. Lui qui ne savait pas rêver, il avait eu le droit de le faire un temps.
Et ce manque, ce vide, il pourrait essayer de le couvrir sans fin, il n'y avait qu'une personne pour le combler. Qu'un sourire pour le soulager. Ces caresses, ces étreintes, elles ne pouvaient venir que de lui s'il souhaitait pouvoir respirer encore un peu.

:copyright: MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Mer 8 Avr - 12:48
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Gilbert & Jesus ✻ the end of Mimidonna
En actionnant la poignée, il comprit qu’il ne trouverait pas l’appartement vide. Umberto était venu l’accueillir bien sûr, sa queue battant plus ou moins rapidement l’air, gratiffiant la main que son papa lui présenta de quelques léchouilles affectueuses sans chercher pour autant à lui sauter dessus. Derrière son chien, Sally se joignait au salut d’un pas calme et gracieux, Jack sur ses talons dans un trottinement plus pressé. La première se frotta brièvement contre son tibias avant de regagner sa place aux côté d’Umberto. La seconde se tapis de l’autre côté du chien comme s’il s’agissait de son unique raison d’être. La scène, devenue familière maintenant, soutira néanmoins un léger sourire au Coréen qui ne pouvait qu’approuver la présence bénéfiques des deux chattes sur son fils. Peut-être qu’un jour, il retrouverait cette lueur espiègle et joyeuse dans son regard et cette enthousiasme débordant dans ses courses après le vent….

Mais à peine s’était-il fait cette réflexion qu’il s’était alors retrouvé nez à nez avec les problèmes. Cette expression mi-soulagée, mi-inquiète sur le visage de son nouveau coloc lui fit pincer les lèvres et la culpabilité noua son estomac. Hideki avait très certainement le droit d’avoir l’air contrarié… A sa place, il ne l’aurait pas été qu’un peu. S’excuser était la moindre des choses et il le fit, le regard un peu fuyant, l’air penaud, et une main peu vive derrière sa nuque pour trahir son embarras. S’il avait voulu jouer la mauvaise foi, il aurait pu rétorquer qu’il était majeur et qu’il n’avait jamais demandé de nounou mais il savait ô combien cela serait cruel pour son ami qui n’était effectivement pas obligé d’être là mais qui restait justement par affection et préoccupation pour lui. S’excuser et faire attention à l’avenir, voilà tout ce qu’il avait besoin de faire…

Il essaya bien de rassurer l’idole qui semblait plus qu’un peu contrarié en vérité, mais lui dire qu’il allait bien était un mensonge si gros qu’il se serait mis au coin tout seul. Il s’en voulait vraiment d’avoir fait peur à Hideki mais la fatigue n’arrangeait pas sa maladresse si bien qu’il avait simplement fini par se taire comme s’il se faisait réprimander par sa mère…
La discussion s’était finalement terminé sur un soupire de son cadet et l’information qu’il avait reçu quelque chose ce matin. Si Mikio s’apprêtait à s’en désintéresser tout aussi vite qu’on le lui avait annoncé, Hideki lui remis un petit paquet entre ses mains avant de le laisser tranquille. Il arqua les sourcils étonnés, étudiant brièvement ce colis qui n’avait ni nom ni adresse. « Qu’est-ce que… ? » essaya-t-il de demander. Mais le haussement d’épaule qu’il reçut pour toute réponse lui apprit que son ami n’en savait pas plus que lui.

S’il était curieux, il abandonna l’idée de l’ouvrir tout de suite. Il avait besoin d’une douche et ses mains étaient trop gelées pour parvenir à déchirer le paquet de toute façon. Alors il le déposa sur la table et disparu dans la salle de bain.
Ce ne fut qu’après une douche bien chaude qu’il revint dans le salon, sec et chaudement habillé. Il n’embêta pas plus Hideki, préférant se faire tout petit, et s’intéressa de nouveau à ce mystérieux colis qu’il emporta avec lui sur le canapé. Il n’y avait visiblement aucun mot qui accompagnait le tout, ni même l’indication d’à qui il était adressé. Il pouvait tout aussi bien être pour Hideki dans ce cas mais si ses fans avaient grillées sa nouvelle adresse, il n’y en aurait probablement pas eu qu’un. Quoiqu’il en soit, il le saurait probablement vite si ça ne lui été pas destiné… Encore fallait-il l’ouvrir !

Attrapant le plaid léopard derrière, il s’emmitoufla dedans et se cala un peu mieux sur le canapé, bientôt rejoint par Umberto qui se vautra à moitié sur ses cuisses. Ses doigts réchauffés flattèrent affectueusement la tête de son fils avant de parcourir une dernière fois le paquet puis d’en déchirer les coins pour en libérer une petite boîte. Elle ne payait pas de mine, mais le contenu sembla intéresser Umberto qui la renifla curieusement, la queue frétillante. Est-ce que c’était pour son chien au final ? Une friandise ou un jouet ?
S’il se posa la question, il trouva la boîte trop légère et se décida à ouvrir le couvercle sous le regard très attentif de son compagnon. A l’intérieur il ne trouva ni nourriture, ni jeux. En fait, il cru d’abord que c’était vide avant de retirer entièrement le couvre-chef.
Une photo. Voilà ce qu’il trouva. Cette découverte lui fit froncer les sourcils et il échangea un regard avec son fils avant de prendre le cliché entre ses doigts. Il se rendit alors compte que quelque chose l’”alourdissait” puisqu’elle se plia légèrement et Mikio dû la redresser pour mieux observer le ciel étoilé qu’on lui avait envoyé. L’expression toujours perplexe, il observa la photo en silence, remarquant ce qui ressemblait à un piercing accroché en son centre. Une étoile parmi les autres immortalisées… Son coeur bondit avant de se serrer.
Qu’est-ce que…. ?
Umberto se dressa sur ses pattes à côté de lui et colla sa truffe contre le cliché avant d’émettre un couinement. Mikio le dévisagea comme s’il venait de dire quelque chose d’impensable…
Et pourtant au fond, il partageait la même impression que son chien…. Une impression qu’il se refusait surement de voir comme une certitude….

Cette photo… Il eut beau la tourner et ne trouver aucune signature, son auteur s’imposa de plus en plus à son esprit. Parce que ces étoiles… Ca ne pouvait être que lui, pas vrai ? Mais… Comment ? Est-ce que lui comme Umberto se trompaient ? Est-ce qu’il le pouvait vraiment ? Ou bien était-il rentrer fiévreux au point de délirer ? Son coeur battait désormais trop vite dans sa gorge au point qu’il crut manquer de souffle.
Son regard s’échappa un instant, troublé, et croisa dans sa fugue la date sur le calendrier mural. 17 octobre… Ce constat n’arrangea pas cette oppressante confusion qui le tourmentait. Même s’il le sentait impitoyablement s’écouler, il avait perdu la notion du temps ces dernières semaines. Aussi s’en rendit-il tout juste compte…. Un an. Ca faisait an qu’il avait rencontré Naoki… Habituellement, il n’accordait pas plus d’importance aux dates mais il s’en souvenait bêtement pour l’avoir évoqué plusieurs fois avec son ancien colocataire, l’associant souvent à cette idée stupide de mariage… Et plus que tout, elle était gravée au dos de sa gourmette...

Est-ce que tout ça ne pouvait être qu’une énorme coïncidence ?

Il tenta d’éclaircir au mieux sa gorge nouée : « Hideki… ? Tu…. Tu n’as vu personne déposer ça ce matin ? » Son ton avait dû inquiéter son cadet puisque, même contrarié, il le vit apparaître dans l’encadrement la cuisine. Sa réponse négative lui fit reposer le regard sur le paquet déchiré… De toute évidence, il avait été déposé en personne dans sa boite aux lettres…
Est-ce que…. Est-ce que Nao était rentré au Japon ? Cette idée le secoua si fort qu’il en eu le vertige. Ses doigts serrèrent plus fermement la photo et qu’il scruta de nouveau comme si la réponse était marqué dans les étoiles…

Il n’avait aucune idée de comment ce paquet s’était retrouvé ici mais il était certain qu’il s’agissait de Naoki. Aussi certain que son fils venait de couiner une seconde fois.
Mais pourquoi encore ?
Qu’est-ce que ça voulait dire ?
A quel jeux jouaient-ils tous les deux ? C’était autre chose que le chat et la souris… Plus confus et douloureux…
Est-ce qu’il devait prendre ça comme le cadeau d’un anniversaire qu’ils ne fêteraient plus ? Il ne pensait même pas pouvoir célébrer quoique soit puisque Nao était parti…
Mais quoi ? Est-ce qu’il en recevrait un autre dans deux mois pour son anniversaire ?
Peut-être aurait-il droit à un autre appel cette fois… Mais des explications, il ne fallait visiblement pas trop en espérer.

Sa main se serra nerveusement sur le plaide. Le désespoir se mêlait à l’agacement et la confusion… « A quoi tu joues Nao… » Une sensation froide et humide lui fit tourner la tête, surpris. C’était Umberto qui semblait vouloir le consoler d’une caresse de la truffe… quand sa queue pourtant ne s’était plus agité comme ça depuis longtemps. Il y en avait un qui visiblement se réjouissait que papa ait écrit. Enfin “écrit”.... Il caressa doucement la tête de son chien qui se coucha de nouveau sur lui.
Il aurait préféré une lettre. Quelques mots… Mais il n’avait qu’une photo faussement anonyme. Et ce bijou…
Qu’est-ce qu’il devait penser ?

Si Nao ne voulait plus rester à ces côtés, s’il tenait tant à se cacher de lui… Pourquoi le torturer avec ce genre de chose ?
Et s’il l’aimait comme il le disait… Pourquoi ne pas juste revenir ou l’appeler ?
Qu’est-ce qu’il devait comprendre avec ça ?
Qu’est-ce qu’il devait faire ?

Au bout de quelques minutes de questionnement, il se rendit compte que les étoiles étaient devenues floues et sa main tenant toujours fermement le cliché tremblait. Les nerfs lâchaient une fois de plus et tout ce dont il fut capable à cet instant fut de coller cette photo contre son front comme s’il était capable de serrer un ciel… un ciel sous lequel il voulait aller…
Retrouver et surprendre son photographe avant son cliché…
L’enlacer désespérément et peut-être lui hurler d’arrêter… De ne plus faire ça à son coeur… Le supplier de revenir… De rester près de lui…
De mettre fin à cet espoir de moins en moins supportable….

« Idiot…. Idiot… Pourquoi tu comprends pas…. ? C’est de toi dont j’ai besoin…. »

Ce qu’il devait faire à cet instant, il n’était pas capable d’y songer correctement. Tout ce ce qu’il pouvait faire, c’était étouffer vainement ses sanglots qu’il n’avait su cacher plus longtemps aux habitants de l’appartement…
Plus tard, il s’excuserait  à nouveau auprès d’Hideki qui devait subir ce genre de scène trop souvent à son gout… Mais surtout, il appellerait Ren puis Keira pour savoir s’ils avaient eu des nouvelles de Naoki et s’ils savaient s’il était rentré au Japon. Tous les deux mentiraient. Mikio ne saurait rien de plus.

