[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] -- c’était enfin l’heure de rentrer. wow. après avoir passé une matinée à servir des étudiants à moitiés endormis sur leurs cahiers. après une heure et demi à attendre dans une salle d’attente à lire des magazines pas intéressants parce que le téléphone ne captait pas et que le médecin avait pris du retard. après s’être fait écorcher encore une fois son nom et son prénom par la secrétaire, deux fois. tout ça pour un contrôle de routine de ses voies respiratoires et pour renouveler une ordonnance pour de la ventoline et des cachets. vive l’asthme, ça lui faisait vraiment passer de bons moments… entre toutes les crises qui lui faisaient littéralement cracher ses poumons, les médicaments à prendre tous les jours et qu’il ne pouvait pas se permettre d’oublier sans angoisser et les visites récurrentes et beaucoup trop longues chez le pneumologue, c’était vraiment un plaisir. le seul avantage, conséquent, c’était qu’il passait entre les filets du service militaire. et le jeune homme, il ne se voyait pas vraiment courir des kilomètres sous vingt kilogrammes d’équipements, le tout dans la neige au fin fond de la sibérie. non, quand il y pensait, il préférait passer une heure et demi à pourrir à l’hôpital quelques fois dans l’année, même si ce sera toute sa vie. ivyn bailla, marchant dans les couloirs presque déserts de l’hôpital. ce n’était pas surprenant, vu l’heure, vu le fait qu’il était le dernier nom sur la liste de rendez-vous de son médecin, il ne devait plus y avoir grand monde dans le bâtiment. à part peut-être ceux qui travaillent de nuit.

les mains dans les poches, ses écouteurs dans les oreilles ; c’est avec des pas plus ou moins lourds qu’il se dirigeait vers l’ascenseur qui le ferait gagner le hall d’entrée. le jeune homme avait hésité quelques instants à prendre les escaliers et à les descendre à pieds, ça lui ferait faire un tout petit peu de sport, mais se souvenir qu’il était actuellement au sixième étage de l’hôpital et avec sa barre d’énergie presque à zéro… hm. non. ses jambes et son petit cerveau ont préféré retrouvé le chemin de l’ascenseur, dans le calme. arrivé devant la cabine, il avait rapidement appuyé sur le bouton pour appeler la machine et il avait de nouveau baillé. une chose était sûre, dès qu’il aura mis les pieds à l’appartement, le russe s’écrasera dans son lit pour s’endormir. imitation parfaite de la baleine échouée.

ivyn fit un pas dans l’ascenseur, deux pas, et s’adossa contre le mur, appuyant sur le bouton qui l’emmènerait vers le rez-de-chaussée. aller, il fallait juste sortir de l’hôpital et prendre le métro pour rentrer à la maison. le jeune garçon avait déjà fait pire que ça. ses yeux avaient retrouvé le chemin vers son téléphone portable, étant tout seul dans la petite cabine.

il patienta quelques secondes avant de relever la tête, sentant l’appareil s’arrêter et les portes s’ouvrir. un regard rapide sur l’écran indiquant les étages le fit comprendre que non, il n’était pas encore au rez-de-chaussée. son corps et son expression se bloquèrent quand il voulu reposer ses yeux sur son téléphone, reconnaissant un regard qu’il ne connaissait que trop bien. bien sûr qu’il les connaissait par cœur ces yeux, ses yeux, vu le nombre d’heures qu’il avait passé à se noyer dedans. dong min. lee, dong min. ivyn restait immobile, seul ses pupilles suivaient le corps de l’autre homme qui s’engouffrait dans l’ascenseur, ne pouvant pas faire autrement. son regard s’était déjà glué à l’autre et il dut faire un effort considérable pour de nouveau fixer les portes de l’ascenseur qui se fermaient. on devait lui faire une blague. son cœur battait tellement fort dans ses oreilles qu’il n’entendait presque plus la musique qui résonnait pourtant presque à fond dans ses tympans.

aller, tout allait bien se passer. le russe allait juste faire comme s’il n’avait rien vu. le voyage n’allait durer que quelques secondes et il suffisait que le jeune homme prenne ses jambes à son cou pour se cacher hors de l’hôpital et tout sera oublié. juste quelques secondes. quelques secondes. mais il fallait croire que la chance n’était pas vraiment de son côté, aujourd’hui. un clic retentit. la cabine s’arrêta d’un seul coup. la lumière s’éteignit. génial. « пиздец… » pizdets, bordel, murmuré sous son souffle. on ne change pas les vieilles habitudes. c’était sortit tout seul, alors qu’il tirait d’un seul coup sur ses écouteurs pour les enlever de ses oreilles. résumé de la situation : il était dans une cabine d’ascenseur, à priori en panne, étroite, lui-même fatigué et surtout, surtout, avec cette personne très précise qu’était lee dong min. bien. c’était une caméra cachée, c’est ça ? quand est-ce que l’ascenseur, il redémarrait ? quand est-ce que le monsieur à côté de lui, il enlevait son masque ? quand est-ce que le présentateur, il débarquait avec des cameraman pour lui lancer un it’s a prank bro ! ?