Malgré la douleur, ce piercing, il finirait par le porter. Parce qu’il venait de Nao… Parce qu’il était assez bête pour songer qu’il l’avait choisi en pensant à lui, qu’il l’avait touché de ces mains qui lui manquaient… Parce que quelque part, ce piercing le rattachait à lui…
Quant à cette photo, elle finirait accrochée au mur jouxtant le lit dans lequel il feignait de dormir. C’était le nouveau ciel qu’il observait désormais. Plus petit, moins brillant… mais celui-là, il était certain que Nao l’avait regardé.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
« Arrête de baisser la tête ! »
D’un geste sec, deux mains encadrèrent son crâne pour lui faire relever le menton, l'empêchant de consulter plus longtemps son téléphone. Un râle mécontent s’échappa de sa gorge : « Mais sois plus douce toi aussi ! T’es pas obligé d’avoir la tendresse d’un camionneur… » A ce grommellement, un bruit tranchant et métallique s’approcha de ses oreilles et il eut un mouvement de recul : « Mais t’es folle ! » - « Tu vas voir si j’suis pas douce ! Arrête de bouger ou je te coupe l’oreille ! » Ciseau en main, la menace était claire. Mikio se leva d’un bond et s’empressa de prendre ses distances de quelques pas. Accusateur, il pointa son agresseuse de son téléphone qu’il serrait fermement. « Ca suffit ! Laisse tomber, tu m’approches plus Kana ! T’es cinglée ! » Un sourire déplaisant étira les lèvres de la jeune femme : « Oh ça va, reviens ici Mimi Geignarde. T’as des trous dans la tête, tu peux pas partir comme ça. » - « Je vais te… »

« Mitsune, Kana-chan… C’est prêt. »

Le métisse alors bouillonnant, se radoucit instantanément à l'apparition de sa grand-mère dans le jardin. Elle portait un plateau sur lequel étaient posées trois tasses fumantes aux arômes délicats, ainsi qu’une assiette au plus précieux contenu : des taiyaki. L’odeur délicieusement familière chatouilla les narines du chanteur et il adressa un sourire chaleureux à sa grand-mère adorée. « Merci Mamie, c’est gentil. »  Par l’odeur alléchée, il y avait aussi un Umberto sur ses talons, langue dehors, queue en l’air. Sa rencontre deux jours auparavant avec Mamie avait été un franc succès. Si cette dernière avait tout de suite trouvé le chien mignon, celui-ci avait surement eu un coup de foudre pour cette fine cuisinière pleine de bonnes attentions. Depuis, il semblait la suivre un peu partout dans cette nouvelle maison qu’il se plaisait à explorer. Une nouvelle occupation qui n’était pas de trop pour ce petit chien, pensait Mimi…

Considérant un instant son petit-fils, Mamie aborda un air un peu perplexe : « Tu as terminé de te faire couper les cheveux ? » C’était probablement une manière polie pour dire que ça ne ressemblait à rien. « Mais non j’ai pas fini mais ce gros beta sait pas tenir sa tête en place ! Il a le nez collé à son téléphone, » râla Kana à son tour en pointant le Coréen de ses ciseaux. « Si j’avais su, j’serais resté comme j’étais », marmonna-t-il.

Cependant, il se doutait que garder cet aspect désordonné aurait chagriné sa grand-mère. Il faut dire qu’il n’était pas arrivé avec une bonne mine. Hideki avait dû s’absenter quelques jours mais il avait insisté pour que son aîné aille voir sa grand-mère. Visiblement, l’idée de le laisser seul lui donnait bien trop de soucis…
Mikio pouvait le comprendre. Tout comme il ne pouvait nier qu’il n’avait plus vu sa Mamie depuis plusieurs mois maintenant… Lui qui lui rendait si souvent visite pourtant. Seulement, depuis la fin de l’été, l’emploi du temps du chanteur s’était compliqué. S’occuper de Nao lui avait pris du temps… jusqu’à ce que ce dernier s’en aille, se refusant ainsi toute visite chez sa grand-mère parce qu’il n’aurait su cacher son état.

Aujourd’hui, il ne l’avait toujours pas retrouvé. Il mentirait aussi s’il disait avoir meilleur mine. Mais Hideki lui avait justement rappelé qu’il fallait chérir et profiter des personnes qui nous sont chères. Nao n’était peut-être plus là mais il n’avait pas le droit de délaisser sa grand-mère pour autant. Il ne devait pas refaire une deuxième fois la même erreur…
Alors, même si l'appréhension avait tordu son ventre tout le long du trajet, il s’était efforcé de montrer une tête plus présentable à cette adorable femme qui lui avait ouvert la porte. Mais Mikio n’avait jamais été très bon menteur et  il était d’autant plus dur de tricher sur son état quand il marquait autant un visage… En vérité, il songeait au fond que même s’il avait su mentir, Mamie aurait su. Il lui avait suffit de croiser un regard pour qu’elle le prenne dans ses bras. En dépit de tout ce temps sans visite, elle ne le gronda pas. C’est un sourire qu’elle lui offrit tandis qu’elle attrapa le visage de son petit-fils entre ses mains pour l’examiner avec douceur… Il était fatigué, amaigri mais c’est dans ses yeux qu’elle y vit surtout son coeur brisé.
Elle l’avait invité à entrer, l’avait installé à la place qui était la sienne sur les coussins entourant la table basse, lui avait servi un lait chaud et, sans le brusquer, avec cette douceur qui lui était propre, avait poussé Mikio à se confier. Parce que ce n’était pas évident à dire, il lui avait fallut un peu de temps pour avouer que Nao était parti… et qu’il cherchait à le retrouver.

Mamie n’avait émis aucun jugement. Elle l’avait écouté puis posé sa main sur son avant-bras dans une caresse affectueuse. Elle savait, même sans l’avoir jamais vu, que ce garçon comptait beaucoup pour lui. Alors, elle lui avait doucement intimé de rester quelques jours ici. Elle lui ferait de bons petits plats, prendrait soin de lui et surtout… Son Mitsune lui avait beaucoup manqué.
Il aurait été bien cruel de refuser. Et il avait songé qu’une pause ici pouvait peut-être lui faire du bien… même s’il n’y avait qu’une personne qui pouvait réellement soigner son coeur.

Umberto, lui, s’était vu ravie de la nouvelle. Il n’avait jamais eu de jardin, avait droit à de nouvelles promenade, et tout un tas de nouvelles senteurs s’offraient à sa truffe. Et puis, Mamie était généreuse en câlin… Ses copines lui manquaient déjà mais il était plutôt bien ici. Il ne manquait que papa…

Le lendemain, son amie d’enfance et éternelle voisine japonaise, Kana, était venu leur rendre visite. Et elle avait été un peu trop heureuse de trouver Mikio ici. Mais même à elle qui n’était pas une fille très subtile, le chagrin du Coréen ne lui avait pas échappé. A sa manière à elle, elle avait cherché à comprendre et sûrement à aider celui qu’elle avait toujours aimé taquiner. Il était moins drôle son Mikiki avec cette tronche là.
Et elle avait alors fait remarquer que ses cheveux avaient drôlement poussé. « Il faut arranger ça avant que tu ressembles à Sadako » avait-elle alors gentiment proposé. Ce à quoi, Mikio n’avait finalement que haussé les épaules avant de répondre avec indifférence : « Fais ce que tu veux. »

Ainsi, ils s’étaient installés dans le jardin et Kana avait entamé de lui couper les cheveux. S’il avait cru à un moment de calme où il pourrait tranquillement arpenter les réseaux sociaux, il s’était lourdement trompé. Kana n’avait eu de cesse de lui relever la tête chaque fois qu’il se perdait un peu trop sur son téléphone ce qui avait eu le don de l’agacer chaque fois un peu plus. Kana avait un don, en fait.
Mais après cette pause sucrée, et bien que l’estomac du chanteur ne s’était pas rouvert à la gourmandise - ce qui ne l’avait pas empêché de prendre les taiyaki qui lui étaient destinés  - Mikio avait fait l’effort de se rassoir sur la chaise pour laisser son amie terminer. Pour autant, il n’avait pas abandonné son téléphone qu’il avait repris mais aussi réajusté à hauteur des yeux pour la sécurité de ses oreilles. Kana n’avait rien dit, elle s’était visiblement reconcentré dans sa tâche. Alors, lui aussi.

Il ouvrit de nouveau Instagram et reprit son lent défilement là où l’avait arrêté. Ce ciel était magnifique… mais il datait déjà de 3 mois. Il n’y avait pas eu d’autre publication depuis... Naokitty. Naoki… Il n’y avait que lui pour capturer de si belles images. Mais elles n’était pas seulement jolies. Elles étaient aussi profondes, bavardes et énigmatiques à la fois. Peut-être que personne ne pouvait réellement les déchiffrer à part son auteur…. Mais ça ne voulait pas dire qu’elles ne parlaient pas aux autres. Naoki et son appareil savaient capturer comme créer un sentiment… C’était entre autre ce qui plaisait au Coréen.
Pour autant, il avouait qu’il aurait aimé davantage de clichés moins profonds. Des photos plus banales, moins artistiques avec quelques selfies… Quoique l’on parlait de la tête de Naoki. Quoiqu’il en soit, il avait dû switcher sur son propre compte pour trouver ce visage qui lui manquait tant… Tantôt souriant, tantôt endormie, tantôt caché. Mais derrière ses mains, on devinait un rire, une joie… Un bonheur qu’il avait cherché à retrouver vainement dans quelques souvenirs figés. Longuement, au rythme métallique des ciseaux et des lamentations de son coeur, son regard et son esprit s’égarèrent…

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Calé dans le fond du canapé, il passa machinalement une main dans ses cheveux. La sensation de légèreté le perturbait… Il lui faudrait encore un peu de temps à s’habituer à cette nouvelle coupe. Au moins, le résultat n’était pas si catastrophique… Il lui donnait juste un genre un peu différent. Mamie disait qu’il était beau… N’était-ce pas le plus important ?
Balayant son trouble, il reporta son attention sur son téléphone et finalisa sa publication Instagram. Pour lui aussi, c’était la première depuis des mois… Et ce n’était pas la seule chose d’exceptionnelle. S’il avait hésité encore quelques instants, son pouce avait fini par toucher le bouton “partager” et une seconde plus tard, sa vidéo était en ligne. Sur cette dernière, il y figurait avec une guitare qui n’était pas Miyabi. Il ne posait pas. Les doigts sur les cordes produisaient bel et bien un son, une mélodie. Et ses lèvres… Oui. Elles bougeaient bien pour chanter.
Comment cette vidéo pouvait-elle existait quand il s’était pourtant fâché avec la musique au point d’en perdre son travail ? Lui qui ne touchait même plus à sa meilleure amie… Qu’est-ce que le poussait aujourd’hui à lui faire des infidélités ?

Mamie. C’était elle qui avait réclamé une chanson peu de temps après son arrivée. Et si Mikio s’était bien gardé honteusement de lui apprendre pour son boulot, il s’était d’abord montré réticent. Chanter, il ne le faisait plus du tout... Si un mois était pratiquement passé depuis sa dernière connerie en date, il avait forcé la sagesse pour Hideki mais pour ce qui était de la musique, il n’en avait vraiment plus le coeur. Peut-être que Mamie l’avait compris mais elle avait tout de même insisté. Ca faisait longtemps que Mitsune n’avait plus chanté pour elle… et elle était persuadée qu’il n’y avait aucune dispute qui aurait su briser cette relation pour toujours. En dernier recours, son petit-fils lui avait fait remarquer qu’il n’avait pas emporté sa guitare - ce qui n’arrivait pourtant jamais et qui était une raison suffisante pour s’alarmer. Seulement, Nagisa était plus persévérante qu’elle n’en avait l’air. Sûrement que le côté borné de son Mitsune, c’était elle qui le lui avait transmis.

Aussi lui rappela-t-elle l’existence de cette guitare, soigneusement rangée dans un placard de sa chambre à l’étage. Une guitare qui n’était pas toute jeune certes, mais elle l’était plus que Miyabi puisqu’il s’agissait d’un cadeau d’anniversaire de son adolescence. Elle  était destiné à remplacer la sienne qu’il laisserait à Busan lorsqu’il venait ici. Sauf que Mikio ne s’était jamais séparé de Miyabi et que cette pauvre guitare était restée bien seule dans sa chambre toutes ces années. Elle s’était faite oubliée jusqu’à aujourd’hui. Jusqu’à ce qu’ironiquement, ce soit Miyabi qui se retrouva injustement abandonné dans le coin d’une pièce.

Il avait fini par céder… Parce qu’il ne pouvait pas vraiment refuser quelque chose à sa grand-mère. Alors il était allé chercher cette fameuse guitare à l’étage. Bien qu’elle était désaccordée, ce à quoi il remédia très vite, elle était comme neuve et d’une belle couleur crème. Est-ce qu’il était vraiment trop stupide pour avoir le masochisme de penser à celle de Naoki ? Tous les prétextes étaient bons pour se faire du mal visiblement…

Mais ignorant les plaies aux creux de sa poitrine, il se fit violence pour faire vibrer les cordes… Malgré sa pause, il n’avait pas eu le temps d’oublier ce que ses doigts avaient toujours su faire… Il trouva bien vite un morceau à jouer et même une chanson puisque Mamie y tenait. Il mentirait s’il disait en avoir choisi une joyeuse mais il faisait avec ce que les restes de son coeur voulaient bien lui donner… Mamie n’avait cependant rien dit. Mikio s’était débattu entre peine et douleur mais malgré elles, il n’avait pas mis fin à cette démonstration. Il s’était paradoxalement obstiné, ou plutôt perdu… Et la guitare avait fini par se transformer en fond sonore mélancolique.

Il aurait été difficile de décrire ce qui s’était réellement passé cet après-midi là. Lui qui n’avait plus touché à la musique, voilà qu’il avait choisi de s’y noyer toute une journée. Ou peut-être était ce une bouée à laquelle il avait essayé de s’accrocher dans une dernière tentative désespérée… qui avait mûri dans son coeur blessé pour progressivement marquer les cordes. Sans même se poser une seule fois la question de si sa grand-mère en avait eu assez, il avait persévérer vers cette mélodie à la forme de plus en plus précise…
Il n’aurait su dire à partir de quel moment il s’était rendu compte qu’il composait… Sûrement à l’instant où il couchait les paroles sur le papier.

Nagisa quitta le salon pour rejoindre sa chambre, laissant son petit-fils absorbé par ces cordes. Ignorant les heures qui défilaient, il ne s’arrêta qu’au petit matin, lorsqu’il estima qu’il avait terminé ce qu’il n’avait pas vraiment prévu de commencer. Est-ce qu’il était satisfait de ce travail ? Il n’en savait trop rien. Si ce morceau paraîtrait plus que convenable à d’autres oreilles, il songeait qu’il n’avait pas vraiment de mérite pour avoir simplement laisser pleurer son coeur. Est-ce que ça lui avait au moins fait du bien ? Ca non plus, il n’aurait su dire sur le moment. Parce qu’il avait passé une nuit blanche de plus à penser à lui… à laisser son esprit voguer vers lui dans une direction inconnue… Et il s’était demandé encore pourquoi il était si loin. Et comment pouvait-il lui faire autant de mal sans être là … ?
Il avait besoin de lui… Il avait beau essayer, vraiment essayer d’aller mieux, il en était incapable. Naoki… Il était devenu si important pour lui… Vitale, en fait.

Mikio avait caressé une dernière fois les cordes avant qu’un vague sourire étire ses lèvres. Une triste ironie comprimait sa poitrine. Naoki était celui qui l’avait privé de cette envie de jouer en le quittant… Aujourd’hui, c’était son absence qui lui avait inspiré cette force brumeuse pour composer cette chanson.
Soupire. Naoki… Il était indéniablement sa plus précieuse source d’inspiration.

Sa grand-mère retrouvée, cette dernière s’était inévitablement montrée curieuse sur ce qui avait tant absorbé son Mitsune la veille et toute la nuit dernière. Le chanteur s’était montré d’abord hésitant… Mais il n’avait pu ignorer plus longtemps l’idée que son coeur fomentait en secret depuis le début. Cette chanson… Il se mentirait s’il prétendait qu’elle n’était pas pour lui. Qu’elle ne lui était pas directement destinée et adressée…
Alors, acquiesçant finalement, il avait demandé à Kana qui les avait rejoint de l’enregistrer.

En la postant sur son compte, il n’aurait su nier qu’il espérait qu’elle l’atteigne. Nao la verrait, l'entendrait…
Il ne savait pas ce qu’il pouvait attendre en retour. Sûrement rien... mais au fond, ça aussi, il ne pouvait s'empêcher d’espérer.

Un retour…
Une réponse…
Un signe…

Reviens à moi, j’ai besoin de toi…

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

“Très jolie chanson” Ce compliment venant de Takeo, Mikio aurait dû s’en sentir flatter. De même pour les autres en dessous de sa publication. Il avait reçu beaucoup de “j’aime” et de commentaires positifs, de quoi se sentir ravi. Le compteur de vus affichait également un nombre plus que satisfaisant. C’était très encourageant et s’il avait pris le temps d’en parler à sa grand-mère, elle aurait été absolument fier de lui.
Mais parmi tout ça ne figurait nul part l’unique pseudo qu’il souhaitait lire. L’unique personne à qui était réellement destinée cette chanson.

Naoki ne l’avait peut-être pas vu. Cela ne faisait que trois jours après tout. Il avait éventuellement autre chose à faire dans sa nouvelle vie, loin d’ici.
Oui. Ou plus certainement, s’il l’avait vu, il n’avait pas réagi et ne réagirait pas. Évidemment… Qu’est-ce qu’il pensait cet idiot de Coréen ? Que c’était si facile ? Il lui suffisait de poster une chanson dramatique et Naoki irait lui aussi de son petit like et pourquoi pas de son commentaire ? Mieux encore, ça lui ferait même changer d’avis et demain, il ouvrirait sa porte sur l’Italien.
Tsss. Mikio n’était pas aussi naif, non… mais quand même. C’était toujours pareil… Même s’il savait que c’était stupide, il ne pouvait s’empêcher d’espérer. Et même pas qu’un peu… L’idiot.
Il devait se rendre à l’évidence, cruel mais inéluctable. Au mieux, de cette vidéo, il n’en tirerait que des compliments… mais pas de miracle. Il pouvait poser son téléphone, il n’y avait rien à surveiller. Il ne recevrait ni message, ni appel…

Il laissa une main pendre mollement de la chaise longue dans laquelle il était installé, effleurant ainsi du bout des doigts le crâne de son petit chien allongé près de lui. Face à eux, la pluie rinçait le jardin. Mikio remonta le plaid sur lui. La baie vitrée les protégeait du froid mais ça n’avait pas empêché le frileux de frissonner. Les températures avaient bien chuté ces dernière semaines… et il le ressentait d’autant plus la nuit qu’il passait seul. Umberto avait beau se coller contre lui, il ne suffisait pas à réchauffer son coeur…
Dans la maison, il devina que sa grand-mère s’affairait en cuisine pour lui préparer un bon repas chaud. Elle s’obstinait à poursuivre cette mission de nourrir cet enfant devenu trop mince à son goût… et même si l'appétit n’était pas revenu, il faisait quand même des efforts pour manger correctement. On pouvait même le féliciter pour rester sagement ici… Hideki ne devait pas tarder à rentrer mais il savait bien qu’il se ferait gronder comme un gosse s’il revenait seul à l’appartement. Mieux valait rester là. Il ne faisait pas grand chose mais au moins, il se reposait.

Oui, il était sage. Oui.... Même s’il trouvait parfois - trop souvent - le moyen de se torturer. C’était un “jeu” un peu trop facile auquel il ne pouvait s’empêcher de jouer. Il ne lui suffisait d’un rien pour cela… Un mot, un souvenir… La plupart du temps, l’arme demeurait son téléphone. Il pouvait bien dire que parmi toutes les photos suggérées qui défilaient sur son écran, il voulait simplement à se changer les idées… mais au fond, ne cherchait-il pas toujours Naoki ? Dans une image, un nom, un lieu… Peu importe. Tous les moyens semblaient bons.
Alors cette fois non plus, il n’avait pas reposé son portable, parcourant ses suggestions une à une, un peu absent.

Un chien semblable à Umberto passa. Puis une guitare. Il reconnu sur une photo son ami Hyunsoo, entouré de tête qu’il ne connaissait pas. Il oublia d’aimer la publication et zappa sur une photo. Un ciel. Machinalement, son doigt glissa pour changer sur une autre photo. Puis il bloqua, fronçant les sourcils. Il y avait deux jolie coréenne dessus, sans le moindre doute des idoles d’un groupe que Mikio affectionnait en secret. Mais si son regard semblait les fixer, il ne vit en vérité aucune d’elles. C’était ce ciel qu’il lui était revenu en tête, en retard. Comme si l’image était passé trop vite et qu’il n’était pas sûr d’avoir bien vu. Il s’était senti soudain intrigué et le besoin de mieux examiner cette photo comme s’il s’y cachait quelque chose l’avait fait revenir en arrière. Cette photo…
A première vue, elle n’abritait aucun secret. Il s’agissait seulement d’un ciel arborant de vives couleurs, délicate palettes qui mélangeait chaud et froid. Mais si éclatantes qu’elles paraissaient presque irréelles et pourtant… le cliché ne semblait pas retouché. L’instant avait juste été capturé avec talent… Un instant précis qui devenait une scène onirique… subtile mais captivante…
Ou bien le fascinait-elle uniquement parce que le chanteur aurait juré qu’il en connaissait l’appareil ? Des ciels dans ce genre, il devait y avoir des milliers… Mais des aussi beau… ?
Immédiatement, il jeta un oeil à son auteur, s’attendant réellement à le reconnaître… Mais ce n’était pas son pseudo.
Icarus. Un frisson le traversa mais il n’avait rien avoir avec le froid de l’extérieur. Ce n’était pas son compte pourtant… si ce pseudonyme ne lui évoquait rien, il ne pu s’empêcher de songer que Naoki aurait sûrement su ce qu’il signifiait.

Mais il devait se tromper. C’était à cause de cette impression qui n’avait arrêté de se renforcer et qui lui faisait cruellement croire que cette photo avait une quelconque importance. Mais ce n’était qu’une coïncidence… Et ce sentiment-là venait seulement de son coeur de plus en plus désespéré. Comme quoi… Il pouvait bien essayer d’aller mieux, il perdait l’esprit en se convainquant de voir Naoki partout. Il était misérable au point de s’inventer lui-même de faux espoir désormais… Bientôt, il se mettrait à halluciner.
Il allait peut-être vraiment perdre la tête en fin de compte. Il se voyait déjà pendu à un téléphone qui n’émettait aucune tonalité. Répondre à des lettres qui n’étaient jamais arrivé.
Est-ce qu’il allait vraiment finir comme ça ?

Il souffla par le nez dans un sourire tristement narquois. Peut-être bien. Mais aussi certain qu’il aurait mieux fait de lâcher ce portable pour se dépêcher de faire autre chose, il avait préféré pousser le vice jusqu’à cliquer sur ce fameux pseudo qu’il ne comprenait pas.
Peut-être qu’il finirait maboule… mais au moins, il n’aurait pas rien tenté. Il n’aurait pas baissé les bras. Il l’aurait cherché jusqu’au bout… Il ne pouvait pas être certain qu’il ne le retrouverait pas s’il arrêtait.

Et puis il ne faisait rien de mal. Il parcourait seulement le compte d’un photographe, visiblement globe-trotteur et qui semblait aimer particulièrement les ciels étoilés… Il n’y avait rien de mal. Ni aucune raison pour que son coeur se mette à palpiter dans sa gorge.
Il aime les étoiles…  
Son pouce glissa sur l’écran pour amener une nouvelle scène nocturne. Splendide. Si profonde qu’il aurait pu se noyer dans cet océan d’étoiles… Comme il avait déjà chercher à le faire depuis sa fenêtre sans doute.
Did you look at them sometimes ?
A la description de la suivante, son coeur bondit. Ca ne voulait rien dire… vraiment rien. Il déraillait voilà tout… Sa pompe à sang était une idiote de croire que ces mots auraient pu lui être destinés.

Il poursuivit son défilement mais aucun répit ne fut accordé à sa poitrine car il apparut ensuite une première photo de Rome. Icarus… Ca devait peut-être vouloir dire torture dans une langue morte.
Surmontant ce premier coup, il comprit qu’il allait subir d’autre clichés italiens… Peut-être devait-il vraiment fermer cette application avant de se faire trop mal… Mais il ne le fit pas. Pousser par l’instinct ou le masochisme, il scruta la seconde photo, reconnaissant les alentours de ce cours d’eau qui passait deux rues plus bas que leur hotel… Ca non plus, ça ne voulait rien signifier… Mais pourquoi connaissait-il chacun des lieux immortalisés sur les photos suivantes ? Ce n’était pas seulement un sentiment de familiarité. Il y était allé… Avec Nao… Puis tout seul un mois plus tôt. Cette fontaine, il ne la connaissait que trop bien pour y être tombé le printemps dernier. Le Colisée bien sûr et… Ce panorama du Mont Palatin… C’était comme s’il y était retourné. Comme si sa mémoire s'était imprimée sur ces photos…
Ca ne voulait rien dire… Ces lieux étaient connus… n’importe quel photographe un tant soit peu doué aurait joliment capturé ces endroits…
Sans oublier la Basilique Saint-Pierre… Celle qu’il voyait depuis leur chambre… Cette même vue gravée sur cette nouvelle photo. Il sentit son coeur manquer un battement. Peut-être deux.
… Et tous les photographes louaient-ils le même hôtel ? La même chambre… ?