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] -- il aurait très bien pu juste rentrer à la maison. sortir de l’hopital, prendre le bus ou utiliser ses jambes, puis rentrer au chaud à l’appartement qu’il partageait avec ses colocataires qui le prenaient tous plus ou moins pour la peluche de service avant de se coucher sous ses couvertures pour entamer une bonne nuit de sommeil ; sommeil bien mérité. il aurait certainement appelé jiwon en chemin, ne serait-ce que pour s’occuper la cervelle pendant qu’il avançait, vu qu’ils avaient toujours des tonnes de choses à se raconter tous les jours vu comment ils se comméraient tous les petits détails mêmes insignifiants de leur petite vie sans importance. ivyn aurait à tous les coups finis par ruminer sur son ex, comme à chaque fois, dès qu’ils auraient fini de se raconter tout et n’importe quoi. ivyn qui parlait de son ex, c’était un peu le sujet de secours au cas où. on pouvait se demander comment le pauvre jiwon pouvait encore faire pour ne pas devenir fou à force d’entendre toujours les mêmes paroles. c’était un peu le seul au courant de toute cette histoire : de comment ça avait commencé, comment ça s’était passé, comment ça s’était terminé et surtout, surtout, comment le jeune russe se sentait maintenant. il avait beau montrer à la face entière du monde que tout allait bien, en vérité c’était un peu le bordel dans sa tête, c’était toujours le bordel dans sa tête. certains soirs il pleurait sous sa couette, les yeux fixés sur son téléphone, espérant recevoir un message de sa part ; et c’était encore arrivé récemment, durant la semaine dernière peut-être.

la soirée qu’il s’était imaginé dans sa tête n’avait absolument rien avoir avec la soirée qu’il allait certainement passer, pourtant. à croire que le destin aimait s’amuser avec lui, aimait s’amuser à torturer les âmes tourmentées, aimait bien voir les situations plus que cocasses avoir lieu devant ses yeux. voir dongmin arriver dans la cabine étroite lui avait déjà tirer un souffle de force de ses poumons et il aurait tout simplement pu l’ignorer ; garder ses yeux sur son téléphone et ne rien dire, tout simplement attendre que l’ascenseur arrive et en sortir comme si rien ne s’était jamais passé. c’était bien une représentation de la fierté qu’il gardait en lui ; car s’il s’écoutait vraiment, il aurait pu se mettre à genoux devant l’autre garçon et le regarder, des larmes dans les yeux, pour lui demander ce qu’il avait fait de mal pour qu’il puisse s’en aller si subitement, qu’il puisse s’en aller sans même prévenir et sans aucune excuse ou raison apparente. mais non, ivyn, il en voulait trop au plus vieux pour s’abaisser à ces actions.

le destin avait décidé de le coincer. le destin avait décidé de lui planter une panne d’électricité pile ce soir-là, à cette heure-là, dans ces conditions-là. est-ce que c’était une chance ? une ouverture ? ou juste une façon de mettre encore plus le bordel dans sa petite cervelle ? le jeune homme ne pouvait pas trop le dire. il avait juré en sentant la cabine s’arrêter subitement. il ne savait pas comment réagir et au fond, il espérait que tout ça soit juste une blague. forcément il avait enlevé les écouteurs de ses oreilles, il avait levé les yeux et il avait attendu. aucun signe. bien, ça ne redémarrait pas. la voix de dongmin lui chatouilla les oreilles et le russe tourna les yeux vers lui. ça faisait presque bizarre de l’entendre à nouveau, après tout ce temps. ça faisait tellement… nouveau. « je m’inquiète pas… » il grinça un peu des dents, voulant garder cette façade de pierre qu’il préférait montrer. il lui en voulait. « ça m’a… juste… surpris… » c’était pas tous les jours que l’on se retrouvait coincé dans un ascenseur avec son premier et dernier amour, forcément. le russe ne savait pas vraiment quoi dire. entamer une conversation ? ne rien dire ? attendre que l’appareil redémarre de lui-même ? appeler les pompiers ? qu’est-ce que l’on faisait dans ce genre de situation ? « … huh… j’imagine que tant que la cabine ne s’écrase pas subitement sur le sol… y a pas à s’inquiéter… » bon, ok, peut-être qu’il s’inquiétait un peu.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] -- autant le dire, il avait toujours eu du mal avec les hôpitaux. ces endroits sur-désinfectés, où la mort y régnait à certains étages, où certains rêves se brisaient en à peine quelques secondes. il y était allé plusieurs fois, dans ces bâtiments, et jamais pour de très bonnes nouvelles. son père emporté par un cancer, sa sœur qui a dû stopper toute sa carrière à cause d’une satané blessure et lui-même avec ses bronches pas totalement fonctionnelles. sincèrement, ivyn pourrait très bien se passer de ses visites à l’hôpital, mais bon, il n’avait pas vraiment le choix ; il fallait se faire soigner ou alors on y passait. et sa mère était à cheval sur la question : la santé d’abord, non mais oh. donc forcément, quand il avait besoin d’aller vérifier son système respiratoire, il se fait harceler de message par sa petite maman pour lui rappeler encore et encore, tous les jours, que oui, ivyn, t’as intérêt à te dépêcher d’aller chez le pneumologue ou c’est moi-même qui t’y emmène ; cette phrase étant bien sûr ponctuée par un sale gosse, cela étant devenu un symbole d’affection pour la mère du jeune homme.