Les palpitations devenaient de plus en plus furieuses dans sa gorge et il était désormais bien incapable de fermer ce téléphone. Ce n’était peut-être qu’une illusion, une coïncidence vraiment cruelle, mais il ne pouvait s’empêcher de fixer toutes ces photos comme si les yeux de Nao les avait capturés avant lui. Naoki était à Rome. Icarus aussi. Peut-être s’étaient-ils suivi de près… Non… C’était trop gros…
Est-ce qu’il pouvait vraiment imaginer que… ?

Déglutissant avec peine, il reprit d’une main fébrile le déroulement des publications. Icarus quitta Rome pour une forêt plus sombre, brumeuse et… Etait-ce parce qu’il n’osait spéculer ce qu’il spéculait déjà que cette scène lui évoquait Naoki ? Il fabulait, il se faisait trop d’idées et ne réfléchissait plus correctement… mais il le voyait bien là, dans cette brume insaisissable, perdu dans ces bois sombres… Il s’y voyait aussi…

Mais ses réflexions coupèrent court lorsque la photo suivante s'afficha. Mikio entier se figea, jusqu’à ne plus sentir son propre coeur battre.
Celle-ci aussi, c’était une coïncidence ?
Cet escalier, ce ciel… Il ne manquait plus que le piercing qui y était fixé mais cet élément manquant qui ornait désormais l’oreille du chanteur, ne suffisait pas à le tromper. Cette photo… Elle était aussi accrochée dans sa chambre. Sa nouvelle fenêtre… Son nouveau ciel sur lequel il se perdait durant ses nuits blanches demeurant trop sombres…

Il ne fut plus capable de déglutir ensuite. Comme une évidence, Mikio trouva la date. 17 octobre.
Ca ne pouvait plus être une coïncidence. Pas ça. Pas cette photo…
Resserrant son téléphone de peur qu’il ne lui échappe, il se rendit compte que sa main tremblait nerveusement. L’autre vint emprisonner sa gourmette qu’il serra tout aussi fort. Naoki…  
Ca ne pouvait être que lui…Parce qu’il n’y avait jamais eu de coïncidence depuis le début. C’était Naoki qui l’avait appelé. Naoki qui lui avait envoyé cette photo le jour de leur anniversaire. Naoki qui postait désormais tous ces clichés sur ce compte… Et s’il n’avait rien su dire au téléphone, ni même joindre quelques mots à son courrier… Il semblait que quelques uns s’étaient échappé ici. Des mots qui lui étaient adressé n’est-ce pas … ?

Je pense à toi…
Comme un autre jour…
La première fois que je t’ai vu…
Je n’oublierais jamais ce jour…
J’aurais aimé que nous ayons plus…


Mikio sentit sa gorge se serrer et son coeur s’écraser.
Etait-ce la lettre qu’il aurait dû recevoir ce jour là … ?
Etait-ce les mots que Nao s’étaient refusés de lui écrire… ?

Peut-être dans notre prochaine vie…
Parce que nous nous rencontrerons encore, pas vrai ?


Ces mots-là… Mikio dû étouffer une plainte au fond de sa gorge.
Rien ne prouvait réellement qu’il s’agissait de lui… et pourtant Mikio en était certain. Parce qu’il connaissait ces mots-là.  Il les avait déjà entendu… Triste, perdu… Il avait souhaité être quelqu’un d’autre… Il lui avait demandé de l’attendre… Il était soul ce soir-là… Mais Mikio ne l’avait jamais senti aussi honnête et fragile…
Naoki le savait. Depuis le début… Il savait qu’il ne resterait pas. Il savait qu’il finirait par le quitter. Mikio le comprenait aujourd’hui… Il le comprenait d’autant plus que ces mots dissimulés par un tag, fracassait sa poitrine sans ménagement.
Une prochaine vie…
Il ressentait une urgence sourde. Une peur qu’il n’osait trop formuler et qui était pourtant trop difficile à se cacher désormais… Celle de perdre définitivement Naoki.
Il ne reviendrait pas. Pas de lui même en tout cas.
C’était ce que voulait dire ces mots… Même s’il semblait vouloir le contraire.
Revoir Mikio, le retrouver, tout recommencer. Nao en avait envie… Peut-être autant que son aîné…

Mais pour cette même raison qui échappait toujours au chanteur, il s’en privait. Sa seule façon de lui parler semblait être ce compte instagram sur lequel Mikio n’était visiblement pas censé tomber…
Ou peut-être que si…
Sinon… pourquoi l’aurait-il fait ?
Pourquoi ce cadeau et pourquoi cet appel ?
Ces faux pas… Est-ce que Mikio se montait la tête s’il imaginait que, quelque part, Nao voulait qu’il le retrouve ?

Son étoile. Naoki avait besoin de son étoile. Autant que Mikio avait besoin de la sienne… Elle s’était enfuie, puis perdue. Il ne la trouverait pas dans le ciel cette nuit… Mais il pouvait se servir de ceux qu’il avait semé pour retrouver son chemin. Parce que Naoki ne pouvait pas le faire tout seul...  Il avait besoin de son Coréen. Et ce dernier savait désormais que s’il devait renoncer, il était certain de ne plus jamais le revoir.

Alors, sans plus tarder et ignorant le vacarme assourdissant de son coeur paniqué, il ferma l’application pour ouvrir son répertoire au seul nom qui pouvait encore les sauver…
Peu importait l’heure à laquelle le téléphone avait sonné là bas, il n’entendit que deux sonneries puis l’accent caractéristique de son salut :

« Hi Mikio. »
« Alex.. J’ai trouvé quelque chose… »

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

« Je crois que je sais où se trouve Naoki… »
Assis dans le canapé, Sally dans les bras, Hideki dévisageait son aîné de ces deux yeux ronds. « En fait, j’en suis quasiment sûr.. » L’interrogation était évidemment passée dans son regard et il avait ouvert la bouche, probablement pour prier le Coréen de lui en dire plus. Mikio se tenait debout devant lui, fébrile. Ses doigts bougeaient nerveusement contre sa cuisse, comme un pianiste sénile qui ne savait plus très bien où se situaient les touches. Pour autant, perçait dans sa voix un sentiment que l’idole n’avait pas entendu depuis qu’il avait débarqué à Odaiba. Pas même à l’annonce de ce départ précipité pour Rome, des semaines plus tôt.
Il y avait certes une excitation compréhensible, mais plus qu’un nouvel espoir, Mikio semblait même en craindre la certitude. Hideki pu comprendre pourquoi tandis que le chanteur lui parla des photos. Leurs styles, les dates qui correspondaient. Mais il y avait surtout cette photo là, reçu le 17 octobre. Paris, Rome, Londres… Naoki avait visité bien des pays mais : « Alex dit que la plupart des photos ont été postées depuis Dublin… C’est très probable qu’il y soit encore… »

Ils étaient restés une bonne partie de l’après-midi au téléphone ce jour-là. Alex avait parlé dans une langue inconnu au Coréen mais il avait compris que l’anglais avait fait quelque chose comme retracer les adresses IP des clichés. Puis de retour à l’appartement, la veille, il y avait eu ses nouvelles photos qui étaient venues alimenter le compte. Des photos très sombres qui n’avait rien de réjouissant. Mais elles provenaient toutes de Dublin ce qui laissait parfaitement penser que Naoki était effectivement toujours là-bas. En Irlande.
Est-ce qu’il avait décidé d’y élire son nouveau domicile ? C’était difficile à dire avec Naoki… Cependant, Alex avait trouvé un certain Kobayashi Akira, inscrit dans une école d’art où l’on enseignait la photographie. Ca ne pouvait être que lui. Et cela voulait aussi dire que Nao avait prévu de passer plus de temps à Dublin qu’un séjour à Rome. Comme un pied à terre entre ses nombreux voyages…
Pourquoi là-bas, Mikio n’en savait rien. Mais après trois mois à chasser le vent… il tenait enfin quelque chose.

Et cela, Hideki l’avait parfaitement compris. « Il faut que t’y ailles alors. » Évidemment. Il ne s’attendait pas à d’autre réponse de sa part. Et visiblement, son ami avait tout aussi bien saisi le caractère urgent de ce départ. Qui sait si Nao n’avait pas l’intention de repartir pour une nouvelle destination dès le lendemain…
« Je sais… C’est sûrement ma chance de le retrouver. » Sa seule chance… Alors pourquoi Hideki pouvait-il percevoir de l’hésitation chez le chanteur ?

C’était là. Maintenant que tout se jouait. Après tout ce temps, il avait enfin une piste solide, un véritable chemin à suivre… un moyen de mettre fin à toute cette souffrance…
Mais… Était-ce vraiment le cas ? Touchait-il vraiment au but ou… se trompait-il encore ?
Tous ces indices que Nao avait semé… Était-ce vraiment pour que Mikio le retrouve ?
C’était ce que lui voulait. De toutes ses forces. Mais qu’en était-il réellement ? Ne fonçait-il pas de nouveau dans un mur ? Et ce mur là… Oui… Celui-là, il ferait vraiment très mal. En fait… il n’était pas sûr de pouvoir s’en relever. S’il ne trouvait rien là bas ? S’il prenait simplement… la mauvaise décision… ?

Hésiter, il savait que ce n’était pas le moment de le faire. Hideki avait raison il devait y aller maintenant. Même s’il ignorait la veille encore où se trouvait Dublin, il devait foncer. Mais il y avait cette crainte, tapis au fond de son coeur qui le paralysait. Cette scène qu’il jouait en boucle dans sa tête depuis le soir où Nao était partie… Si au fil des mois, les décors avaient changés, la façon dont elle se terminait demeurait toujours aussi incertaine… mais de plus en plus terrifiante.

S’il retrouvait Naoki… mais qu’il refusait de le suivre… que ferait-il ?
A ce refus, il n’était pas certain de survivre.

Alors devait-il abandonner si près du but ?
Non. Bien sûr que non. Chaque fois qu’il se posait la question, la réponse de son coeur était paradoxalement la même. Renoncer à Naoki, il n’en était pas capable. De plus, il se doutait que son nouveau colocataire ne le permettrait pas non plus.

Hideki avait d’ailleurs quitté le salon et s’il s’était adressé au chanteur, ce dernier n’y avait pas fait attention. Il s’était simplement rendu compte de son absence au bout de… il ne savait pas vraiment combien de temps à vrai dire. Il s’était perdu dans ses pensées, finissant par s’assoir à son tour dans le canapé qui n’était plus occupé que par Sally désormais. Comme si cela pouvait l’aider, il ressortit son téléphone. A peine déverrouiller, l’écran afficha le fil de photo d’Icarus. Cette dernière série était si sombre… Il voulait espérer qu’il ne s’agissait que d’un devoir pour sa nouvelle école - quel genre de prof sinistre avait-il dans ce cas… ? - mais si ce n’était pas le cas, il avait sérieusement de quoi s’inquiéter pour son auteur. Pour Naoki…
… Ne s’inquiétait-il pas toujours pour lui ?
Si. Et c’était bien pour cela qu’il devait le retrouver. Ce sentiment d’urgence qui depuis la découverte de ce compte, ne l’avait pas quitté, ne faisant au contraire que croitre.

Mais il avait un autre problème et pas des moindre : aurait-il assez d’argent pour prendre un billet pour Dublin ? A vrai dire, il ignorait s’il avait déjà seulement assez pour le prochain loyer - dans la mesure où Nao ne l’avait pas déjà payé.
Il faut dire que deux voyages à Rome à si peu de mois d’intervalle, ça n’avait pas fait du bien à son compte en banque qui n’était déjà pas bien gras. Et aujourd’hui, plus alimenté… Quelle idée d’avoir perdu son travail aussi ! Il ne le répèterait jamais assez : il n’était qu’un crétin. Et ce n’était pas ses pauvres cours de guitare qui lui paieraient son séjour… Il n’avait plus d’élève de toute façon. A quoi bon quand on ne jouait plus sois-même hein ?
Mais bouder la musique, c’était bouder sa seule source de revenu. Et aujourd’hui, il n’avait d’autres choix que d’en trouver vite une autre s’il voulait partir pour l’Europe.
Trouver du travail rapidement… Non, ce n’était pas impératif, c’était impossible ! Il ne décrocherait aucun job dans l’heure et encore moins un qui payait à l’avance… Il était coincé.

Contre le sol, son pied tapait nerveusement tandis qu’il tournait et retournait le problème dans sa tête. Alors devait-il emprunter de l’argent ? Il rembourserait à son retour… mais ça aussi, ça lui semblait trop long. Il n’avait pas le temps d’attendre que la banque lui accorde un rendez-vous, ni de patienter un délais hasardeux pour signer des papiers… Pendant ce temps, Nao aurait celui de s’envoler plus loin de lui encore.
Aujourd’hui, il avait peut-être ce compte pour le tracer mais rien ne lui garantissait qu’il l’aurait toujours dans une semaine, peut-être moins. Et puis… Ces photos, ces mots… cette angoisse qui resserrait plus impitoyablement le ventre du Coréen…
Il devait trouver un avion. Au plus vite. Il prendrait la compagnie la moins chère, peu importe s’il voyageait en touk touk volant tant qu’il n’effectuait pas de détour qui le retarderait beaucoup trop. Il raclerait son compte jusqu’au dernier yens pour retrouver Naoki ! Et même s’il devait passer la nuit dehors une fois là-bas, il n’aurait qu’à camper devant cette maudite école et il finirait bien par tomber sur son faux Italien…
Il n’avait pas le choix. Voilà ce que tambourinait son coeur et son ventre. Peu importe le moyen, il devait s’y rendre. Peu importe sa peur, il devait le faire…
Il devait retrouver Naoki, comprendre et avancer. Que ce soit avec… ou sans lui.

Et tandis qu’il fermait l’application avec l’intention d’acheter ce fichu billet d’avion sur le premier site bon marché qu’il trouverait, une main qui ne lui appartenait pas, glissa fermement sur la table basse en face de lui.
Interloqué, Mikio releva les yeux pour en découvrir le propriétaire bien qu’il n’eut aucun doute sur son identité. Hideki fixait le Coréen avec un sérieux qui lui était rare… « ... ? » S’il l’interrogea du regard, ce dernier glissa vers cette main sous laquelle étaient coincés deux billets d’avion. Le coeur du chanteur manqua de s’arrêter mais son ami ne lui laissa pas le temps de dire quoique ce soit :

« Tu décolles pour Dublin demain alors va vite faire ta valise. »

Le choix, il ne l’avait définitivement plus.
:copyright:️ MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Ven 1 Mai - 16:03
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Naomi ✻ when stars are away
« Je me souviens de ce jour où tu es rentré dans notre appartement.
Je me souviens de ce soir où je t'ai entendu chanter pour la première fois.
Je me souviens du premier battement de coeur que tu m'as donné, aussi certainement que je me souviens du premier sourire sur lequel mes yeux se sont perdus.
Et je me souviens de ces fois où je t'ai souhaité dans ma vie sans avoir conscience qu'un vœu comme toi, il était impossible de l'imaginer.
De ce rêve que tu m'as donné, je n'ai rien oublié...
... merci Michan....
Ce sont ces mots, que j'aurais voulu écrire au dos de cette photo. »

Perdu quelque part dans la campagne irlandaise, il avait finalement arrêté sa voiture. La clarté qui commençait à faiblir, l'endroit et le soupçon que des paysages qui sauraient plaire à son objectif s'y trouveraient, l'avaient persuadé de tendre la main vers le siège passager pour prendre son appareil photo avant de descendre de son véhicule. Son téléphone dans sa poche, il s'était aventuré un peu au hasard en ne se souciant peu du risque de finir par se perdre.
Il avait pourtant déjà trouvé de quoi pour l'école et l'idée que le coin pourrait plaire à Mikio était stupide. Parce que ces photographies qu'il prenait, il ne pourrait jamais lui montrer.
Toutes... sauf une. Celle qu'il avait prise des jours plus tôt et qui était rentré dans ce colis direction Tokyo. Dans cette petite boite il y avait cette photo, sur cette photo il y avait scotché ce piercing qu'il avait trouvé, symbole d'une étoile et de la lumière que Mikio avait toujours représenté pour lui... et c'était tout. Rien de plus.
Ni mot.
Ni prénom.
Aucune signature.
... juste son incroyable stupidité.

Il n'avait pas pu s'en empêcher hein ? C'était plus fort que lui ? Oui, dans quelques jours, ça allait faire un an que Mikio était rentré dans cet appartement pour ce stupide entretien de colocataire.
Et si quand viendrait le 17 octobre, il passerait une journée à se torturer, une journée à faire semblant que Mikio faisait toujours partie de sa vie et qu'il se trouvait là près de lui... ce colis, c'était sans doute une connerie que de l'envoyer.
Bien sûr, il avait pris toutes les précautions possibles. Il arriverait chez Ren qui sortirait la petite boite emballée du paquet et qui irait la glisser dans la boite aux lettres de leur appartement le jour de leur anniversaire. Mais pour quelle raison il faisait ça ?
Ça lui tenait tant que ça à coeur de marquer l'occasion alors que cette année qu'ils n'avaient pas pu passer entièrement ensemble, ce n'était plus aujourd'hui qu'une belle illusion avec laquelle il ne cessait de se torturer ?

Aujourd'hui, pour la version officielle, il avait probablement fugué quelque part pour mener sa vie d'italien sans se soucier des autres. Mikio, lui... il espérait sincèrement qu'il était heureux... qu'il ne pensait plus à cet idiot qui un jour était parti après lui avoir menti une dernière fois.
Alors ce colis, il n'était peut-être pas trop tard pour l'arrêter.
Oui, ce piercing... il ne le voyait qu'à l'oreille de son coréen. Ce ciel sur lequel il avait posé cette étoile, comme chaque ciel, il le regardait en pensant à celui qui ne cessait de lui manquer et ne cesserait jamais de le faire.
Mais dans le fond, il le savait, vouloir faire ce cadeau d'anniversaire était idiot.

Et pourtant, il n'avait pas tiré son téléphone de sa poche pour rappeler Ren qui l'avait fait de son côté une heure plus tôt pour l'avertir de la bonne réception du colis.
Non, s'il le faisait, ce serait sans doute plus probable qu'il lui rappellerait les bonnes consignes avant de mentir à nouveau en déclarant que tout se passait bien pour lui.
S'il tenait un an de plus, est-ce qu'il ferait à nouveau un truc aussi stupide de ce genre ?
Ou même avant, pour l'anniversaire du chanteur dans deux mois.
Ne rien offrir à Mikio pour son anniversaire... pourquoi c'était si difficile que ça ? Aujourd'hui, il avait d'autres personnes pour souffler sa bougie et lui s'était rayé tout seul de la liste des invités.

Plus haut encore, il était monté le long d'un chemin mal entretenu jusqu'à juger que le cadre valait d'être retenu dans son appareil. Il avait levé ce dernier, il avait regardé le paysage à travers l'objectif, et il n'avait pas appuyé. Jugeant qu'un coucher de soleil rendrait ce paysage plus beau, il avait repensé à celui italien que ses yeux avaient partagé avec d'autres, ceux qu'il aimait tant.
Oui... cet endroit, Mikio l'aurait aimé aussi.
L'horizon qu'il guettait, elle lui aurait semblé bien plus belle maintenant avec son coréen à ses côtés.
C'était cette magie qu'il manquait à présent à ses photos.
Cette magie qu'il manquait à sa vie....
:copyright: MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Lun 29 Juin - 19:17
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Naomi ✻ When stars are away
L’avion était très tôt. Le réveil n’avait cependant pas été un problème quand il n’avait de toute façon pas trouvé le sommeil.
Hideki avait dû prendre l’un des premiers vol. Il savait parfaitement qu’il n’y avait pas de temps à perdre. Que Mikio retrouve Naoki, c’était la priorité. Tout ce qui comptait pour le chanteur. Mais il avait quand même accepté l’étreinte confuse et émue de ce dernier. L’idole avait reçu plusieurs merci étouffés et si Mikio avait fini par se détacher, c’était probablement pour ne pas lui infliger une nouvelle fois des larmes ridicules. Il en avait assez d’avoir l’émotivité d’une femme enceinte… Mais peut-être qu’il pourrait enfin arrêter d’être à fleur de peau bientôt. Dans quelques heures… Peut-être…

Bien évidemment, Hideki l’avait accompagné à l’aéroport. Ses bagages se résumait à un sac qui contenait le minimum pour un court séjour et … Miyabi. Il ne savait pas trop pourquoi il l’avait prise alors qu’il l’avait abandonné tout ce temps. Peut-être qu’elle le rassurait quelque part… Et qui sait, peut-être qu’elle serait utile pour mendier un toit si jamais il se retrouvait à la rue là-bas.
Papiers en main, il l’avait réajusté puis s’était avancé vers le premier point de contrôle où il avait dû se séparer de Hideki. Son ami lui avait souhaité bonne chance et lui, il avait répondu une énième fois merci. Merci pour tout… Il ne savait pas trop où il en serait sans lui aujourd’hui. Dans cette histoire, Mikio n’avait brillé d’aucune façon… Si une fois à Dublin, il retrouvait Naoki, il le devrait uniquement à Hideki et Alex. Les remercier, il le devrait et ce même s’il rentrait les mains vides.

Mais il n’avait pas le droit de l’envisager. Penser à un échec pourrait bien le précipiter et Hideki était le premier à l’obliger à penser positif. Alors, il s’était efforcé de progresser dans le couloir d’embarquement en se persuadant que “demain” il retrouverait Nao. Serrer la hanse de son étui et songer au moment où il poserait les yeux sur ce visage tant aimé, et ignorer la crainte d’un nouvel échec qui lui tordait le ventre. Il retrouverait Naoki… Il n’y avait pas d’autre issu possible. Dublin était sa meilleure chance, il ne devait pas la gâcher.

C’était ainsi qu’il s’était installé à sa place, suivant un peu absent les instructions de l’hôtesse. Et ce fut qu’une fois seul qu’il remarqua que l’environnement était loin d’être habituel. En fait, il crut même s’être trompé au point de vérifier sur son billet… Mais non. Il était bien marqué en première classe. Le vertige de la découverte attira inévitablement ses fesses dans le large siège - fauteuil ? - à l’obscène confort. Évidemment… Hideki n’avait pas fait les choses à moitié. Ah Il était loin du touk touk volant, clairement… Quoiqu’il fut certain qu’il s’y serait fait plus vite
Cela eu cependant au moins le mérite d’occuper son esprit la première heure suivant le décollage - qu’il n’avait même pas senti. Crispé, il osait à peine bouger craignant de casser le moindre bidule trop coûteux pour lui. Il se sentit même terriblement intimidé lorsqu’une nouvelle hôtesse vint s'enquérir de son bien-être, bégayant une réponse dont il ne se souvenait plus. Le personnel avait très certainement dû se demande ce qu’un gusse pareil foutait dans une classe qu’il ne lui appartenait visiblement pas.
Mikio aussi se posait la question.

La surprise passée - il n’irait pas jusqu'à dire qu’il s’était fait au luxe - il avait finalement concentré son attention sur le hublot. Au moins, le ciel ne changeait pas même en première classe. Dans son obscurité brillaient toutes les étoiles qu’il avait tant observé… Machinalement, il chercha Ophiuchus des yeux dans l’espoir qu’il le mène cette fois bel et bien à Naoki…

Est-ce qu’il allait bien ?
Est-ce qu’il l’attendait là-bas ?
Il se demandait, quelle tête il ferait quand il le verrait. Et lui… quelle tête aurait-il ?
Lequel des deux se fâcherait ? Lequel pleurerait ?

Ses doigts trituraient nerveusement le cuir de l’accoudoir, oubliant à quel point il devait être cher. Parce qu’il pensait à lui… et qu’il avait beau essayer, sa peur était aussi difficile à taire que le flux de ses pensées.
S’il n’y arrivait pas ? S’il ne le ramenait pas à Tokyo alors que se passerait-il ? Est-ce qu’il s’accrocherait ? Et si Nao le forçait à renoncer… ?
Il ne pourrait pas rentrer et continuer indéfiniment comme ça. Hideki n’allait pas vivre chez lui pour toujours…
Peut-être qu’il retournerait vraiment à Busan cette fois…

S’il devait dormir, il lui fut impossible de trouver le sommeil en dépit de la nuit dehors. Tout tournait en boucle dans sa tête. La paix, cela faisait longtemps qu’il ne l’avait plus trouvé… Naoki faisait réellement de lui un autre homme. Meilleur ou pire, il était difficile d’en juger dans son état actuel…

La fatigue l’emporta finalement au bout de longues heures de vol mais Morphée pris bien vite la fuite, effrayé par une hôtesse qui lui portait un encas et lui annoncer qu’ils atterrissaient dans une heure. La joie ne se lisait malheureusement pas sur le visage du Coréen… Il devait avoir une tête affreuse et des cernes monstrueuses.
Pas de doute, Naoki le fuirait aussitôt qu’il verrait, persuadé d’être tombé sur un revenant.