et pourtant, même si monsieur avait du mal avec les hôpitaux, il avait toujours eu un respect profond pour les gens qui y travaillaient. voir des gens malades et souffrir toute la journée, ça devait être dur et ivyn savait très bien qu’il n’arriverait pas à vivre une vie normale et paisible en exerçant un tel métier. déjà que c’était compliqué au starbucks à simplement servir des cafés à toute sorte de gens, s’il devait servir des médicaments à des gens en détresse, voir même à des enfants… il aurait déjà pété un câble. c’était pour ça qu’il avait toujours eu ce petit quelque chose pour dong min. parce que wow, il devait être courageux pour supporter de s’occuper de patients toute la journée, pour se prendre en pleine face, tous les jours, la vue d’autres personnes dans le mal. sincèrement, ivyn avait toujours été admiratif.

à l’époque, il avait toujours voulu faire en sorte d’être là pour lui, se disant que comme ça, il relaxerait un peu le poids psychologique qu’un tel métier pouvait peser sur un homme aussi jeune. peut-être que le russe diabolisait un peu l’occupation, mais vu le rapport qu’il avait avec le milieu hospitalier, ça restait compréhensible. aujourd’hui, à présent coincé dans cet ascenseur, il ne savait pas trop quoi en penser. ça se serait passé quelques mois auparavant, le jeune homme aurait fini par rire de la situation. forcément, finir coincé dans un ascenseur avec la personne qu’il aimait, ça pouvait être marrant. un peu inquiétant, mais marrant. ça faisait une petite anecdote dont on pourrait se souvenir un soir où l’on finit par parler de tout et rien ; tu te souviens du jour où on a fini enfermer dans l’ascenseur et qu’on a du attendre comme deux idiots en se demandant si on allait sortir ou pas ? non, là, maintenant, tout de suite, le seul rire qui pouvait sortir de ses lèvres seraient un rire ironique, amer. le hasard et toujours le hasard qui jouait avec ses sentiments.

mais bon, il n’allait pas rester là droit comme un piquet, à regarder les portes de l’ascenseur en espérant qu’elles finissent par s’ouvrir par la volonté du bon dieu. ivyn n’était plus un enfant. ou peut-être que si. qui était encore assez naïf pour penser qu’un ascenseur pouvait d’un seul coup se décrocher et s’écraser juste à cause d’une simple coupure de courant ? lui, et dong min marquait un point. il avait toujours été le plus sage des deux, après tout. ivyn posa son regard sur le plus vieux, rapidement, avant de se mettre à regarder le sol. « c’est possible… » il regardait trop de vidéos sur youtube, surtout. entendre dong min s’inquiéter pour lui le fit se mordre sa lèvre inférieure. il s’inquiétait pour lui. le jeune homme cligna des yeux avant de les monter vers le plafond. le russe ne savait pas où regarder. « mon asthme, visite de routine pour vérifier… » un léger soupire échappa ses lèvres avant que ses yeux ne décident de finalement réellement fixer dong min, de réellement le regarder. il était un adulte, il devait se comporter comme un adulte et ce même s’il avait envie de partir au quart de tour pour avoir des réponses ou se lamenter sur sa vie amoureuse qui avait dérapée. « … tu finissais ton jour, toi, j’imagine ? » l’uniforme dans les mains de l’autre garçon ne mentait pas, n’est-ce pas ? à la dernière question, le russe hocha doucement la tête, apportant une confirmation. oui, ils vivaient dans la même ville maintenant. « à yongsan, avec… plusieurs autres personnes… et un petit chien. » un léger rire, plutôt nerveux, quitta ses lèvres quand l’image d’honey grimpa dans sa tête. cette sale bête. « je pensais pas te revoir. »