Mais malgré la fatigue, l’angoisse et le déboussolement, Mikio avait fini par atterrir à Dublin. La ville où, il voulait le croire de tout son coeur, Naoki se cachait… Et il avait trois jours pour le trouver. Le délais était court mais il ne pouvait pas se permettre plus… Et il avait une vraie piste aujourd’hui. Ça et les indications d’Alex, il pouvait le retrouver. Il le devait !
Franchissant le premier pas hors de l’aéroport, il aperçut un Irlandais qui lui faisait signe. Il comprit qu’il s’agissait d’un chauffeur qui l’attendait, probablement un coup d’Hideki et il le remercia silencieusement avant d’engager le pas vers l’homme. Ce dernier lui demanda où il l’emmenait, faisant probablement référence à un hôtel. Si Mikio fut dans un premier temps heureux de constater qu’il ne possédait pas un accent parfaitement barbare duquel il lui aurait été impossible de piger le moindre mot, il jeta ensuite un oeil à l’heure sur son téléphone lui indiquant qu’il débarquait en pleine matinée, avant de finalement donner une adresse.
Il ne s’agissait cependant pas de son hôtel. A vrai dire, il n’en avait pas réservé et s’il aurait été plus sage de chercher dès à présent un endroit où dormir, il avait préféré entamer ses recherches tout de suite… Aussi, le chauffeur prit la direction de cette fameuse école où Kobayashi Akira était inscrit.
Il devait mettre toutes les chances de son côté et peut-être qu’il retrouverait vite Naoki. Avec une sale gueule, mais il le retrouverait.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Poussant la porte de l’auberge, Mikio s’engouffra à l’intérieur puis retira sa capuche mouillée. Quelques goutes de pluie perlaient sur son visage fatigué et empreint de soucis. Rien. Aujourd’hui non plus, il ne l’avait pas trouvé.

« Ah ! Vous êtes enfin là ! J’étais inquiètes, je croyais que vous ne reviendriez jamais ! »

Cette exclamation irlandaise avait fait sursauter le Coréen, cherchant hâtivement la propriétaire de cette voix. Cependant, son regard n’eut guère le temps de fouiller quand la gérante s’était déjà plantée devant lui, lui arrachant un nouveau sursaut. Elle avait un air entre la colère et l’inquiétude affublé sur la figure, et les deux poings fermement plantées sur ses hanches généreuses.

« Ah… yes… I’m sorry… » articula-t-il péniblement, décontenancé. Il ne le fut que davantage tandis que la bonne femme l’ébroua vigoureusement sans se soucier de fameuse la nature réservée des asiatiques. Même si Mikio n’était pas particulièrement farouche, il ne s’attendait pas à se faire réprimander comme un gosse de dix ans par cette femme encore inconnue la veille. A croire qu’il faisait exprès d’inquiéter tout le monde en ce moment…
Quelle ironie - encore - quand il cherchait celui qui avait le don de le faire crever d’inquiétude…

« Il fait un froid terrible dehors et il pleut ! Vous comptiez passer la nuit dehors ?! »

Non, puisqu’il était là. Mais il n’avait pas eu le temps de s’en défendre - le choc, la fatigue et la langue étaient en autre les raisons -, la gérante le débarrassa de sa veste toute humide et le poussa d’une main ferme dans son dos vers l’étroit salon que formait deux vieux canapés imitation cuir et une grande table basse en bois usé.  « Allez, vous allez boire quelque chose de chaud sinon vous allez tomber malade. Pas de discussion, je ne vous le fait pas payer, allez allez, asseyez-vous ! » Alors sans être capable de protester, ses fesses avaient trouvé l’inconfort d’un des canapé et elle l’avait abandonné là.
Mikio cligna des yeux de longues secondes, incertain de ce qu’il venait de se passer. Sans rire… il venait vraiment de se faire passer un savon par une Irlandaise ?
… Est-ce que sa mère était venu jusqu’ici et s’était déguisée ?
Il devait avoir un don en vérité…

D’un revers de la manche, il essuya son visage qu’il garda cacher un instant. Quelques secondes de pause qui se conclut par un soupire las. Ca avait été une longue journée et il aurait préféré avoir le droit de s’éclipser immédiatement dans la chambre pour réfléchir puis essayer de dormir, quand bien même il se doutait que le sommeil serait capricieux.
Néanmoins, à peine émergea-t-il qu’il crut subir une nouvelle  attaque cardiaque. Face à lui était assis un gamin - le gamin de la patronne - qui le dévisageait comme s’il était un alien. Au moins qu’il attendait quelque chose… ? Mikio pencha légèrement la tête incertain de vouloir l’interroger. Il n’était là que depuis hier mais ce gosse lui était déjà un peu trop familier. Tim, s’il se souvenait bien de son prénom, se contenta cependant tout d’abord de sourire : « Faut l’excuser, » commença-t-il lentement comme s’il voulait s’assurer que le Coréen comprenne tout. « Y’a pas beaucoup de passages ici. Alors Maman a tendance à prendre grand soin des clients ». Est-ce que c’était une façon polie et détourner de lui faire comprendre qu’elle avait eu peur qu’il se tire sans payer ? Peut-être. Pas besoin d’être un grand analyste pour remarquer les clients se faisaient rares… La vétusté de l’établissement y était sans doute pour quelque chose. La disparition d’un touriste n’aurait pas été bon pour les maigre affaire de ce trou miteux…

Mais c’était tout ce qu’il avait trouvé, la veille, après un premier tour de la ville infructueux. Il se situait pas trop loin du centre et du quartier étudiant. Mais surtout, parmi tous ses concurrents bien mieux noté, il était le seul que Mikio pouvait s’offrir pour trois jours.
On était clairement loin de la 1ère classe en avion mais quelque part, malgré les matelas trop dur, les murs en bois qui craquaient effroyablement, et la nourriture à l’opposé de la gastronomie, ça lui convenait bien. Et puis, ce n’était même pas si mauvais.
Quant à la gérante, elle avait beau l’effrayer, elle ne l’avait pas fait assez pour le faire fuir. Et quelqu’en soit la raison, elle était véritablement aux petits soins. Bon à sa façon mais… elle n’était pas méchante non.
Enfin, il y avait Tim, son gamin de… 12 ans ? C’était ce qu’il lui avait semblé comprendre avant qu’il n’ouvre son moulin à parole. Il l’avait abreuvé de questions dont il n’avait pas pigé la moitié, la fatigue du voyage n’aidant pas. Alors comme il avait envie de le faire à ce même instant, il avait fini la veille par s’éclipser dans sa chambre pour trouver le repos.
Un repos rendu compliqué par sa voisine la souris qui préférait visiblement faire des travaux dans le mur la nuit… Mais peut-être que ce soir, s’il enfonçait suffisamment fort sa tête dans l’oreiller… ? Il avait déjà une sale gueule à l’arrivé alors s’il ne faisait rien pour arranger ça….

Mais ce n’était rien d’assez effrayant pour Tim qui avait ouvert de nouveau la bouche en dépit du mutisme de son vis-à-vis. Ce dernier finit par remarquer la tasse fumante face à lui et comprit que c’était le gosse qui le lui avait apporté. « Thank you. » Les yeux du môme s'agrandirent comme s’il découvrait que ce type sinistre savait parler. Mikio comprit à cette bouche qui s’ouvrait de nouveau qu’il n'échapperait pas à ses questions cette fois.

« Alors ? Pourquoi vous êtes rentré tard ? Vous avez trouvé ce que vous cherchiez ? Non vous avez pas l’air d’avoir trouvé… »

Non. Effectivement. Les sourcils du Coréen se froncèrent mais il retint toute remarque désagréable. On avait visiblement pas appris le tact à ce gamin… Mais qu’est-ce qu’il pouvait bien comprendre lui ? Comment aurait-il pu savoir qu’il remuait un couteau profondément planté dans sa poitrine depuis des mois ?

Non, il n’avait rien trouvé. Pas plus aujourd’hui qu’hier. Pourtant, il s’était bien rendu à cette école d’art que lui avait indiqué Alex. La veille, il s’était présenté à l’entrée mais on l’avait arrêté avant qu’il ne pénètre dans l’établissement. Pas de carte d’étudiant, pas de motif valable et surtout, clairement étranger, il n’avait pas eu le droit d’aller plus loin. Garder son calme, c’était ce que le Mikio que tous connaissait aurait fait. Il l’avait fait. Un peu… Avant de s’énerver sur cet abruti de rouquin qui s’obstinait à ne pas l’écouter sous prétexte qu’il n’avait rien à faire ici et qu’il ne parlait pas bien anglais. Mais bon sang, il avait des tas de choses à faire ici ! Il devait retrouver Naoki et ce connard n’allait pas lui gâcher sa seule chance pour une foutu carte ! Élever la voix n’avait servi à rien puisqu’il n’avait su que hurler en coréen. Passer en force non plus. Il s’était cogné à un mur et ce n’était sa faible force qui avait offert une noble résistance.
Et tout ce qu’il avait gagné c’était de se faire jeter dehors sans douceur. Quant à le menace d’appeler les flics, il l’avait très bien comprise et c’était probablement ce qui l’avait calmé. Non, il n’avait pas besoin de ça… Il avait été stupide, voilà tout. La seule personne qui mettait en péril sa recherche c’était lui. Alors, même s’il aurait été plus judicieux d’attendre sagement devant l’école depuis le début, il s’était éloigné à contre coeur pour ne pas s’attirer plus d’ennuis. Il s’était dit qu’il surveillerait le passage de loin et il avait entamé de faire le tour des café alentour en montrant la photo de Naoki, sans succès. Du reste de la journée, il n’avait jamais vu son protégé passer le portail de cette école.

Ce ne fut donc qu’en début de soirée qu’il se résolut à trouver un logement et qu’il posa ses bagages dans cette auberge. Et dépit d’une première impression assez brutale, Mikio avait finit par plus ou moins expliquer sa situation à l’aubergiste en baragouinant un anglais relativement moyen… mais finalement assez compréhensible pour que la bonne femme lui indique plusieurs endroits où chercher. Son toit valait ce qu’il valait mais elle se vantait de parfaitement bien connaître la capitale aussi bien qu’elle savait où se regroupaient les petits jeunes. Mikio en prit note et la remercia.
Le lendemain, il retourna quand même à l’école mais la trouva fermée pour une obscure raison. Si cela accrut la pression qu’il ressentait, il s’encouragea en se disant que c’était l’occasion de chercher parmi les lieux que la patronne lui avait indiqué.

Il se dirigea vers plusieurs café étudiant et fouilla les lieux des yeux à chaque reprise. Il n’y vit jamais le visage espéré… mais persévéra en exhibant encore la photo de l’étudiant aux employés. A un moment, une serveuse du Jelly Lemon Cafe sembla le reconnaitre. « Je n’en suis pas sûre… » avait-elle dit en tapotant sa bouche maquillée. Ses pommettes semblaient rosirent mais peut-être n’était-ce là que le maquillage. Elle scrutait la photo comme si quelque chose la dérangeait avant de conclure en secouant la tête d’un air désolé : « S’il est venu, ce n’est pas un client régulier… Je ne peux rien vous dire de plus, je suis désolée… » La déception avait pesé plus lourdement sur le coeur du Coréen mais ce dernier inclina simplement la tête, s’efforçant de se montrer compréhensif : « Merci quand même. » Mikio était ressorti avec l’étrange sentiment du demi-espoir incertain. Peut-être que Naoki avait passé cette porte de café, peut-être que cette jeune fille avait dévoré son Naoki des yeux, et malheureusement pour elle, elle n’avait pas pu y gouter plus amplement. Ou peut-être que ce n’était pas du tout lui et qu’elle se trompait comme elle l’avait potentiellement averti.
De même qu’il n’était peut-être pas dans cette maudite école et qu’il ne s’agissait que d’une grosse coïncidence. Mais il était forcément à Dublin, Mikio en était certain. Non pas parce qu’une force surnaturelle le lui dictait mais parce que son fugueur avait continué d’alimenter son compte instagram et qu’il avait posté un élégant cliché de la pluie contre une vitre, de voiture peut-être, voilant la ville d’un filtre parfaitement abstrait. Or, Mikio avait également passé son après-midi à chercher sous la pluie, s’abritant tantôt dans les cafés, tantôt se confrontant inévitablement à l’averse tandis qu’il fouillait les parcs et tout autre endroit qui aurait pu plaire à Naoki et son appareil photo. Alex lui avait par la suite confirmé que l’image avait bel et bien été publiée depuis la capitale irlandaise.

Néanmoins, s’il pouvait se rassurer de ce fait, il n’empêchait que sa longue recherche n’avait rien donné. Dublin était plus grand qu’il ne l’aurait cru et ce n’était pas comme à Rome où son chemin était déjà plus ou moins tracé. Ici, il errait bien plus de façon hasardeuse en invoquant une chance qui n’avait jamais été trop de son côté… Chercher Naoki ici, s’il n’était pas à cette école, c’était comme chercher une aiguille dans une botte de foin… Malheureusement, son bel Italien passait plus inaperçu qu’il ne l’aurait espéré. Mais c’était aussi sûrement de sa volonté… Il n’en savait rien à vrai dire. Et tout ce qu’il avait pu faire c’était arpenter encore et encore les rues de la ville, rentrant de temps en temps dans un établissement pour poser les mêmes questions, et ce jusqu’à ce qu’il songe qu’il vaille mieux pour lui de rentrer à l’auberge s’il ne voulait pas dormir dehors…

Et c’est ainsi qu’il se retrouvait à présent face à Tim, sur ce vieux canapé, une tasse de thé chaud dans les mains. « Faut pas être triste, tu vas sûrement le retrouver ton ami. » Mikio releva les yeux vers le gamin et constata que son regard était plus convaincu que compatissant. Le chanteur fronça les sourcils. « Comment tu peux en être si sûr ? » Il ne voulait pas rentrer dans ce jeu là, il ne voulait pas avoir l’air de se lamenter non plus. Non, il préférait véritablement être seul dans sa chambre à cet instant mais quelque chose dans l’expression de Tim l’avait poussé à poser la question. Ce dernier haussa les épaules comme si la réponse était évidente : « Vous êtes sur la même planète et probablement dans la même ville. Tant qu’il part pas au ciel, tu peux le retrouver. »
Mikio demeura interdit un instant. Ce n’était que les paroles d’un môme et pourtant, la boule dans son ventre se fit plus lourde. Nao… Il ne vivait pas sur la même planète que lui, il l’avait compris depuis longtemps. Quant au ciel, il avait bien trop tendance à le regarder…
…. Est-ce qu’il voulait le retrouver… son cerf-volant ?

Un brusque frisson le secoua et il déglutit péniblement, sentant la bile au fond de sa gorge. A quoi pensait-il ? Ce n’était pas le genre de positivité dont Hideki parlait… Il retrouverait Naoki. Il ne partirait pas au ciel, ni ne changerait de planète. Il allait le retrouver même s’il devait errer demain toute la nuit sous la pluie ! Il avait encore plein de café à visiter, de bar, de musée… Peut-être y avait-il d’autres écoles ? Ce n’était pas fini. Ce môme avait raison au fond : tant qu’ils étaient vivants tous les deux, rien ne serait fini.

« Dis… Tu veux bien jouer ? »
« Hein ? »
Mikio reporta son attention sur Tim. Son expression avait changé et il semblait que pour lui, ce sujet était clos. Il voulait jouer… ? L’embarras gagna ses traits. « I… hum… Too old… » s’était-il débattu, ruminant. Il n’avait ni le temps ni la force de s’occuper de ce gosse. Il ne devrait pas dormir à cette heure-ci ? Réprimant un soupire, il le vit secouer vigoureusement la tête : « Mais non ! Ta guitare ! »
Miyabi ? Mikio le considéra un instant. C’est vrai que maintenant qu’il y pensait, Tim avait semblé particulièrement intrigué par son étui à son arrivée. Il lui avait peut-être même posé la question à ce moment là mais le chanteur n’avait pas fait l’effort de comprendre, trop fatigué et abattu. C’était peut-être ce qu’il avait l’air d’attendre depuis le début…
Mais jouer, maintenant… Mikio n’en avait pas vraiment envie. Naoki n’était pas là pour l’entendre et ce gosse n’avait pas l’immunité de sa grand-mère. Il fit non de la tête. Ce que Tim n’entendit pas de cette oreille. Il insista. Se réfugier dans sa tasse n’y changea rien si bien qu’il poussa un soupire excédé avant d’accepter malgré lui, comprenant qu’il n’aurait pas la paix sinon. Tim sauta de joie et il entendit sa mère le réprimander depuis l’accueil.

Quelques minutes plus tard, après un aller-retour dans sa chambre - il aurait pu en profiter pour si enfermer mais pas sûr que le gamin l’aurait laissé tranquille -, il se réinstallait dans le petit salon, Miyabi sur le genoux et Tim face à lui pour seul public. Ses yeux pétillaient d’impatience et Mikio en eut presque le trac, sentiment qu’il n’avait jamais ressenti jusqu’alors. Peut-être parce qu’il n’avait plus posé les doigts sur Miyabi depuis longtemps. Peut-être était-ce la culpabilité… ou simplement la fatigue. Mais ses doigts légèrement tremblants finirent par pincer les cordes et il joua le premier [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] qui lui venait en tête. Un truc populaire, un truc qui collait bien à son coeur alourdi…

Tim ne dit pas un mot jusqu’à la dernière note. Il demeura même silencieux encore une longue minute avant d’applaudir doucement, presque sans bruit. Un sourire ravie barrait à présent son visage et Mikio en sentit tout de même une pointe de satisfaction. Ce n’était pas Nao… mais c’était ce qu’il aimait avant quand il jouait. Vivre la musique et la faire vivre aux autres.
Aujourd’hui, sa passion était fragile, meurtrie… Il voulait plus que tout retrouver son équilibre et celui-ci s’appelait Naoki.

Tim se mit à fouiller dans la poche de son pantalon légèrement trop grand pour lui - est-ce qu’il avait un grand-frère ? Mikio ne posa pas la question - pour en tirer à son tour un instrument. Petit, rectangulaire, il s’agissait d’un bel harmonica dont les contours de bois semblaient particulièrement travaillé. « Mon papa jouait de l’harmonica. » Il ne se rendit pas tout de suite compte que Tim parlait au passé. Ce dernier exhibait l’instrument comme l’on se vante d’un trésor : « Son rêve c’était d’avoir un bel hôtel où tous les soirs, des artistes et lui pourraient jouer de la musique et rendraient les clients heureux. » Mikio plissa les yeux, comme s’il cherchait à mieux entendre pour être sûr de bien comprendre cette histoire. « Un jour, il est parti au ciel. Mais il m’a laissé ça pour que je ne l’oublie pas… Tu sais jouer toi ? » Dit-il spontanément en lui tendant l’objet. Le coeur du chanteur eut un léger sursaut non sans un pincement. Ce gosse n’avait vraiment peur de rien… « Mon père vend des instruments de musique dans sa boutique », répondit-il avec une douceur qu’il n’avait pas prit le temps de mettre jusqu’alors. Il avait sûrement dû essayer de jouer de l’harmonica une fois là bas.
Son père lui manquait. Mais sûrement pas autant que celui de Tim lui manquait.
Avec délicatesse, il prit l’instrument assez intrigué. Il se demanda s’il s’aurait en jouer aujourd’hui… Il savait qu’il fallait souffler et aspirer. Aussi tenta-t-il plusieurs notes pour trouver ses gammes sous l’air absorbé de son jeune public. Après quelques minutes de teste, il récita un classique “Ah vous dirais-je maman” ce qui fit rire Tim avant qu’il n’applaudisse à nouveau, admiratif.

Ils jouèrent ainsi pendant une longue heure, se passant l’instrument afin de montrer chacun leur tour ce qu’ils savaient faire. La fatigue écrasait toujours le Coréen mais son coeur semblait avoir reçu un pansement pour la soirée. Celle-ci s’acheva lorsque Mikio monta finalement dans sa chambre, Tim sur ses talons pour lui souhaiter la bonne nuit et ces quelques mots toujours aussi confiant : « Tu vas retrouver ton ami. » Et sur ce, la porte se referma sur le visage de cet enfant plus sûr de lui que jamais.
:copyright:️ MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Ven 8 Jan - 15:53
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Naomi ✻ when stars are away
« Ce n'est pas un mensonge pas vrai ?
Ce sourire sur tes lèvres....
J'aimerais vraiment le voir maintenant....
Dis Michan, si un jour on me laisse devenir quelqu'un d'autre... est-ce que tu m'attendras ? »

« C'était vraiment un excellent travail Akira. J'ai un ami que j'aimerais que tu rencontres. Il voyage beaucoup mais il revient sur Dublin demain. La semaine prochaine ? Disons... hum mardi ? On mangera chez moi après les cours. Enfin, si tu n'as pas trop peur pour ton estomac. Il n'y a pas pire cuisinière que ma femme alors si tu ne te sens pas capable de dire que tu as mangé comme un Roi, ne viens pas. L'amour rend menteur et mon épouse a un très mauvais caractère. » tapotant avec affection son épaule, son professeur avait attendu une réponse de sa part « Pourquoi pas ? On en reparle lundi ? Je dois filer, j'ai un boulot à récupérer avant de partir. » tirant son sac pour y ranger ses affaires, il n'avait gardé que son appareil photo en main avant de répondre à l'identique au souhait de son professeur « Bon week-end. » et puis, le sourire aux lèvres, il était sorti de sa salle pour prendre la direction d'une autre.
Aujourd'hui, oui, il allait vraiment bien.

Est-ce que c'était à ça que ressemblait un véritable sourire ? Pour lui, sans doute. Tout allait mieux depuis quelques jours, depuis qu'il avait pris sa décision, il en avait en tout cas l'impression.
Il n'avait plus que quelques jours à tenir, quelques heures. Et parce qu'il faisait le bon choix, le seul possible pour lui, tout allait bien.... Ou alors, c'était simplement qu'il se sentait plus léger de savoir que lui aussi, enfin, il allait pouvoir se reposer. Il n'en savait rien, mais ça n'avait aucune espèce d'importance. Il n'aurait pas tenu beaucoup plus longtemps de toute manière.
Il lui restait quelques trucs à régler, il espérait ne rien oublier mais... si tout se passait bien, demain après-midi il quittait son logement à Dublin pour aller se perdre quelque part dans la campagne. Etrangement, il lui tardait. Même si c'était ses derniers instants, les dernières fois où il marcherait à la recherche d'un Mikio dont il ne retrouverait jamais la trace, il voulait croire qu'en s'endormant enfin, ce serait son visage qu'il verrait.

Dans sa tête, une fois de plus, il avait revu les détails pour cette dernière soirée avec son coréen.
Il avait la tente. Son sac était prêt et sa tablette chargée se trouvait à l'intérieur. Peut-être qu'il en viderait entièrement la batterie en se droguant des images et de la voix de son coréen mais il lui resterait toujours son téléphone après ça et sa batterie de rechange. Et puis, il choisirait probablement de dormir à l'aube, quand il n'y aurait plus aucune étoile dans le ciel et qu'il ne lui resterait plus qu'à rejoindre la sienne....
Il avait trouvé un joli coin, sans passage... oui, il serait bien là-bas. En sortant de l'école, il devait rejoindre les autres pour faire la fête, mais il n'avait déjà plus qu'une seule soirée en tête.

Pendant un temps, il avait songé à faire ça ailleurs. Quelque part au bord de la mer... parce que Mikio adorait ça non ? Et pour l'idée plus sombre qu'il ne se débattrait pas, qu'il ne se laissait aucune chance dans cette eau que lui ne savait pas dompter.
Mais quand il y pensait, quand il essayait de rester le plus longtemps possible en apnée dans sa baignoire, il savait qu'il ne pouvait pas. Tous ces "jeux" avec son père... il n'avait pas envie de partir en ayant aussi peur. Et puis, manquer de souffle alors qu'il en avait trop manqué dans sa vie....
Se noyer... il ne pouvait pas... rien que l'idée parvenait à l'angoisser et lui donnait déjà l'impression que sa gorge se resserrait sous le manque d'air.

Alors il s'était laissé deux choix.
Ces cachets qu'il avait acheté à Dom, ils feraient bien l'affaire.
Ou cette lame de rasoir qu'il avait déjà placé dans ses affaires.
Les uns ou l'autre... peut-être que le deuxième lui assurait plus certainement de ne se laisser aucune chance.
Tout ce qu'il voulait, c'était respirer enfin près de lui... sentir son souffle se ralentir dans ses bras... avoir l'impression trompeuse que c'était vers lui qu'il allait. S'il pouvait s'endormir en ayant l'illusion de le retrouver... pour toujours...
Il n'y avait que comme ça qu'il pouvait l'employer...

Dans un nouveau sourire, il avait remercié l'étudiante qu'il lui avait indiqué où récupérer ses clichés et puis, il les avait rangé soigneusement dans son sac avant de souhaiter à nouveau un  « Bon week-end. » aux étudiants présents dans la salle de développement. Des gens qu'il ne reverrait plus.
Sur le chemin de la sortie, il avait tiré son téléphone de sa poche pour consulter le message venant de Derek qui lui précisait le point de rendez-vous à deux pas d'ici, rapidement, il avait pianoté un "j'arrive".
Pour la dernière fois, il avait parcouru les couloirs de son école. Dans une autre vie, un autre Akira, ou peu importe son prénom, peut-être qu'il aurait trouvé une raison d'avancer ici. L'Art, ça lui avait toujours plu... il avait probablement un don pour aimer tout ce que son père détestait.... Mais étudier ici, s'il n'avait pas été si fatigué, s'il n'avait pas déjà trouvé la seule chose pour laquelle son coeur voulait battre... ou plutôt la seule personne... oui, peut-être qu'il aurait pu trouver un nouveau souffle et de quoi avancer encore un peu.

Maintenant, tout était différent.
L'école qu'il venait de quitter, il ne pouvait la regretter... quand il n'avait plus que si peu de temps à tenir.
Il avait essayé. Il avait réellement essayé. Ce droit d'abandonner, il l'avait gagné.
Et dans quelques minutes, quand son regard se poserait sur ce visage... son visage... peut-être qu'il penserait qu'on lui offrait déjà le début de son illusion...
... son rêve...
... le seul qu'il voulait faire....
:copyright: MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous
Jeu 11 Mar - 10:58
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Gilbert & Jesus ✻ the end of Mimidonna
« Ah ! Euh oui je le connais bien… Enfin, il vient ici de temps en temps avec ses amis. » Les incisives de la jolie barmaid s’étaient plantées dans sa lèvre inférieure, juste assez maquillée pour qu’on le remarque. Elle avait une étincelle déplaisante dans le regard tandis qu’elle prononçait le mot « bien », du genre à irriter le détective coréen parce qu’il y entendait des choses qu’il n’avait pas envie de savoir. Mais l’agacement en vérité n’eut pas le temps de bien se former dans son coeur, ce dernier avait bondit trop fort. Peu importe ce que signifiait ce « bien », le plus important c’est qu’elle l’avait vu. Et même plusieurs fois. Vraiment… Ce n’était pas une vague incertitude, la jeune femme était formelle. Elle l’avait vraiment vu…
Et plus. Mikio retira sa photo jugeant que la barmaid la scrutait un peu trop. Il la rangea dans sa poche puis reporta son regard sur elle et il sentit dans le sien une inquiétude nouvelle. Elle mordilla de nouveau sa lèvre avant de demander avec hésitation : « Mais… hum… Pardonnez-moi… Pourquoi le cherchez-vous ? » Il en aurait presque rit si elle s’imaginait qu’il lui voulait du mal. Non… ça jamais. Pourtant, là où elle n’avait probablement pas tort c’est que ces retrouvailles, si elles avaient lieux, ne se feraient peut-être pas tout en douceur.
Dans sa poitrine, son coeur cognait désormais bien trop fort. Ce qu’il lui voulait, cette jeune femme ne le comprendrait pas. Elle ne le pourrait jamais, comme beaucoup d’autres. Alors, il se racla légèrement la gorge et mentit : « I’m just… a friend. » Mal, certes. Mais n’était-ce pas le mensonge qu’il s’était raconté durant des mois avant tout ça ?

Il était parti tôt de l’auberge ce matin en dépit de sa mauvaise nuit. La soirée de la veille n’avait pas suffisamment apaisé son coeur pour que l’angoisse de la dernière journée ne le rattrape et le dévore toute la nuit. Alors puisque le sommeil ne voulait de toute façon pas de lui, il avait repris ses recherches au plus tôt - non sans engloutir un peu forcé un petit déjeuner préparé par la patronne. Il avait commencé dans les parcs, tremblant dans son écharpe sous le vent trop matinale, réajustant à mainte reprise son bonnet sur ses oreilles. Il avait erré dehors jusqu’à ce que les cafés ouvrent, puis il avait écumé les bars…
Il n’avait fait aucune pause mais son estomac était de toute façon trop serré pour réclamer à manger. La journée avait défilé si vite bien que ses recherches lui semblèrent interminable… Et à la vision du soleil déclinant, le désespoir l’avait envahi. Les larmes avaient menacé plusieurs fois ses yeux, refusant cette échéance… S’il ratait Naoki, plus cruellement encore qu’il ne l’avait raté à Rome… Le sort était-il contre lui ?
C’était ce qu’il avait commencé à se demander, le coeur si lourd qu’il peinait à avancer, jusqu’à tomber sur cette jeune femme derrière ce bar. Aussi certain que sa relation avec Naoki lui déplaisait, elle lui avait redonné une bouffée d’espoir. Peut-être aurait-il une chance de le retrouver s’il restait dans le secteur…

C’est sûrement cette vague réflexion qui le poussa à commander une bière et s’installer un peu plus loin. La table était reculée néanmoins, il avait une vue imprenable sur qui rentrait et sortait de l’établissement. C’était un pari risqué qu’il prenait.
A moins qu’il ne s’accorda qu’une pause. Un temps de réflexion. Un moment pour planifier ce qu’il allait faire ensuite tandis qu’il accusait encore cette preuve de la présence réelle de Naoki. Il savait qu’il était là, bien sûr. Il n’en avait presque aucun doute seulement… Il expérimentait enfin cette sensation tardive… celle de l’effleurer du bout des doigts… Il pouvait encore l’atteindre, n’est-ce pas ? Ou était-ce trop tard et il lui filerait quand même entre les doigts… ?
Qu’est-ce qu’il devait faire ? Camper ici ?
Oh sûr que ça allait la rassurer la barmaid. Quant à son avion… il comptait le repousser tant qu’il n’apercevrait le bout de son nez ?

Mâchouillant l’intérieur de sa joue, il alluma son téléphone. Il s’apprêtait à ouvrir l’application Instagram car jusque là, elle lui avait plutôt bien réussi, mais un groupe de jeunes entra sans discrétion dans le bar et attira l’attention du Coréen. Ses sourcils se froncèrent machinalement car ils étaient plutôt bruyants. Portant le goulot de sa bière à la bouche, il jeta un regard vers le bar et remarqua que la barmaid les scrutait. Pas parce qu’elle attendait qu’il commande mais parce qu’elle semblait chercher quelqu’un. Puis elle tourna les yeux vers Mikio, ouvrit la bouche… mais la referma aussitôt qu’un des types l’interpella au comptoir. S’il ne porta pas trop attention à leur conversation, il ne put s’empêcher de veiller à ce qu’ils n’importunent pas la demoiselle car il s’imaginait que c’était tout à fait le genre de la bande. Une fille accompagnait bien leur groupe mais elle avait l’air aussi mauvais qu’eux. Ils étaient visiblement là pour bien préparer la mine qu’ils avaient prévu de se mettre ce soir… Il intercepta un échange douteux entre deux d’entre eux, tandis que la fille roulait nonchalamment de l’herbe dans une feuille.
Mikio s’agaça d’un rire gras provenant du troupeau et poussa un soupire silencieux avant de reporter ses yeux vers son téléphone. Il composait le code de sécurité quand l’un des jeunes exclama avec enthousiasme un prénom légèrement déformer par l’accent… mais qui ne manqua pas de tilter aux oreilles coréennes.

« Where’s Akiwa ? »

Akiwa…. Akira…
Le coeur du Coréen manqua un battement. Peut-être deux. Il oublia même de respirer tandis que ses petits yeux se figèrent sur le groupe. Il chercha qui avait dit ça mais ça n’avait finalement que très peu d’importance. Il avait parfaitement entendu ce qu’il fallait entendre… Ces types… Evoquaient-ils l’Akira qu’il cherchait… ?
… son Naoki ?
Sa poitrine n’était plus que coups effrénés tandis qu’il songeait à toute vitesse. S’il les suivait ce soir… le mèneraient-ils à lui.. ?
Il n’avait rien à perdre à essayer.

Et le temps de tergiverser, il n’en eut pas vraiment. S’il ne saisit pas l’entièreté du débat - bien qu’il doutait que ça vole bien haut - il perçut une impatience monter au sein de la bande qui finirent par décoller dans un dernier salut beuglard à la barmaid. Instantanément, Mikio se leva à son tour, peut-être un peu trop vite pour que ça ne paraisse pas suspect. Heureusement, personne ne le remarqua si ce n’est la jeune femme qui lui jeta un coup d’oeil. Il la remercia précipitamment et sortit peu après la troupe.

Il s’ordonna de retrouver son sang-froid - celui-ci le fuyait bien trop souvent depuis des mois - afin de ne pas attirer plus l’attention. Il chercha les jeunes des yeux et les aperçut quelques mètres plus loin qui s’engageaient dans une allée piétonne. Mikio prit une profonde inspiration et entreprit de les suivre, conservant une distance convenable. Il ne devait pas les perdre de vue… Ils étaient peut-être sa chance…
Son poing se serrait nerveusement tandis que ses yeux refusaient de les quitter. Au bout d’une centaine de mètres, la band s’agite. Une vague de contentement les parcoure et la fille du groupe agite le bras frénétiquement. Leurs voix s’élèvent mais Mikio n’entend pas suffisamment bien pour comprendre.

Au loin, une silhouette longue et fine se rapproche du groupe. Le coréen ne distingue d’abord qu’une tête blonde et manque de s’en désintéresser… jusqu’à ce que la distance réduite ne rende un visage plus net. Plus près. Mikio s’arrête. Son regard aussi s’arrête sur lui. Son coeur s’arrête simplement.
Un sourire accueille ses camarades. Un sourire qui creuse une fossette dans sa joue. A cette distance pourtant, Mikio ne la voie pas vraiment mais il sait. Parce que celui qui se tient de bout avec eux, celui qui plaisante avec ces idiots… Mikio le regarde mais il est incapable de bouger. Il se rend compte qu’il s’est soudainement figé sur place. A présent, son coeur bat si vite qu’il certain de pouvoir en mourir.
Mais mourir maintenant… Non. Il ne veut pas. Tout comme il ne peut pas les perdre de vue tandis qu’ils s’apprêtent à repartir tous ensemble. Sans lui.
Alors il doit bouger. Bouger malgré ses jambes tremblantes, malgré l’émotion qui le submerge.
C’est lui. C’est vraiment lui.
Son coeur se comprime parce que ça ressemble à un rêve. Un rêve cruel qu’il a déjà fais cent fois. Alors soudain, il a peur. Peur de se réveiller. Peur que Naoki disparaisse à nouveau.

Ce fut sûrement cette peur qui le poussa à agir. Il ordonna à ses jambes d’avancer. Vite, sans courir. Pourtant, il n’avait jamais marché aussi vite de sa vie. Si vite qu’il se retrouva bientôt nez à nez avec celui qu’il visait, avant même de s’en rendre compte. Et quand ce fut le cas, son coeur explosa et le vacarme fut si assourdissant qu’il crut flancher. Mais il ne le fit pas.
Son visage… Il était si près que s’il avait tendu la main, il aurait pu le toucher. Le sentir à nouveau.
C’est lui… C’est vraiment lui…

Un long soupire s’échappa enfin de ses lèvres comme s’il s’était retenu de respirer jusque là. Comme un rire dénué d’amusement. Ses yeux brillants ne le lâchaient pas. Je t’ai enfin trouvé…

« Naoki… »

Et c’est tout ce qu’il fut capable de prononcer sur le moment. Il ne remarque ni les regards appuyés des autres, ni n’entendit leur réflexions. Naoki… c’était tout ce qu’il voyait. Tout ce qu’il voulait voir. Tout ce dont il avait besoin à cet instant…

:copyright:️ MISE EN PAGE PAR YOUNG.HEART.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
Revenir en haut Aller en bas
Sauter vers: